Partie I

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 « Ici-bas tous les lilas meurent, Tous les chants des oiseaux sont courts, Je rêve aux étés qui demeurent Toujours

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 « Ici-bas tous les lilas meurent, Tous les chants des oiseaux sont courts, Je rêve aux étés qui demeurent Toujours. » 

Stances et Poèmes - L'âme 
[Sully Prudhomme ]


Le ciel était bleu,  j'étais dans un jardin rempli d'une multitude de fleurs, le chant mélodieux des oiseaux me parvenait et je chantais avec eux. Je me sentais légère, baignant dans cette quiétude. L'oiseau bleu, mon préféré, se tenait près de moi je pouvais presque le toucher. Je tendis mes doigts dans sa direction mais lorsque je tentai de l'effleurer il disparut dans les cieux. Mais l'univers s'effrita peu à peu pour laisser place à la désillusion, l'euphorie qui m'habitait les instants précédents m'abandonna pour un vide immense imbibé de douleur. Oui, je ne pourrais jamais m'envoler loin de cette réalité.

Mes poignets me faisaient mal à cause de ces liens qui me ligotaient . Ma peau était à vif. Le soleil me desséchait et l'envie de boire me saisissait déjà. Mes yeux vaguèrent vers la foule qui émettait ce brouhaha que je n'avais jamais aimé mais que je m'étais habituée à supporter. La voix du marchand que je n'aimais guère s'éleva recouvrant une partie de ces sons informes :

" Voyez quelle peau blanche! Elle est belle des pieds à la tête! Elle chante avec art et douceur!"

Je m'étais depuis longtemps accommodée à mon statut d'objet. Pourtant quelque chose en moi brûlait encore. Je connaissais ce sentiment depuis ma captivité. J'aimerai être comme ces oiseaux. J'aimerai m'envoler loin de la fatalité. J'aimerai chanter tout l'été.

" Combien pour cette enfant ?, demanda un homme qui avait l'air intéressé

- 500 sous jeune homme !"

Quelqu'un voulait de moi. 

L'homme fouilla dans une déchirure de son sarouel. Il prit une liasse de billet et le jeta au nez du vendeur. Au même moment, un coup de feu retentit suivi d'une multitude de volatiles qui se dispersaient dans notre direction. Ils s'engouffrèrent dans la rue et je fermai les yeux.

Quand je les rouvris, le décor n'était plus cette allée bruyante que je connaissais si bien, non, ce n'était qu'un entre deux. Aux alentours ne se trouvait que l'obscurité, des images informes apparaissaient mais ce n'était que des fragments de vie. Une silhouette se détacha des ténèbres; il semblait que c'était un oiseau avec diverses plumes aux extrémités lactées. Des chaines immortelles semblaient désunir la pureté de cet être; ses pupilles prirent alors un aspect rouge sang. Il émit un cri strident remplaçant le chant mélodieux dont j'avais l'habitude. Il exprimait de la mélancolie, de la souffrance, de la peur et de la haine. La même chose que moi. Il réussissait à retranscrire à la perfection mes sentiments inavoués.

J'avais des vertiges et dans ma tête résonnait encore la vocifération du petit animal ailé. Ce monde lugubre avait fait place à ce Carrefour assourdissant. Le désordre laissait paraître la confusion dans tout les esprits. Les volatiles ténébreux  avaient quitté les lieux.

Je me relevai avec peine encore légèrement sonnée quand mon "propriétaire" me piqua avec une seringue. Mes yeux se fermèrent et j'avais le sentiment qu'ils n'allaient plus prendre la peine de se rouvrir. Tout mon corps s'engourdissait. Je ne sentais plus mes jambes et je m'écroulai à genoux sur le sol aride. Ma tête commençait à tourner, je voulais lutter en soulevant mon corps qui ne me répondait plus. Le sol m'attirait vers lui comme pour  m'absorber. Je lâchai prise et m'entraînai vers un lointain repos.

Des bruits de pas m'arrachèrent à ma somnolence. J'étais encore paralysée et me contentais de tourner doucement la tête.

" Pourquoi m'avez vous endormie ?, m'empressais-je de demander

- Tu étais plus facile à transporter ainsi ", me dit il l'air amusé.

Il ne s'était pas offusqué par cette question impertinente. Il ne m'avait pas frappé pour me rappeler mon statut d'objet.                                                                               

Il avait les cheveux ambré et les yeux mauve, son visage était parfaitement bien dessiné. Le lieu où je logeais était une sorte de cabine, une pièce assez luxueuse avec des meubles vernis, des rideaux de velours et un lustre en cristal au centre de la pièce.

" Repose-toi ", me dit-il.

Ses paroles me surprirent mais je n'avais pas la force de le contredire. En avais-je seulement le droit?

Mes paupières se fermèrent et le sommeil vint me cueillir.

Bird's lightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant