Ne me laisse pas mourir

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Cela fait presque de deux heures que je marche. C'est déjà deux heures de trop pour trouver ce foutu bâtiment. J'ai passé ma nuit puis ma journée au poste. J'ai répondu au question, j'ai entendu le sermon, j'ai gueulé, j'ai attendu, j'ai écouté, j'ai insulté et finalement on m'a laissé partir. Et après j'ai marché deux longues heures pour parvenir là où les héros n'arriveront que ce soir. Là où ils l'ont emmené, là où je le trouverai. J'ai décidé de le sauver quoi qu'il m'en coûte, parce que tout est de ma faute.

Je voyais tout pourtant. Je savais qu'il me regardait, il devait sûrement accaparer mon attention lui aussi. Je le laissait faire parce que j'aimais bien l'idée de lui plaire. C'était après les stages, on s'était rapprochés. Eijiro râlait parce que je passait moins de temps avec lui, que je le remplaçait en temps que meilleur ami. Comme il se trompait. Je sentais ses doigts effleurer le dos de ma main, l'air de rien, les yeux tournés vers la rue monotone et les passants sans intérêt. Est ce que j'avais déjà attrapé ces doigts au vol ? Les jours passaient et ce petit jeu continuait. L'air de rien. Sans qu'il ne parle, sans que je gueule. En silence. Il posait négligemment sa tête sur mon épaule et je le laissais faire. Je le prenais dans mes bras quand j'étais heureux et il s'appuyait contre moi sans rien dire. C'était déjà de l'amour à ce moment là ? Je trouvais ça normal tout en me sentant mal. J'évitais penser que ces gestes voulaient dire plus que « nous sommes amis ».

Le bâtiment se trouve devant moi, la rue est bondée. Ce sont tous des jeunes bourrés à la recherche de plus, plus d'alcool dans le sang, plus de joie dans leur vie, plus de sensations taboues qui les maintiendront éveillés toutes la nuit. On est dans le quartier chaud de Tokyo. Mais moi mon monde est froid, et je n'ai pas besoin de plus. Je suis venu récupérer mon moins. Ce qu'il me manque. L'immeuble de trois étages est semblable à son voisin, et au suivant. La toiture grise, les fenêtres en bois sombre, les volets encore ouverts, les lumières et les cris à l'intérieur, tout est identique au reste du quartier. Je rentre et commande un verre, que je vide. Il me faudra sûrement du courage, et le liquide chaud s'écoule dans ma gorge. Hier soir il m'avais forcé à réaliser que je pouvais pas continuer à faire comme si de rien était. Le tenter et chercher a lui plaire « l'air de rien ». Hier soir j'avais tenté vainement de vaincre mon envie de lui donner raison.

Je termine mon verre et glisse quelques mots au barman, je sais quoi lui dire. Il me fait signe de le suivre et me fait passer par la cave, les alcools luisent dans leur prisons de verre, attendant leur tour. Il pousse une porte et je le suis à l'intérieur, il n'y a qu'un simple couloir derrière qui doit mener au fameux bar clandestin. Je profite que l'autre abruti ai le dos tourné pour l'assommer. Je le fouille rapidement pour récupérer d'éventuelles clés, codes,portable ou autres trucs utiles avant de le pousser derrière les étalages remplis de boissons. Je continue le long du couloir, c'est l'archétype de la planque de vilain glauque. Je finis par atteindre une porte. J'y colle mon oreille et entends les voix derrière. Des que j'entends son nom je m'emballe. Mon coeur s'accélère et j'explose la porte pour me jeter sur mon premier adversaire que j'envoie bouler contre un mur. Pour le côté infiltration on repassera. Je plaque le second type contre le sol, un sourire satisfait sur le visage je me penche à son oreille.

- C'est très intéressant c'que tu dis, tu veux pas me montrer où il est aussi ?

- Je... pitié... j'en sais trop rien, sûrement au deuxième sous sol avec les autres mais après je sais pas où...

- Ya combien de gardes ?

- Je sais p...

Agacé je l'empoigne par les cheveux, son pote qui à une peu écailleuse et deux grosses pattes griffues dort toujours au fond de la pièce. J'espère qu'il ne se réveillera pas de sitôt parce que sinon je serai obligé de leur faire connaître mon alter. Mais pour l'instant je perd patience.

Ne me laisse pas mourirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant