Disparue

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Elle

Le borgne, certes un peu étrange, nous a raconté de nombreux mythes en lien avec l'ancienne bâtisse. Certaines étaient grotesques mais je l'écoutais tout de même, bien que, parfois, ses histoires étaient particulièrement risibles. Je retenais alors des petits ricanements, qui me valaient souvent des regards malsains et noirs. Je constatais rapidement que le bonhomme n'était pas net:

«Merci pour la visite, maintenant vous pouvez nous laisser seuls, blaguais-je, mais cela ne le fit pas rire.

-Au revoir et rassurez-vous, vous n'aurez jamais été aussi seul qu'aujourd'hui...» marmonna-t-il dans sa barbe.

Je ne compris pas ce qu'il avait dit mais je considérais ses mots comme un au revoir courtois, autant inattendu que cela aurait pur être venant d'un tel personnage. Je lui fis un dernier sourire et nous entrâmes dans la pièce:

«C'est splendide ! m'émerveille-je, regarde ces gravures et ornements sur le lit !»

Le cadre de lit était orné de fines gravures et l'ensemble de la pièce de somptueuses peintures, qui, d'après moi, dataient toutes de l'époque où la bâtisse fut construite. Mon mari, moins impressionné, surement parce qu'il s'intéresse moins à l'art ancien que moi, se contenta de déposer nos bagages au sol.

Fatiguée et malodorante après ce trajet qui m'avait paru une éternité, j'allai prendre une douche.

Lui

Elle m'informa qu'elle allait prendre une douche et me fit un regard coquin que j'interprétais comme un appel à la suivre. J'entendais déjà l'eau couler mais je voulais d'abord finir de ranger nos vêtements dans l'armoire. Lorsque j'eus fini, l'eau coulait encore et je décidai de la rejoindre. Je frappai à la porte, puis sans attendre de réponse j'entrai:

«Je suis là, susurrai-je, je viens te chercher... chérie, tu es sûre de vouloir faire ce genre de blague ? lui dis-je en ne la voyant pas. Arrête, c'était drôle lorsque nous avions 25 ans, plus maintenant... Tout de même un peu inquiet, je l'appelais mais cette fois avec une inquiétude que je ne pouvais cacher dans ma voix. Elle ne répondait pas et le fait qu'elle ait arrêté les blagues depuis longtemps ne me rassurait pas.

Je m'empressai de sortir de la chambre et dévalais l'escalier en frôlant la chute à plusieurs reprises. À peine arrivé face au borgne, je bégayais quelques sons plus ou moins compréhensibles. Je m'arrêtais quelques instants pour reprendre mon souffle et répétai-je:

«Ma femme... où ? Elle... elle est partie ? Vous l'avez vue ? bafouillai-je. Elle a disparu... aidez... j'ai besoin d'aide pour la trouver. Le vacarme que j'avais causé rameuta les quelques curieux qui avaient également décidé de visiter ce manoir. Je les entendais chuchoter mais n'y prêtait pas attention.

-Calmez-vous, monsieur, dit le vieillard d'un ton beaucoup trop calme pour la situation. On la retrouvera bien. Allez du vent jeunes gens, s'exclama-t-il avant de se diriger vers le parc. Elle est forcément quelque part conclut-il.»

Je le suivais, la larme à l'oeil. Pourquoi était-elle partie ?

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