London By Art /Prof-Elève à suspens\

Chapitre 1

Je suis mon père presque en courant. Il m'en veut, c'est certain. Mes valises sont prêtes, mes papiers en ordre et moi... Et bien je n'ai qu'une envie, rejoindre Londres et ses folies.

- Je vous en prie, père, il faut me comprendre... Je n'ai pas connu maman aussi bien que vous. Pouvez-vous concevoir ce besoin que j'ai de la sentir auprès de moi ? Comprenez-vous que votre présence me manquera aussi ? Réalisez-vous bien que nous nous reverrons ? Ne m'en voulez pas... Je reviendrai très vite et vous viendrez me rencontrer. Père, je partirai quoi que vous puissiez en dire.

J'ai l'impression de le voir chavirer avant qu'il ne revienne à sa position initiale. Sa grande stature m'a toujours impressionnée, il est vrai, mais cet homme a été un père modèle malgré la mort de maman et ses rendez-vous politiques. Je ne lui en veux pas pour toutes les fois où nous avons été séparés mais pour le ravin qu'il a creusé au fil des années, pour que le souvenir de ma défunte mère s'évapore. Continuer ma vie à Londres pour me rapprocher d'elle est une réelle chance. Grâce à mon admission dans une grande université, je pourrai vivre ma vie librement bien que je sache d'avance que mon père me collera forcément des agents de sécurité aux baskets sans interruption. J'admire la façon dont mon père veille sur moi et la manière dont il pense aux moindres détails, mais je n'ai plus deux ans et mon envie de prendre mon envol est bien plus présente. Il fait volte-face, ses cheveux grisonnants ont l'air de frémir et il est lui-même parcouru d'un frisson.

- Que ce soit évident ou non Claire, tu as pour interdiction de quitter le sol américain. Suis-je clair ? Je refuse catégoriquement que tu partes à des centaines de kilomètres pour retrouver le souvenir de ta mère. Elle est morte et aucun lieu ne te fera vraiment penser à elle là-bas ! Tu n'y as pas vécu avec elle pour dire de connaître sa vie londonienne et jouer la grande dame ! Tu es peut-être majeure mais tu es ma fille et tu peux aisément te payer une école prestigieuse, ici, à Washington. Je te prie d'aller dans ta chambre, je passerai te voir après mon rendez-vous avec le président et je peux te dire que je ne supporterai pas une énième dispute ! Garde ton mauvais caractère pour tes amis. Tu me dois le respect !

- Pardon ? Mes amis ? Vous m'avez tellement enrubannée dans une tour dorée que je ne connais personne ! Allez donc voir votre ami le président qui, à l'entendre, vous est bien plus important que moi ! Je ne peux plus tolérer votre travail permanent père. Quand vous rendrez-vous compte que nous vivons comme deux étrangers ? Quand je serai mariée et avec des enfants ? Vous êtes vraiment...

Sa voix glacée me coupe littéralement le souffle.

- Tu vas trop loin insolente ! Tais-toi et va dans ta chambre !

Je me retourne violemment et m'enfuis vers les jardins pour lui montrer que son autorité ne m'atteint plus. Oh père, quand vous apercevrez-vous que l'enfant que j'étais a grandi pour laisser place à une jeune femme en quête d'aventure ? Le garde numéro deux me suit avec empressement. J'ai envie de hurler pour qu'il me laisse tranquille mais je me retiens de justesse. Au diable le protocole ! Je cours tout en pensant à le

semer. J'aurais dû me rappeler que ces anciens soldats avanceraient bien plus vite qu'une fille fatiguée par son cours

d'équitation et sa dispute avec son père... Zut, un nouveau rapport qui n'ira pas en ma faveur. Tant pis, je m'envole pour Londres dans moins d'une journée après tout. Seulement, comment échapper à la garde de ces agents fous et de mon paternel en rage ?

- Miss James, je vous en prie, arrêtez-vous !

Je me laisse tomber sur un banc dans le parc adjacent à la maison. Je ne peux plus supporter ces disputes continues. Père dit souvent que je joue un jeu de lutte avec lui, pour nous tester tous les deux. Réellement, il pense toujours voir en moi une enfant qui doit obéir aux ordres. Toujours une discipline impeccable pour la fille du vice-président ! Oh comme j'aimerais parfois être une jeune rebelle qui puisse faire ce que bon lui semble. Malheureusement, rien ne se passe ainsi. J'ai seulement le droit de suivre le protocole instauré, les règles de mon père, celle des agents de sécurité ou encore les recommandations de mon chaperon. A vingt-et-un ans... Je suis toujours suivie par une baby-sitter quand mon père juge opportun que je ne sois pas seule à la maison. C'est un enfer mais miss Kayle est souvent partie plus tôt que prévu, ce qui m'arrange.

Je redresse la tête et observe la fenêtre du bureau de mon père, il s'y trouve et me regarde avec un visage sévère. Je ne suis plus une gamine et je compte bien le lui montrer après tout.

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