Subject 10

CHAPITRE 1 : JAKE, SAN FRANCISCO :

Ilsavait qu'il était différent. Il l'avait toujours su à vrai dire mais au point que des hommes en noir le suivent, là, ça relevait plutôt du fantasme. Pourtant rien n'était plus sûr que ces deux hommes le suivaient. C'était le troisième détour que Jake prenait et ils étaient toujours là. Il ignorait ce qu'ils voulaient et il s'en portait mieux ainsi. Mais une inquiétante odeur de danger flottait dans l'air et Jake n'aimait pas ça.

Il n'avait pas peur. Non, il état juste agacé de ne pas avoir un moment de solitude. Et, en fait, la peur était quelque chose qu'il n'avait jamais ressentit que comme un sursaut du cœur.

Il bifurqua à 90 degrés dans une rue déserte. Il entendit les pas derrière lui accélérer. Son esprit s'activait rapidement, ses yeux passaient d'un bâtiment à l'autre, d'un mouvement suspect à l'autre. Il se trouvait dans une rue adjacente à l'avenue principale. La lumière des lampadaires ne suffisait pas à éclairer totalement l'allée. La noirceur étouffait le décor, accompagnée d'une brume surnaturelle. Ça ne le gênait pas. Après tout, et il en avait la confirmation maintenant, il était différent, non ?

Une échappatoire se présenta soudainement devant ses yeux. Un immeuble de bureaux aux portes ouvertes, recrachant les derniers salariés. La réceptionniste manquait à l'appel. L'ombre d'un sourire passa sur les lèvres de Jake. Un plan se distinguait des milliards de pensées qui encombraient son esprit.

Arrivé à la hauteur des portes, il s'engouffra soudainement dans l'immeuble. Comme il pensait, les deux hommes, surpris, s'arrêtèrent avant de le suivre. Un ascenseur, au fond du hall, ferma ses portessur deux femmes, visiblement trop prises par leur conversation pour s'intéresser au garçon. Jake poussa la porte des escaliers et commença à monter les escaliers quatre à quatre. La porte n'eut pas le temps de se refermer, ses deux poursuivants arrivèrent encourant. Les sept étages faisaient quinze marches chacun et la trente-cinquième marche venait de se détacher de sa semelle. Jake avait un plan très précis et chaque seconde comptait. Bientôt, la porte reliant la cage d'escalier au toit se découpa dans l'obscurité. Jake pris la chaise du gardien posée à côté et se jeta contre la porte, bloquant la poignée avec le dossier. Des coups retentirent derrière l'entrée condamnée. Le toit était une immense esplanade d'environ deux cents vingt mètres carrés. En un temps record, ses jambes le portèrent de l'autre côté du parvis. Un craquement sonore lui annonça que ceux qui le traquaient en avait fini avec la porte.

Il se retourna vers les deux individus. Un demi sourire s'étendit sur ses lèvres. L'impertinence se montrait petit à petit sur son visage. Le vent faisait voler ses cheveux. Il sentait le vide derrière lui. Les voitures passaient en bas. Il recula d'un pas. Son talon heurta la marche du toit. Le premier homme s'avança vers lui.Il souriait mais ses pupilles étaient dilatées. Jake les observa un instant. Il monta sur le rebord. Le vide lui caressait les chevilles. Son blouson en cuir suivait le mouvement de ses cheveux. L'homme fit deux pas prudents dans sa direction. Jake sourit. Et il se laissa tomber dans le vide.