Chapitre 1 - Pensée

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Ce matin là avait commencé comme tous les autres jours de vacances. Garance s'était levée, avait pris son petit-déjeuner, puis avait joué un peu avec son jeu favori, le Mastermind en compagnie de son voisin, Adrien, qui passait presque tout son temps chez elle. Oui, c'était un jour ordinaire, jusqu'à l'heure du déjeuner. 

Après le repas, quand Adrien fut retourné chez lui pour la sieste que lui imposaient ses parents, la famille de Garance avait pris l'habitude d'allumer la télévision, et de regarder le journal sur la première chaîne, pour suivre les actualités du monde. Garance avait pour consigne de rester dans le couloir jusqu'à ce qu'on l'appelle, afin que ses parents puissent vérifier qu'il n'y avait rien de choquant pour une petite fille de sept ans dans le sommaire du jour.

"Garance, tu peux venir !" l'appela sa mère depuis le salon.

Garance se dépêcha de rejoindre le canapé de sa pièce favorite de la maison, et se blottit tout contre sa mère, comme à son habitude. Sauf que, habituellement, sa mère la soulevait, la prenait sur ses genoux, afin de la câliner un peu. Ce qu'elle ne fit pas aujourd'hui. Garance leva alors la tête pour croiser le regard de sa mère, afin de comprendre ce qui n'allait pas.

Ce qu'elle vit la remplit de tristesse. Sa mère était en train de pleurer, un mouchoir sous ses beaux yeux bleus. Avant même qu'elle puisse lui demander ce qui n'allait pas, sa mère lui fit le signe de se taire, et d'écouter la télévision.

"... a été retrouvé mort chez lui, dans sa résidence secondaire, en bordure de la Méditerranée. Les circonstances du drame sont encore floues... attroupement d'admirateurs s'est formé dans la plupart des rues de Paris, afin de lui rendre hommage... vague de tristesse envahit le pays...le Président de la République lui a rendu hommage il y a tout juste une heure..."

Garance savait tout juste lire, alors elle essaya de déchiffrer ce qui était marqué en bas de l'écran de la télévision. Elle lut qu'un monsieur quelque chose  était mort ce matin. Qui était-il, elle n'en avait aucune idée. Elle se dit juste que ça devait être quelqu'un de connu, pour qu'on médiatise sa mort de cette façon.

Elle trouva cela injuste, que quand quelqu'un de connu meure, on l'honore de cette manière, alors que quand le grand-père d'Adrien est mort, lui, on n'a jamais rien dit à la télévision. Cela la rendit triste.

Elle se leva du canapé, et courut vers sa chambre. Elle n'avait plus envie de regarder ce foutu journal télévisé. Elle avait envie d'écrire. Écrire, ça lui faisait du bien. Depuis qu'elle savait le faire, il y a à peu près un an, elle écrivait tous les jours : des petites histoires, qu'elle lisait ensuite à Adrien. Mais aujourd'hui, elle voulait écrire autre chose. Elle avait un message à faire passer, à travers ce qu'elle allait écrire. Elle sortit une feuille à carreaux et un stylo de son bureau rose, et commença à écrire.

Imaginons que le monde soit un jeu, où chaque personne habitant sur Terre est un morceau d'un immense puzzle, un puzzle de 7,5 milliards de pièces. Chaque pièce de ce puzzle est de couleur unie, et elles ont toutes la même taille. Pour toutes les personnes extrêmement célèbres, cette pièce est de couleur bleue. Pour toutes les personnes moyennement connues, leur pièce est jaune. Et pour toutes les personnes du peuple, leur pièce est de couleur rose. Cette couleur domine le puzzle.

Ce puzzle est séparé en trois parties : à droite les pièces jaunes, au milieu les bleues, et à gauche les roses.

Une personne qui ouvre pour la première fois la boîte de ce puzzle géant, va commencer par trier les pièces en fonction de leur couleur. Cette personne sera très contente quand elle trouvera une pièce de couleur jaune car elles sont rares dans toutes ses pièces minuscules. Il sera encore plus heureux lorsqu'il découvrira les très rares pièces bleues, mais il sera indifférent aux morceaux roses car il y en a beaucoup.

Seulement, quand au bout de nombreuses heures de recherche, il aura assemblé toutes les pièces, et s'il se rend compte qu'il en manque une, il aura la même tristesse, quelque pièce que ce soit, car toutes les pièces de ce puzzle ont la même taille, comme toutes les personnes de ce monde dans la même importance.

Garance.





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