Andy,
Pourquoi je commencerai pas par la fin ? Je t'écris maintenant, et si c'était à toi de m'écrire depuis ta tombe ? Il y a pas mal de temps qui est passé entre notre réalité et la brutalité de la réalité. Tout le monde dit qu'il faut vivre ses rêves. Et si moi, je rêvais de vivre ? Je le pense, je l'écris pour toi et moi, et je me sens égoïste. Car ça, ça devait certainement être ton rêve d'écrire, et le rêve de beaucoup d'autres personnes.
Je hais les voyages et les explorateurs. Mais j'aime voyager et raconter mes explorations. Tu sais ce que disait Le Haut Gévaudan dans le chapitre deux de Cheylard et Luc ? Bien-sûr que tu le sais, tu aimais tellement ces écrits. Car ouais, tu le disais toi-même : Et lorsque le présent montre tant d'exigence, qui peut se soucier du futur ?
Je n'aime pas les voyages car je voyage pas que pour voyager. Je voyage pour le plaisir de voyager, de connaître d'autres cultures. Car si on se bouge pas le cul, le savoir ne viendra pas à nous. Je ne sais pas vraiment ce que j'ai avec ces deux thématiques là, mais tu sais quoi ...? On s'en quart ! (Ah, je suis sûre que tu m'en aurais foutu un bien placé dans le derrière). Tu sais, plus le temps passe, plus je me dis que tu devais être un sacré emmerdeur au final, sous ta couche de mélancolie. C'est contagieux tu penses ? Car je crois en être atteinte.
Pour être honnête, le but de t'écrire n'est pas juste le fait de vouloir t'emmerder comme dans ton vivant. Et j'estime que j'ai bien dû te faire chier pour que tu te casses comme ça. Si, dans quelques jours, je ne me suis pas mise à pleurer ta disparition, les gens vont me trouver absolument horrible. Je fais semblant d'être triste, triste et forte, comme toi. Euh non en fait. Toi, tu vivais avec, à sec, à vif. Et tu l'assumais mais personne ne s'en souciait. Mais la vérité est qu'en couchant ces mots sur papier, je pleure comme une rivière s'écoule. Lentement et infiniment.
Tu sais quoi? Le plus drôle à ton enterrement, juste avant que j'aille chez Penny Bar pour me saouler la gueule, c'est d'avoir vu les personnes que l'on connaissait au lycée, se pointer là, devant ton cercueil et faire leur jeu de masque pour bien se faire voir, car tu sais comment ta mère est pipelette. Des copines, elle en avait oui ! Toutes les mamans de nos classes s'étaient liées d'amitié -ou pas d'ailleurs- avec elle. Dont la raison du pourquoi ces gens, ces connaissances de la vieille époque montrent leur empathie. Mais une question me turlupine : Pourquoi faut-il toujours attendre la mort d'un individu pour oser se manifester ?
Je me suis toujours dit que la mort était qu'un phénomène, l'étape finale d'une vie. Tout le monde y passe sans exception. Mais en pensant à toi, je me rends compte que ce n'est pas totalement vrai. Car tu as dû mourir bien plus jeune qu'attendre ta propre mort. Et il m'en vient à croire que ce n'était pour toi que le fait de t'ouvrir. Entièrement et inexorablement. Andy, je connais ta vie, mais je ne te connais pas toi. Je veux te connaître, et je vais faire en sorte de te rencontrer. Le vrai toi.
C'est ça, le but de cette lettre. Je veux pouvoir me sentir concernée, réellement concernée, et savoir le pourquoi du comment.
Et puis tu sais quoi Andy ?
Si tu sautes, je saute aussi.Amitiés,
Arielle
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Beau est triste
Teen FictionUn sourire charmant, un regard troublant. Et un cœur pleurant. Arielle mène l'enquête sur la disparition d'Andy, son voisin dont elle a toujours été secrètement amoureuse. A 18 ans, tout n'est pas simple. Les responsabilités pointent et l'amour tran...