Chapitre 1

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Du haut du toit, je pose mon œil contre la lunette de mon arme. La cible ne va pas tarder à sortir du bâtiment et je n'aurai plus qu'une seule chose à faire : tirer pour la tuer. Ou plutôt : tirer pour le tuer. Je sais juste que c'est un mec et qu'il trempe dans des affaires louches qui menace la sécurité de notre pays.

En temps normal, nous ne tuons pas en pleine rue. Au contraire. On enlève les gens avant de les tuer. Bien qu'étant envoyé par le gouvernement et même le Président, les policiers locaux n'apprécient pas trop retrouver leurs rues pleines de cadavres. Mais d'après les infos que j'ai : il menace le Président directement et la menace est imminente. Pas le temps de le faire enlever pour le tuer. On serait trop juste niveau timing.

Je sens une arme se braquer sur ma tête. Mon cœur ne s'accélère pas parce que j'ai une idée de qui ça peut être. Je glisse ma main, doucement, vers la poche de ma veste noire et en fait sortir ma carte d'agent spécial.

"On s'en fout de ta carte ! Il est hors de question qu'on se retrouve avec un cadavre tué en pleine rue au milieu des Champs-Elysées, en pleine journée alors que c'est bondé ! Si tu te foire..."


Je n'écoute plus. La cible s'apprête à sortir comme me l'a soufflé Amanda qui est à l'intérieur. Je recolle mon œil sur la lunette et m'apprête à tirer mais me fige en voyant un ado d'à peine seize ans sortir.

"Qu'est-ce que tu fous, Gareth ?  hurle Amanda. Butes le, bordel ! TIRES !"


Incapable de faire un mouvement, je reste allongé sur le ventre, les mains tremblantes et une arme braquée sur la tête. Je ne peux pas. Je ne peux définitivement pas. Il a, à peine, l'âge de Sacha et Liam, ma sœur et mon frère.

Je retire mes mains de l'arme de pointe que j'ai et me tourne sur le dos pour indiquer aux agents qu'ils n'ont plus rien à craindre.

"Vous devrez vous expliquer avec Monsieur le Président, Messieurs !

-Gareth, à qui parles-tu ?

-Aux flics qui m'ont empêché de tirer, Amy. Mais ne t'inquiète pas. On va gérer."


Des cris se font entendre. Un mouvement suffit à me remettre sur le ventre pour voir ce qu'il se passe. J'appuie mon œil sur la lunette et trouve, rapidement, le problème. L'adolescent est étendu, au sol, une balle dans le crâne. Quand je cherche tout autour, je vois quelqu'un avancer. Une blonde avec une casquette noire sur la tête et une tenue entièrement noire. Amanda. Je me relève et les agents me laissent ramasser mon matériel.

"Vous l'avez quand même, votre mort au milieu de la rue. Vous devriez peut-être aller voir."


Ils me lancent un regard dédaigneux et partent. Le roux lance un regard par dessus son épaule. Roméo Gavielni. Il me déteste. Il sait que je tire mieux que lui et que je lui suis supérieur malgré le fait que je ne sois pas encore majeur. Je sais qu'il me déteste parce qu'il sait que je peux le faire virer de l'armée française en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire.


*          *          *


Amanda et moi marchons dans les couloirs, la blonde avançant rapidement. Elle n'a pas décroché un seul mot depuis qu'on a décollé des Champs. Et ça commence à me courir sur le haricot mais je sais que si j'ouvre la bouche, elle va me clasher et on va se prendre la tête parce que j'ai mon orgueil et je déteste quand elle me clashe comme si j'étais une merde. Elle toque et on entend une voix nous ordonner d'entrer.

"Je ne vous félicite pas, Agent Dupont !

-C'était un gamin !

-Un gamin qui menaçait notre Président, Agent ! Quand je vous donne un ordre : vous l'accomplissez sans poser de questions ! Les règles sont strictes, ici, et vous le savez ! Il avait seize ans. Le même âge que Victor Straussman quand il a tué votre mère !"


Je serre les poings à l'évocation de ma mère. Elle n'a pas le droit de me dire ça. Elle n'a pas le droit de parler de ma mère alors que je rentre d'une mission. Elle ne peut tout simplement pas faire ça.

"Agent Marie, vous pouvez partir ! Vous avez fait un excellent travail !"


Ma coéquipière du jour sort, tête haute, fière. Je la déteste, c'est définitif. Je ne l'aimais déjà pas beaucoup avant, alors maintenant, je ne vous en parle même pas.

"Visiblement, vous n'êtes pas digne de confiance.

-Bien sûr que si !

-Prouvez-le !

-Comment ?"


Elle se lève et attrape la télécommande de l'écran géant qu'elle allume, montrant les dossiers qu'elle a sur son ordinateur. Elle ouvre le dossier 356 221 et des fichiers s'ouvrent. Elle affiche la fiche de la cible, ne faisant apparaître que la photo. Je sais que le reste viendra en même temps qu'elle parlera.

"Swan Smythe. 17 ans."


Mon cœur s'arrête de battre et je me tourne vers elle. Elle ne peut pas être sérieuse. Elle ne peut pas vraiment penser que je ferais ça. Comment - elle même - peut-elle faire ça ?

"Madame la Directrice...

-Le Central d'Information, de Renseignements et d'Extermination a pour ordre de le tuer comme toutes les menaces du Président.

-Vous ne pouvez pas être sérieuse !

-Je ne le suis que trop. Vous devez exterminé Swan. Vous me le trouvez et vous me le tuez. Si vous ne le faite pas, vous et votre famille sautez. Est-ce que je suis bien claire ?

-Vous ne pouvez pas faire sauter un agent aussi compétent et ancien que mon père et Danny !

-On pari ? Tuez Smythe et on n'en parle plus. Vous pouvez disposez." dit-elle sèchement alors que j'allais parler.


L'ordre est sans appel. Je dois sortir. Et bosser sur le cas Swan Smythe. Je retire rageusement l'oreillette de l'endroit où elle est placée et me dirige vers mes quartiers personnels. J'ai vraiment besoin d'une bonne douche et d'un bon moment de détente avant de commencer cette enquête qui s'annonce longue et compliquée. Plus que toute les autres. Tellement plus que les autres.

Agent SpécialWhere stories live. Discover now