0 | Couleur Sans Nom

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Il était beau, avant, le petit gang des petits blonds.
Il y avait Gen, Paul, Frida, Orion et Edgar. Cinq blondinets, cinq gosses de riches, cinq adorables petits garnements. Mais tout ça, c'était avant.

Tout commence quand Paulo C. Ulfrich et sa sœur, Imogene R., rencontrent Orion Clémand. C'était en 1986.

« Il y a quelqu'un à côté de toi? » demande un garçon qui paraissait vieux pour ses 7ans, à celui qui était déjà assis à la table.

Nous sommes le Lundi 1er septembre, et c'est la rentré des classes.

Orion Clémand venait tout juste de s'installer à Bordeaux avec sa famille, et le petit garçon était plus ou moins perdu. Lui, il aurait préféré rester à Paris avec sa mère, mais son père a remporté la garde, alors il fait avec. Il sait que lorsqu'il aura atteint ses dix-huit ans, il pourra partir loin d'ici, retrouver sa maman qui lui manque énormément et, si il en a la possibilité, faire le tour du monde.

« Non, tu peux t'asseoir, si tu veux. » répond l'autre garçon d'un air distrait. Il s'acharnait sur une feuille blanche avec un crayon de couleur jaune. Orion s'installa alors à côté de lui et sorti ces affaires silencieusement de son cartable.
« Je m'appelle Paulo, parce que ma mère est Portugaise et qu'elle trouve ce nom beau », se présente son voisin. Il avait l'air de réciter une formule de politesse toute faite, «mais mes amis m'appellent, Paul. Tu peux m'appeler Paul, toi, s'tu veux. »
Orion n'avait pas l'habitude de parler aux gens qu'il ne connaissait pas. Bien sûr, il est évident qu'étant fils de banquier, il fut souvent amené à devoir discuter avec les enfants des partenaires de son père, qui, soit dit en passant étaient pour la plus part d'insignifiants bambins en manque d'attention. D'un autre côté, Orion n'avait plus rien à perdre, et tout à gagner dans une ville nouvelle, à 500 kilomètres de tout ce qu'il connaissait.
« Moi, c'est Orion, mais j'sais pas pourquoi. » il dit alors, tendant sa petite main d'enfant vers son voisin, afin qu'il la serre.
« Heureux de te rencontrer, Orion. J'pense qu'on sera bons copains. » Il posa son crayon jaune sur la table et prit la main d'Orion.
Il avait dessiné un soleil.

Par le biais de son frère, Gen rencontre Orion quelque semaines plus tard. La petite fille de deux ans sa cadette passa la journée à jeter des coups d'œils curieux au nouveau venu, alors que les garçons regardaient Inspecteur Gadget à la télévision.
Et si on regardait d'un peu plus près, on pouvait voir ses joues rougir légèrement quand il croisait son regard inquisiteur.

Frida-Amélie de Pontsec a quant à elle toujours été l'amie la plus proche d'Imogene. Elles s'étaient rencontrées alors même qu'elles étaient bébés, et depuis cette fameuse journée ou leurs deux nourrices respectives, qui elles se connaissaient depuis le lycée, eurent l'idée de les emmener au parc en même temps pour ne pas se retrouver seules entourées d'inconnus, les deux gamines ne se lâchèrent plus.
Pourtant, à déjà 5 et 6 ans, leurs attitudes n'auraient pu être plus opposées: Frida était manipulatrice et charmeuse mais rigoureuse, alors que Gen était la plus douce des enfants, plus calme encore qu'une journée à la campagne et bien trop rêveuse.

Edgar, le frère de la fiancée du frère aîné de Frida était tout le temps collé à elle. Les deux enfants se comportaient comme chien et chat mais en réalité, ils s'adoraient plus encore qu'ils adoraient leurs véritables frères et sœurs.
Le groupe de Gen était donc composé de Frida, de son frère et d'Edgar, par affiliation.

Il va de soi que les deux garçons s'entendaient déjà très bien, étant donné qu'ils étaient, depuis leurs 3 ans, membre du même club de football et donc de la même équipe.

« Ça ressemble à quoi, Paris ? » demande Edgar au petit garçon couché dans l'herbe à côté de lui.

Le voilà, le véritable premier moment du « gang » tel que je le conterai. La genèse de toute leur aventure.

Cinq blondinets- cinq gosses de riches- cinq adorables petits garnements sont couchés dans l'herbe, au parc à côté de chez Frida. Paul leur a dit qu'il voulait qu'ils soient tous réunis pour discuter de son anniversaire qui ne tardera pas à arriver. La nourrice de Frida les surveille d'un œil distrait sur un banc de l'autre côté de la plaine. Il fait nuit- il est très précisément 20:48. Les enfants regardent le plafond céleste, la tête dans le gazon, tous collés ensemble: Frida somnole à côté de Paul, Paul joue avec les cheveux de sa sœur, Gen chantonne tant bien que mal du Françoise Hardy tout en jetant des coups d'œils à Orion, qui lui caressait l'herbe avec passion, et Edgar fixe les étoiles comme si elles allaient l'avaler tout cru.

Aucun des enfants ne parle pendant quelques temps, jusqu'à ce qu'Orion réponde tout doucement.
« À un arc en ciel. »

Edgar prend alors la main de son voisin, qui attrape celle d'Imogene alors que Paulo et Frida ferment la boucle.
« Un jour, je vous y emmènerai. » annonce Paul.

Et c'est par cette promesse innocente que le « gang » vint à exister.

la couleur des gangstersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant