Chapitre 5

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Je vous souhaite à tous de bonnes fêtes de fin d'année. Voici mon petit cadeau pour vous, un nouveau chapitre. Bonne lecture!

Chapitre 5

Les jours passent dans un brouillard pour la jeune fille, qui se tient en retrait de la réalité. Son cerveau mouline dans le vide, elle ne parvient à réagir à ce qui se passe autour d'elle. Elle voit les gens interagir, sans parvenir à s'immiscer dans la conversation. L'enterrement est pour bientôt. C'est la seule certitude qui résonne en Lana. La maison se remplit de gens de passage, la transformant en véritable moulin. Ses parents soutiennent ceux d'Emma, comme ils le peuvent. Pour sa part, elle a refusé de les voir avant le jour fatidique. Elle ne se sent pas prête. Elle ignore comment se comporter face à eux. Leur propre accablement serait davantage un fardeau, alors qu'elle a suffisamment à faire avec ses émotions.

La venue de ses amis la sort de l'ivresse dans laquelle elle s'est plongée pour se protéger de ce remue-ménage. Ces retrouvailles transparaissent comme un soulagement. Quel bonheur de revoir des visages familiers ! Ces personnes avec qui elle a partagé son adolescence, et sa vie londonienne. Tout cela lui parait si lointain. La relativité au temps si subjective. Les quatre jeunes gens se regardent un peu hésitants. C'est différent d'avant. Jamais ils n'ont vu Lana sans Emma. Un vide s'est créé. Savoir qu'elle ne se tiendra plus jamais avec eux dans cette pièce, les éblouissant de son sourire, leur serre la gorge. Leur visage est terne et leurs yeux bouffis d'avoir trop pleuré la perte d'une amie. Les mots sonnent creux, incapables de retranscrire ce qu'ils ressentent. Il faut que le temps se dépêche de faire son travail et de refermer leur blessure, mais on ne comble pas aisément l'absence d'une amie. Ni ce que sa mort a emporté avec elle. Il leur faut retrouver un autre équilibre qui pour le moment est bancal.

Dans la chambre, ils se taisent. Les murs de la maison les étouffent. Le brouhaha des murmures incessants, les pleurs angoissants envahissent leurs oreilles. Lana va exploser. Elle doit sortir. Vite ! L'une d'entre eux remarque son humeur. Elle lui propose une échappatoire.

- Une petite ballade, ça vous tente ?

Aucun ne proteste. Lana se rue presque vers la sortie. Dehors, elle a l'impression de redécouvrir la sensation du soleil qui réchauffe son corps. Leur groupe d'amis s'éloigne, laissant dans son sillage, l'effervescence d'une fourmilière.


Lana prend la direction de leur groupe, elle mène ses quatre amis dans des lieux trop connus. Là où leur histoire a débuté. Là où ils ont souffert, espéré, douté. Dans la pierre inébranlable, devant une large avenue où se pressent des centaines de véhicules, là où retentissent les sonneries des ambulances, se dresse l'hôpital. Lana le contemple platement. Ce lieu hanté regorge de souvenirs, qui ne demandent qu'à ressurgir. Elle laisse le flot se déverser.

La chanson se répète inlassablement. Une crise, la douleur, cette chambre aux murs blancs, à l'air artificiel. Les parents des jeunes filles les conduisent à l'hôpital lorsque les migraines prennent une trop forte intensité, où pour un examen vérifiant l'évolution de la maladie, afin de s'assurer que le système nerveux ne souffre et ne s'endommage pas. Elles restent des jours durant cloitrées dans cette pièce. Autant dire qu'à douze ou treize ans, passer ses journées enfermées dans un milieu médical ne fait pas parti de leur liste de souhaits. Redoublant d'ingéniosité pour tromper l'ennui, les deux filles mettent tout en œuvre pour troubler la vie du personnel. Ce qui fonctionne assez bien, enfin jusqu'à ce que le chef de service intervienne, et fasse cesser leurs frasques. A la place, il leur propose une alternative. Il se doute bien que ces séjours forcés ne sont pas marrant, et que leur moral flanche lorsqu'elles se croient à l'abri des regards indiscrets. Cela n'arrive jamais en présence des parents, mais certains médecins ont pu assister à ce triste spectacle qui les laisse impuissants.

La flamme de la vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant