Les Mondes d'Enyl

Eux.

Sharn n'était pas tranquille. C'était le deuxième contrôle ce mois-ci, et il savait que d'autre suivraient. Les Différents cachés dans l'arrière-boutique n'était plus en sécurité. Il devait trouver autre chose pour les faire travailler sans éveiller de soupçons... Il devait continuer de les cacher, de les nourrir... Si ils se faisaient attraper, les trois petits n'y survivraient pas... Comme son défunt fils, Mattew, qui était né Différent et était mort capturé. Il avait fini en pile, pour alimenter les batteries d'armes ou d'autres horreurs dans le même genre. Pour sa mémoire, il devait les aider.

Il entra dans le petit ensemble de pièces où vivaient les enfants. Il poussa un soupir de soulagement en constatant qu'ils allaient bien tous les trois.

 - Sharn ! Ca va ? Tu as eu un contrôle ?

 - Tout s'est bien passé ?

Les enfants le rejoignirent à la hâte. Karm venait d'avoir seize ans, il était plutôt robuste et aidait bien à la boutique, pour charger ou décharger les cargaisons, aider un peu aux tâches ménagères... Son Don, la télékinésie, était plus que pratique, même si il ne pouvait pas soulever un objet plus lourd que ce qu'il était capable de porter. Kamila était plus âgée, plus très loin des dix-huit printemps, et même si elle était moins forte physiquement, elle était très débroullarde et savait bricoler toute sorte de petits mécanismes, passionée par l'horlogerie. Elle avait même commencé à imaginer une porte secrète pour mieux les cacher dans l'arrière-boutique, elle et les autres. Son Don lui permettait d'effectuer des gestes d'une précision incroyablement élevée.
Et puis il y avait l'autre. Une gamine, pas plus de treize ou quatorze ans, aux longs cheveux noirs. Elle parlait peu, et elle avait toujours quatre ou cinq papillons qui voletaient autour d'elle, sans raison... Elle ne rechignait pas à aider, pour nettoyer la boutique ou pour cuisiner, mais restait le plus souvent dans son coin, silencieuse.

Sharn poussa un nouveau soupir.

 - Oui, les enfants... Oui, ça va, vous êtes hors de danger.

 - Tu sais... Tu prends beaucoup de risques en nous cachant ici... On devrait peut-être partir et trouver les agents de ce fameux Réseau... Au moins, on y serait en sécurité et tu n'aurais plus de problèmes... proposa Karm.

 - Non, Karm, tu sais très bien que ce serait trop risqué de rentrer directement en contact avec le Réseau...

 - Pas forcément, si ils comprennent qu'on est ici, ils viendront peut-être nous chercher pour nous protéger, et... commença Kamila.

 - Ne dis pas de bêtises, mon enfant... Ce serait beaucoup trop dangereux de vous afficher. Eux, la Milice, pourraient vous retrouver beaucoup trop rapidement... J'ai entendu dire qu'ils avaient trouvé une substance qui réagit lorsqu'un Différent est proche... Vous n'êtes plus en sécurité.

Kamila frissonna en imaginant les dangers qu'ils encouraient.

 - Ca fait peur...

 - Je ne te le fais pas dire, alors vous devez trouver une autre cachette...

Karm acquiesça en silence, réfléchissant à de potentielles planques pour leur petit groupe.

 - Peut-être qu'on pourrait trouver un endroit... Dans les égouts... proposa timidement la gamine aux papillons.

 - Dans les égouts ? C'est une idée ça...

 - Une bonne idée... approuva Sharn.

Le groupe réfléchit en silence pendant une longue minute.

 - Bien, nous allons essayer de...

L'homme fut interrompu par la sonette de l'entrée de la boutique. Il sortit précipitamment de la cachette et sourit aux nouveaux venus.

 - Bonjour messieurs, en quoi puis-je vous être uti-........

Il se rendit alors compte que ses cliens n'étaient autres que deux Miliciens, arme au poing, une sorte de tube luisant accroché à la ceinture. Il comprit immédiatement et pâlit soudainement.

 - Bonjour, monsieur Sharn... ricana une voix derrière les deux hommes.

 - Qui... Q-Que me voulez-vous ?......

 - Je veux les enfants.

Une silhouette se glissa entre les deux Miliciens, tenant une malette dans la main droite. Elle sourit cruellement.

 - Vous n'avez pas le droit de rentrer ici ! cria Sharn en voyant l'homme se diriger vers l'arrière-boutique.

 - La Milice à tous les droits, mon bon monsieur... Mais vous, vous n'avez pas le droit de cacher des Différents ici... Soldats, abattez-le.

Les Miliciens eurent un mouvement d'hésitation.

 - Décidément, on n'est jamais mieux servi que par soi-même... grommella l'homme en appuyant sur un bouton sur la malette.

Une longue faux à la lame rouge sombre se déploya en claquant, il sourit.

 - Le bonjour au petit Mattew ! dit-il en tranchant net le corps du pauvre homme en deux. Bien, maintenant que nous voilà débarassé de celui-ci, occupons nous des autres... Soldats gardez les entrées.

Il fit un pas et frappa la porte qui tomba net sous le coup.

 - Bonsoir les enfants, il est temps d'aller au lit, maintenant...