Covoiturage

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Je remonte le col de mon manteau, serre un peu plus mon écharpe et enfonce mon bonnet sur mes oreilles. Bon sang qu’il fait froid. Ça nous est tombé dessus, comme ça, d’un seul coup. La semaine dernière il faisait encore doux le matin mais là on tombe sous la barre du zéro, les voitures sont complètement givrées et moi, je suis frigorifié. D’habitude j’adore l’hiver et je me régale lorsque, au mois de décembre, les températures chutent doucement, annonçant l’arrivée des fêtes. Mais là, ça a été si soudain que je n’arrive pas à m’en réjouir.

Je claque des dents en attrapant mes gants et en les enfilant avec difficulté tellement je tremble. Et merde, mon nez se met à couler. J’extirpe tant bien que mal un mouchoir de mes poches afin de remédier à ce problème puis ouvre la voiture pour prendre mon grattoir.

Manquerait plus que je sois en retard.

Aujourd’hui.

Ça non. Je m’y refuse.

Je mets le contact et lance le chauffage à fond ainsi que le dégivrage arrière, et m’atèle à la tache. Je gratte le givre qui s’est déposé pendant les dernières heures. Celui-ci, en se détachant, se répand sur mon manteau noir, le constellant de petites taches blanches que je finis par épousseter afin de rester au sec.

Une fois la voiture complètement dégagée je grimpe à l’intérieur, toujours tremblant, et mets en marche l’autoradio. L’habitacle commence à se réchauffer et je détache mon manteau pour être un peu plus à l’aise. Je jette un œil dans le rétroviseur afin de m’assurer que je suis présentable mais je ne cherche pas plus quand je vois mon visage. J’ai les traits fatigués, le nez rouge et je suis certain que, même sous mon bonnet, mes oreilles le sont aussi.

Mais bon, il faut que j’y aille.

Je prends donc la route, écoutant les animateurs radios raconter leurs bêtises, me rendant par la même occasion ma bonne humeur, qui avait disparue.

C’est en riant, tout seul comme un con, que j’arrive au point de rendez-vous. Je repère la personne qui m’attend et m’arrête à son niveau.

Léo.

Il est tout emmitouflé dans un gros manteau, lui aussi porte un bonnet et des gants, et il a tellement enroulé sa longue écharpe autour de son cou que seul son nez et ses yeux sont visibles.

Mais même comme ça, il est beau.

Je sais qu’il est parfait, j’ai tant détaillé son visage ces dernières semaines.

Il ouvre la portière à la volée et s’engouffre dans la voiture sans demander son reste. Il claque des dents et tremble autant que moi il y a dix minutes. J’avoue le trouver vraiment mignon.

- Salut. S’exclame t’il en se tournant vers moi et en dégageant sa bouche de son écharpe.
- Salut. Je lui réponds en souriant.
- Bon sang quel temps de… oups pardon, j’allais dire… bref.

Je ris en le voyant se retenir de jurer.

- Un temps de merde tu peux le dire, je ne serais pas choqué.

Il me fait un énorme sourire et reprend alors.

- Et bien alors… Putain quel temps de merde. Je suis descendu une première fois sans tout mon barda d’hiver. J’ai dû remonter dans mon appart pour retrouver mes gants, mon bonnet et ce truc qui me sert d’écharpe. C’est immense d’ailleurs.
- En effet, mais ça a l’air bien chaud.
- Ouaip, ça c’est sûr. Mais je pense que ça appartient à ma sœur.

J’éclate de rire et il hausse les épaules l’air de dire, tant pis maintenant que c’est là, je garde.

Puis, son regard se plonge dans le mien et son sourire devient éclatant. Moi je suis là, comme un demeuré, ne pouvant pas empêcher mes zygomatiques de se contracter en un sourire certainement débile.

OSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant