Salut, toi!

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Lui

J'ouvrai discrètement la porte de notre appartement, je ne voulais pas qu'elle m'entende. Je m'approchai, les jambes fléchies après un vendredi pénible. Elle ne m'avait toujours pas entendu lorsque, rapidement mais subtilement, je mis mes mains sur ses yeux. Elle ne sursauta guère. Elle était d'un calme hors du commun:

«Salut, toi! formula-t-elle simplement.

-Salut, toi, répondis-je amoureusement, je t'ai préparé une surprise pour ce week-end ! conclu-je, tu te souviens que c'est notre 8ème anniversaire de mariage, non ?»

Elle hocha la tête puis tenta de découvrir par tous les moyens mes intentions pour ce week-end, mais je restais de marbre face à ses multiples faciès toutes plus ravissante et attendrissante les unes que les autres. 

Notre relation était, à mon sens, la plus parfaite des relations que l'on puisse rêver d'avoir et, à ce moment-là, j'aurais pu dire à n'importe qui qui aurait croisé ma route que notre amour serait éternel. 

Comme promis, le samedi je l'emmenai découvrir sa surprise.

Elle

Nous roulions déjà depuis trois quarts-d'heures lorsqu'il se retourna vers moi, un sourire malicieux aux lèvres. Il m'informa que nous approchions lorsque, soudainement, il tourna et s'élança sur un sentier en gravillons. Après de multiples secousses, nous arrivions au terme de l'allée, d'où je voyais déjà la fameuse surprise. Il m'avait emmenée au manoir de Gringenveld.

D'après les légendes, il y a fort longtemps, la famille Gringenveld, une famille riche qui, selon certaines sources, aurait été plus riche même que le seigneur des terres où elle résidait, aurait fait construire la plus splendide et incommensurable demeure de toutes les terres de ce seigneur. D'autres légendes racontent que, désireux d'une telle bâtisse, il aurait fait exécuter l'entièreté des Gringenveld pour des motifs tout autant trouble que les légendes.

Révoltée pour une décision si cruelle, une sorcière aurait maudit cette maison, laissant les âmes des Gringenveld errer à jamais dans ce lieu désormais condamné.

Je ne crois évidemment pas à ces vilénies, bien que je m'intéresse terriblement à toutes ces histoires et à leurs origines. Il savait à la perfection comment me combler pour cette 8ème célébration de vie commune.

Lui

Je voyais à son sourire qu'elle était heureuse de cette surprise, et la voir ainsi me suffisait pour être enchanté à mon tour. Nous avancions vers le comptoir et je tapai sur la sonnette. Malicieuse, elle se dépêcha de malmener le grelot de petits coups rapides. En arrivant, le vieillard qui gérait le lieu me fusilla du regard, et ma femme retenu un fou rire. A vrai dire, il me fusilla de l'oeil car le pauvre bougre était borgne. Étrange, ce petit bonhomme. Je l'informai de nos noms et lui annonçai que nous avions réservé une chambre. Il consulta son agenda et nous fit signe de le suivre. J'emportai nos valises et deux étages plus haut je les déposai au sol, à bout de souffle. Nous ne nous étions pas pris la tête pour préparer nos affaires, ce qui explique surement la lourdeur de nos bagages. 

Le gérant nous raconta de nombreuses légendes, bien plus que celles que j'aurais pu trouver sur Internet. Certaines d'entre elles me donnaient froid dans le dos mais ma conjointe, habituée à ce genre d'histoire, restait de marbre face à ses innombrables anecdotes.

Environ une demi-heure plus tard il nous libéra après nous avoir brièvement présenté la chambre, qui elle aussi avait une histoire. Embêté par ses interminables récits, j'avais cessé d'écouter. Mais femme me résuma ce qu'il avait dit, entre autres que c'était la chambre des parents Gringenveld. 

Le borgne

Bonne nuit, joli couple. Profitez de ces derniers instants.

***** Note de l'auteur *****

Première partie. Qu'avez-vous déjà deviné ? 

Au cas où, les Gringenveld n'existent et n'ont jamais existé. C'est une fiction. 

Même si c'est un peu tôt dans le récit, avez-vous des idées où conseilles ?

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