Chapitre 10

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Dimanche, 17 heures.

Le soleil, éclatant après plusieurs jours de grisaille, baignait le jardin d'une lumière dorée. L'air embaumait l'odeur des grillades et du bois brûlé, tandis que Lucie jonglait entre son barbecue et ses blagues habituelles, toujours un peu irrévérencieuses, mais irrésistiblement drôles. Les éclats de rire s'élevaient au-dessus des notes de guitare qu'elle grattait parfois entre deux morceaux de merguez, accompagnée par Mathilde.

Mathilde, fidèle à elle-même, improvisait des paroles absurdes qui déclenchaient de nouvelles vagues de rires. À ses côtés, son compagnon, un grand brun discret, tapotait en rythme sur un cajón, transformant nos chants improvisés en un petit concert de fortune. Une playlist de classiques des années 80 tournait en fond, mais personne n'y prêtait vraiment attention, pris dans l'effervescence de l'instant.

Je tenais un verre de rosé dans une main et une tranche de pastèque dans l'autre, savourant cette parenthèse de légèreté. Il y avait une douceur dans cet après-midi, une simplicité rare où tout semblait juste parfaitement à sa place. Les discussions se mêlaient aux éclats de voix, et le clapotis de la petite fontaine dans un coin du jardin ajoutait une note apaisante à l'ensemble.

Mon portable vibra soudain sur la table en fer forgé. Je jetai un regard distrait à l'écran. Un numéro inconnu s'affichait.

— Tiens, c'est peut-être un admirateur secret, plaisanta Lucie, avant de reprendre un riff à la guitare, feignant une sérénade dramatique.

Je souris, amusée, mais ma curiosité prit le dessus. Je me levai, m'éloignant un peu du tumulte pour répondre.

— Allô ?

Une voix féminine répondit, légèrement rauque, comme si elle avait passé la journée à parler ou à crier.

— Emma ?

Il y avait quelque chose de vaguement familier dans cette intonation, bien que je n'arrive pas immédiatement à mettre un visage dessus.

— Oui, c'est moi. Vous êtes ?

— Eh bien, vous m'avez vite oubliée ! Louise !

Louise.

Ce nom fit irruption dans mon esprit, accompagné d'une image floue : un sourire éclatant, une démarche assurée, et cette aura magnétique qui semblait attirer les regards partout où elle allait.

Un sourire mi-amusé, mi-contrarié se dessina sur mes lèvres.

— Ah ! Totalement oubliée, en effet. Mais qui êtes-vous, Louise ? lançai-je, décidant de jouer le jeu.

Elle éclata de rire, ce genre de rire qui déborde d'assurance.

— Où êtes-vous, Emma ?

La question, posée sur un ton si direct, me prit de court.

— Euh... à un barbecue, répondis-je en regardant autour de moi, comme si cette réponse nécessitait une confirmation visuelle.

— Dans quel coin ?

Son ton se faisait pressant, comme si elle traçait une carte mentale en temps réel.

— Au quartier des Minimes.

— Pas loin de chez moi, alors. Vous avez les clés sur vous ?

Je fronçai légèrement les sourcils. Où voulait-elle en venir ?

— Oui, elles sont dans ma voiture... Pourquoi ?

Elle ne me laissa pas le temps d'émettre une hypothèse.

Madame la Maire [Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant