08h15.
« -Lune ? T'as la tête dans les nuages ? Je t'ai parlé. »Lune s'était déjà mise à réfléchir. Elle s'était couchée à minuit la veille, et avait fait la bise à son père avant d'aller au lit. Il n'avait rien dit pouvant lui mettre la puce à l'oreille à ce moment là. La lumière n'apparaissant que 24 heures avant la mort, cela signifiait forcément qu'elle allait mourir entre minuit et huit heure du matin. Sa vie défilait déjà devant ses yeux. Pourquoi elle ? Pourquoi si tôt ? 18 ans, ce n'est pas le bon âge pour mourir. Elle s'était toujours imaginée mourir de vieillesse dans son lit, entourée de plantes, et d'animaux, et Asahi à ses côtés. Elle se demandait aussi de quelle manière elle allait mourir. « J'espère ne pas souffrir », murmura-t-elle.
« -Lune ? T'es redescendue ? Je t'ai parlé..
« -Huh ? Oh, oui, pardon, papa. Heum, ouais, je, ouais, je vais la voir. T'as raison.»
Elle se retourna pour partir, mais, au dernier moment, elle fit volte-face, et se jeta dans les bras de son père, venant le serrer dans ses fins bras. Puis, elle fit comme si de rien n'était, et partit enfin, non sans avoir attrapé son sac auparavant. Jack la regarda repartir, le regard encore embué. Il était persuadé qu'elle avait compris, et que le poids du choc était trop lourd pour ses épaules. Il ne pouvait que la comprendre.
« Je t'aime Lune ! »
Mais la porte avait déjà claqué.
Lune se dirigeait, d'un pas décidé, vers la maison de sa meilleure amie. Elle avait besoin de lui parler, de pleurer dans ses bras, peut-être, aussi. « Quelle putain de journée de merde. Quel putain de soleil de merde. Comment est-ce qu'il ose briller aujourd'hui ? Pourquoi est-ce que le monde ne s'est pas déjà arrêté de tourner ? Est-ce que ma mort va n'être qu'une mort de plus sans que personne ne réagisse.. ? »
La jeune femme n'avait jamais vraiment pensé à la mort, elle s'était posée des questions sur l'au delà, mais jamais aucune concernant l'après sur terre. Comment cela se passerait-il ? Y aurait-il une sorte de révolte contre la mort ? Des protestations géantes, et une grève totale, pour signifier à la mort que, cette fois-ci, elle en avait trop fait ? Elle eut un rire idiot, se rendant compte d'à quel point ce qu'elle se racontait n'avait aucun sens.
Mais une nouvelle fois, son rire s'évanouit, en sentant le poids du regard sur elle. Ici, en temps que fille de la maire, tout le monde la connaissait. Et tous les regards désolés qui se posaient sur elle lui donnait envie de se faire minuscule, afin de pouvoir se cacher sous un trou, et de ne jamais en sortir. Elle ne put s'empêcher de penser que dans 24 heures, ces regards là ne seraient plus, mais même son délicieux cynisme ne pouvait pas faire de miracle aujourd'hui.
Elle aurait voulu goûter à tous les plaisirs de la vie, toutes les choses qu'elle s'était interdites, pour ne pas mourir trop jeune, justement. Mais quelle ironie, et quel échec était sa vie. Elle soupira, et passa sa main dans ses cheveux, pour tenter de se redonner un peu de contenance, puis toqua à la porte de sa meilleure amie. Plongée dans ses pensées, elle avait marché sans s'en rendre compte. « Et si je mourrais comme ça, par inadvertance, en glissant sur une peau de banane, sans comprendre ce qu'il m'arrive ? »
Elle n'eut pas le temps de réfléchir à cette idée que, déjà, la porte s'ouvrait en grand sur une Asahi en larmes, qui lui sautait dans les bras. Elle la serra fort, si fort dans ses bras, son corps fin tremblant contre le sien, que Lune eut l'impression d'être déjà morte.
« Non, ce n'est pas moi, ça. Rendre les gens autour de moi triste, ça ne me corresponds vraiment pas. Et si le jour de ma mort devenait un jour heureux ? Et si je faisais le bonheur autour de moi ? »
Lune attrapa le visage d'Asahi entre ses mains, et embrassa tendrement chacune de ses joues, puis essuya ses larmes de ses yeux. Elle attrapa sa main, et elles se dirigèrent toutes deux vers la chambre de la jolie nipponne. La chambre était beaucoup moins colorée que celle de Lune, mais était à l'image de sa propriétaire. En effet, la jolie asiatique était un cliché gothique à elle tout seule. Elle portait presque toujours des jupes courtes, et noires, ainsi que des collants lacés de différents motifs. Tous les jours, elle soulignait d'une touche de maquillage noir ses fines lèvres, ainsi que ses yeux vert en amande.
L'une de ses seules touches de couleur quotidienne était le doré de ses lunettes rondes. Une touche de vie dans cet océan de tristesse.
« -Asahi, est-ce que tu as un rêve ? Si tu pouvais réaliser une chose, qu'est ce que ce serait ? »
Il fallut quelques secondes de réflexion à la plus jeune, les yeux levés vers le plafond, et sa bouche formant un « O » parfait.
« -Eh bien.. Je dirais.. Aller assister à un défilé de mode de créateur. Ne te moque pas, je sais, c'est débile.. Mais c'est mon rêve. »
Un sourire apparut lentement sur le visage de Lune, qui n'eut besoin que d'une fraction de seconde pour réfléchir.
«Tu devrais t'habiller. La capitale ne va pas nous attendre éternellement. »
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As Blue As The Moon
Teen FictionChaque matin, au réveil, la plupart des gens regardent les photos de leur famille et amis. S'ils aperçoivent une petite lumière au dessus de leur tête, cela ne signifie qu'une chose : cette personne va mourir dans la journée. En se regardant soi-mê...