- Archie.

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Une semaine s'est écoulée depuis qu'Hannah est rentré dans mon rêve pour me caresser la joue. Je n'ai pas voulu lui demander si je rêvais ou si simplement c'était vraiment elle. Suite à la façon dont je l'ai repoussé,  j'ai préféré raser les murs et ne pas la calculer.

Nos rapports sont restés très bref, bonjour, au revoir et j'avais comme l'impression que ce n'était pas suffisant. Que j'avais besoin de plus. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive, en temps normal je n'ai pas l'habitude de ressentir quelque chose, une quelque émotion que ce soit. Mais là, c'est différent. J'ai l'impression que ce petit bout de femme prend peu à peu possession de mon être, qu'elle s'insinue tout doucement en moi pour que je ne puisse plus jamais m'en passer.

J'écarte mes pensées qui lui sont destinées et me concentre sur ce que je suis en train d'entendre à la télévision. Le journal du midi est en train d'annoncer une avancée plus que merveilleuse au niveau de la médecine. «  un jeune homme de 13 ans, aveugle depuis la naissance, retrouve enfin sa vue ».
C'était inespérée. Moi, je n'ai jamais pu avoir cette chance. Les médecins m'ont toujours dis que je ne retrouverai jamais la vue, pourquoi ce jeune homme a donc eu cette chance ? Parce qu'il est plus jeune ? Alors, selon la médecine, moi je ne mérite pas de voir ?
D'un coup une haine inconsiderable envers mon médecin me vient. Visiblement il n'a pas jugé bon de me parler de cette avancée.

Je ne la mérite donc pas ? Parce que j'ai toujours vécu dans le noir complet on ne peut pas m'aider à voir ne serait-ce qu'une silhouette ?
C'est une honte. On ne devrait pas choisir, qui doit voir ou qui ne doit pas voir.

J'aimerai tellement pouvoir me regarder dans un miroir, regarder le visage des personnes qui m'ont mis au monde. Et, le sien aussi, j'aimerai le voir.
A quoi ressemble t-elle ?
Peut être que si je retrouvai la vue je pourrai enfin me laisser aller avec elle. Je n'aurai plus l'impression d'être un empoté qui ne peut rien lui apporter mis à part du travail en plus. Je pourrai enfin apercevoir le visage de celle qui hante mes pensées depuis son entrée dans cette foutue chambre d'hôpital.

J'essaie de ne plus penser à elle et de me changer les idées. Je prends donc un livre écris en braille. J'ai appris à le lire dès mon plus jeune âge.
En revanche, je n'ai jamais voulu aller dans une école pour aveugle ou pour enfants handicapés. Cela m'aurait fait un peu plus sentir mon handicap, même s'ils auraient tous été comme moi. Je n'ai pas voulu non plus me rendre dans une école public, j'aurai été l'handicapé de la classe et je ne me sentais pas capable d'affronter ça. Dans quelque école que ce soit je ne me serait jamais senti à ma place, c'est pour cela que j'ai toujours préféré la solitude. Mes parents ont pourtant essayé de me faire participé à des réunions, ou des gens comme moi y seraient présents mais seulement ça non plus ce n'était pas fait pour moi. Parler de mes problèmes ne m'intéresse pas, évoquer ma vie désastreuse non plus.

Parler de la vie que je n'ai jamais eue et celle que je n'aurai jamais.

Je suis condamnée à vivre dans le noir pour toujours, seul et malheureux. Et même avec toute la volonté du monde personne n'y pourra rien changer et c'est ce qu'il me dévaste le plus. Mon sort est clos et je ne peux rien y faire. Je me dois de juste d'accepter ma vie telle que le bon dieu me l'a donné.

J'arrête ma lecture aussi vite qu'elle a commencé mon livre sur la science ne m'intéresse pas aujourd'hui. Je n'ai pas la tête à ça. Ce foutue bout de femme hante mes pensées. Comment je vais bien pouvoir m'en débarrasser ?
Elle n'est pas faite pour moi et elle le sera jamais.
Comment faire comprendre ça à mon coeur ?
Tout me pousse à aller vers elle seulement ma raison me rattrape toujours. Je finirai par lui gâcher la vie, et personne ne mérite ça. Elle mérite quelqu'un qui voit la beauté de son visage ainsi que celle de son cœur. Elle mérite quelqu'un qui pourra lui faire faire le tour du monde et l'aimer aussi fort qu'elle le mérite. Elle mérite tout, sauf moi. Enfin, c'est moi qui ne l'a mérite pas et rien qu'à cette idée je sens mon coeur se serrer.

Depuis qu'elle est arrivée ici j'ai l'impression de ressentir des émotions autre que la haine et cela me fait peur. Malgré que je la repousse elle est toujours là derrière moi et je ne sais pas de quelle façon je dois le prendre. Peut être que c'est son métier qui veut ça ? Ou simplement le fait qu'elle en a envie ?
Je n'ai pas envie d'y penser. Je ne veux pas craquer, car c'est la chose qui arrivera si un jour elle m'en donne l'occasion. Je ne veux pas tomber dans ces filets, j'ai déjà assez de problèmes comme ça.

Parfois, j'ai l'impression d'être seulement une victime qui ne peut qu'accepter tout ce qu'elle subit. Je n'ai pas eu le droit de choisir d'obtenir mes cinq sens. Je n'ai pas pu me scolariser. Je ne connais pas mon visage, je ne sais pas à quoi je ressemble. Je n'ai jamais eu d'amis, ni de petite copine. Je ne connais pas ce qu'est vraiment la vie. Marcher dans le noir sans savoir ou l'on va n'est pas une vie. Avoir, une infirmière pour nous assister toute la journée n'en est pas une non plus. Vivre avec ses parents à mon âge car l'on ne peut pas vivre seul est frustrant. Ne pas pouvoir apprécier un paysage, ou une vue quelle qu'en soit sa nature est douloureux. Mais surtout, je ne connais pas l'amour mis à part celui de mes parents, et je n'en ai pas le droit non plus. Je ne sais pas comment on embrasse une fille, ni comment on lui fait l'amour. Je ne connais rien mis à part l'inconnu.
Et c'est l'une de mes plus grandes souffrance.

Le cœur lourd je m'en vais vers mon piano d'une lenteur qui reflète ma souffrance. Je m'assois sur mon tabouret et dépose mes doigts délicatement dessus. Je ne joue rien de spécialement, seulement une mélodie triste et lugubre qui pourrait faire ressentir à n'importe qui tout ce que j'éprouve en ce moment.

Désarroi. Haine. Tristesse. Lassitude. Incompréhensions. Et surtout pour la première fois...une petite pointe d'amour.

Les yeux de l'espoir Où les histoires vivent. Découvrez maintenant