Partie unique

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Elio enleva son anorak, le pendit sur le porte manteau suspendu à la porte, et valsa dans le salon au son de la musique venant de ses écouteurs.
Il était encore tout excité après la sortie avec ses amis à Gaverine; et la neige le rendait toujours heureux.

Ses parents étaient dans la bibliothèque, discutant de quelque chose qui ne l'intéressait pas vraiment. Il s'assit sur le canapé, prit une grande inspiration, et essaya de penser à quelque chose pour s'occuper.

Les vacances pouvaient être très longues la plupart du temps, surtout quand il n'avait pas de devoirs à faire. Il n'avait pas envie de jouer, que ce soit de la guitare ou du piano. Il n'avait pas envie de manger – bien qu'il est possible qu'il aille voir ce que Mafalda cuisinait, juste pour le plaisir de voler quelque chose puis qu'elle le réprimande avant de l'embrasser et de finalement lui donner quelque chose à manger.

Il n'avait pas envie d'écrire non plus. Il avait caché son journal sous une commode dans sa chambre après l'été; il avait décidé que maintenant qu'il était plus vieux il ne l'utiliserait plus.

La sonnerie stridente du téléphone le sortit de ses rêveries. Il se mordit la lèvre et sauta du canapé. "Je le prends!," cria-t-il à ses parents. Juste pour faire quelque chose, en attendant qu'il décide comment soulager son ennui.

"Pronto?" répondit-il dans le combiné.

"Elio?"

Oliver.

Quoi? Comment...? Pourquoi.

"Salut."  et Elio, d'une certaine manière, eut le souffle coupé.

Oliver. Oliver. Son amour de vacances. L'homme dont il est tombé amoureux. Oliver.
Il n'a pas entendu parlé de lui depuis son retour en Amérique.

"Elio. Comment tu vas?"

La voix d'Oliver était faible et il y avait un écho, mais ça ne gêna pas Elio, c'était comme ça devait l'être, c'est comme s'il était revenu dans le passé; de leur été ensemble, aux champs ensoleillés dans lesquels ils faisaient du vélo. Ou bien peut-être sur les rives de la rivière où ils avaient partagés leur tout premier baiser. Elio se dit qu'il avait dû resté bloqué là-bas et qu'il ne pouvait plus en partir.

"Je vais bien. Tout va bien."

Le cœur d'Elio battait la chamade; et une sorte d'euphorie prit place dans tout son corps. Son visage voulut se fendre d'un sourire; ses joues étaient écarlates, et il espéra ne pas être vu par Mafalda.

"Tu me manques," chuchota-t-il.

Oui. Oui, oui. Oliver lui manquait tellement.

"Tu me manques aussi. Tellement."

La voix d'Oliver était toujours aussi faible, mais si Elio fermait ses yeux, la voix était comme une caresse contre sa peau. S'il fermait les yeux, il pourrait sentir les grandes mains d'Oliver toucher sa peau et son corps nu.

Elio sentit qu'il perdait la tête. Pourquoi est-ce qu'Oliver appelait? Il manque terriblement à Elio, surtout maintenant qu'il a entendu sa voix. Son corps voulait être pressé contre celui d'Oliver. Et maintenant Elio voulait pleurer.

"Écoutes, j'ai des nouvelles.." déclara Oliver. Elio ferma les yeux; plus tellement sûr s'il écoutait. Oliver, j'ai juste besoin de ta voix.

"Je me demandais, si peut-être..." et puis Oliver ajouta. "Si peut-être tu voudrais venir à Clusone. Me rejoindre."

Quoi.

"Clusone? Oliver – quoi," s'entendit bredouiller Elio. Son cœur battait la chamade et pendant une seconde il crut s'évanouir.

"Je suis, je suis là. A la gare. Je pensais – mais je peux prendre un taxi, ou..."

"Ne plaisante pas avec ça."

Elio fut surpris de sa propre voix – on aurait dit qu'il pleurait mais ce n'était pas le cas. Il fronça les sourcils, et préparait sa mâchoire. Il était prêt à être furieux, si Oliver plaisantait.

"Je ne plaisante pas." dit Oliver, avant de continuer. "Elio. Je ne plaisante pas. Je suis... Je suis là." Et Elio entendit Oliver prendre une grande inspiration. "Je voulais revenir. Je ne pouvais pas... J'étais trop malheureux. J'avais besoin de te revoir."

Une autre inspiration.

"S'il te plaît, dis moi que je peux."

La tristesse présente dans la voix d'Oliver toucha Elio en plein cœur. Il prit également une inspiration. Et sortit de cette étrange transe dans laquelle il était depuis le début de l'appel. Ça doit être vrai. Ça doit être vrai. Même si ça ne semble pas possible, Oliver est là.

"Je vais, je vais demander à mon père. On va venir te chercher. Tu – attends juste où tu es."

De l'autre côté de la ligne, Oliver gloussa.

"Tu sais bien que je n'irais nul part."

Elio ferma les yeux, en sentant une nouvelle vague de larmes tombées le long de ses joues. Son cœur faisait encore des sauts périlleux, et il savait qu'il ne s'arrêterait pas tant qu'il n'avait pas vu Oliver en chair et en os.

"A tout à l'heure."

• •

La gare était déserte en cette nuit de réveillon de Noël.

Fumant une cigarette dehors, seulement éclairé par la lune, Samuel attendait. Elio avait couru à l'intérieur, anxieux; et maintenant, Oliver et lui étaient les deux seules âmes sur le quai.

Étroitement enlacé, dans un premier temps; ils fusionnèrent ensuite en un baiser. Elio ne pouvait plus s'arrêter d'embrasser Oliver, ne pouvait plus le laisser partir – et c'est à quoi ça ressemblait ; sa vie ; quelque chose laissée vide de sens, quelque chose qu'Oliver a prit avec lui le jour où il est parti. Jusqu'à aujourd'hui.

"Tu me crois maintenant?" demanda Oliver, avec un sourire timide. Ses yeux étaient également mouillés. "Est-ce que tu réalises enfin que je suis de retour?"

La lune rendit le visage de son bien-aimé encore plus sublime.

Et Elio acquiesça.

"Oui. Oui. Oh mon dieu, oui."

La lune brilla, alors qu'ils restèrent enlacés. Ils restèrent ainsi jusqu'à ce qu'ils réalisent que c'était réel, et non pas un rêve, ou leur imagination. Jusqu'à ce qu'ils réalisent qu'ils étaient vraiment de nouveau ensemble.

You know I'm not going anywhereOù les histoires vivent. Découvrez maintenant