Un samedi, Jérôme me proposa une soirée en boîte de nuit avec ses amies. Après une réponse négative, il réussit à me convaincre.
Nous attendions dans la file devant la discothèque. Les prémisses des vacances scolaires se ressentaient au regard de l'affluence sur le front de mer ce soir-là. Les jeunes profitaient de cette coupure dans le calendrier pour se détendre. Le boulevard était animé. Certains circulaient en poussant le volume de leurs autoradios. Ils espéraient capter l'attention des filles disséminées le long de l'axe.
Autour de nous, les gens discutaient et riaient à haut débit, les cigarettes s'enchaînaient. En retrait du groupe, j'observais les charmantes amies de Jérôme. Hélène, Doris et Béatrice, vêtus de belles tenues. Comme à son habitude, le garçon ne manqua pas l'occasion de complimenter les belles demoiselles. Puis, Béatrice s'approcha de moi. Elle portait une longue robe pourpre qui moulait sa silhouette.
— Tu n'es pas bavard Chris. Pourquoi restes-tu à l'écart ? m'interrogea-t-elle, tout en réajustant son habillement.
— Je ne voulais pas interrompre mon camarade dans ses déclarations élogieuses vis-à-vis de vous.
Elle sourit.
— Il se comporte ainsi avec toutes les filles. Tu traînes souvent avec lui, je ne pense pas que son attitude te surprenne.
— Son discours paraît sincère, accordons-le le bénéfice du doute.
Je connaissais Jérôme depuis la 5e. Un dragueur né qui ensorcelait les filles avec quelques phrases sans le moindre effort. Moi, j'étais le coincé. D'un naturel timide et réservé, je n'osais guère effectuer le premier pas lorsqu'une fille me plaisait. Intrigué par notre conversation, l'intéressé vint s'immiscer dans celle-ci.
— Tu es d'attaque ce soir Chris, insinua-t-il d'un air coquin. Séduire la belle Béa, enfin tu te bouges pour te trouver une copine.
— Laisse-le tranquille Jérôme. Tout le monde n'a pas la même assurance que toi. Au contraire, un garçon timide c'est si mignon, affirma-t-elle, accompagnée d'un clin d'œil à mon encontre.
Je rougis et fuis son regard. L'aspect crasseux du goudron me sembla plus rassurant que ses pupilles émeraude. Ce fut le premier compliment d'une personne de sexe opposé. Un homme d'un certain âge jeta son mégot à quelques pas de mes chaussures. Des étincelles se dispersèrent au contact du bitume. Il l'éteignit avec sa semelle en poussant un soupir prolongé qui m'extirpa de ma bulle. Je relevais la tête vers Béatrice et Jérôme. Ils conversaient sur l'amour et le rapport entre l'homme et la femme. Hélène et Doris les écoutaient et riaient de temps à autre.
De mon côté, je n'avais pas le cœur à cela. Je préférais observer autour de moi. Des couples s'embrassaient, des garçons en charmante compagnie, un groupe de femmes venues fêter l'enterrement de vie de jeune fille d'une de leurs amies. Certains jeunes hommes possédaient un style vestimentaire enviable. Je me sentis ridicule avec ma chemise boutonnée jusqu'au cou, mon pantalon noir tout neuf et mes chaussures lustrées.
Nous avancions à petits pas et l'attente devenait de plus en plus oppressante dans cet essaim humain. Je tournais la tête afin de constater la longueur de la file. Mon cœur fut électrisé. Elle était présente, devant mes yeux, ravissante comme à ce moment-là. Mon regard se figea dans sa direction. Ce souvenir remonta en surface. Cet après-midi où je l'ai aperçu pour la première fois. Seul sous un kiosque de la faculté, j'observais les étudiants. Puis, elle entra dans mon champ de vision. J'eus le coup de foudre. Peu de personnes croient à cette stupidité, ce fut mon cas jusqu'au jour où je fus foudroyé. Depuis, chacune de mes pensées profondes lui était destinée. L'occasion de lui dévoiler mon intérêt se présenta à de multiples reprises, mais le courage me manqua.
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Une leçon de vie sentimentale
Short StoryLors d'une soirée, Chris a l'opportunité de confesser son intérêt à la belle dont il est épris. Toutefois, un événement entravera ses plans...