Mia M-10

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J'écoute les dernières notes de la musique et je me remets à respirer. Cette musique a le don de me mettre les larmes aux yeux et je dois me concentrer pour ne pas éclater en sanglots. La musique terminée, la playlist enchaîne sur une chanson de BigFlo et Oli, Je suis. Génial. Cette playlist veut absolument me faire pleurer ou quoi ?

Je la laisse tourner malgré tout et je l'écoute sans rien dire. Erwan aussi. Mais à la fin de la chanson, il se tourne vers moi et d'un geste très doux, il essuie les larmes de mes joues. Il me lance un regard interrogateur et je lui explique :

- Cette chanson me fait toujours pleurer et je ne peux pas m'empêcher de chialer comme un bébé. Je ne sais pas si c'est grâce à la musique ou alors avec les paroles tellement émouvantes mais je chiale...

Erwan me regarde et sourit.

- J'ai failli pleurer moi aussi, si tu veux tout savoir...
- Sérieux ! Un mec costaud comme toi tu allais pleurer ?!

Vexé, il se retourne face à la route et grommelle qu'il ne me parlera plus.

- Je plaisante, je lui dit. De toute façon, je n'ai jamais compris pourquoi les mecs n'avaient pas le droit de pleurer. Je trouve ça mignon un homme qui pleure. Cela prouve qu'il a un coeur et qu'il sait avouer ses faiblesses. Qu'il a assez confiance pour se les avouer à lui-même...

Il me fixe et éclate de rire.

- Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ?
- C'est trop marrant de te voir sérieuse ! rit-il en se pliant en deux.

Et là c'est moi qui me mets à bouder. Comme si je n'étais pas sérieuse... Je prends mon sac à dos posé à mes pieds et sors un carnet de dessin. Je prends le crayon au fond de mon sac et je me mets à dessiner ce que je vois. Le banc en face, la rue, les arbres qui la bordent, les maisons alentours. Et au premier plan, le profil d'Erwan. Je galère sur ça et je gomme plusieurs fois avec des regards en coin à mon modèle. Lui aussi me regarde mais dès qu'il a vu que je le dessinait, il ne bouge plus. C'est qu'il est intelligent le petit !

Plusieurs minutes de galère intensive après, j'entends un bruit de frein. Le bus numéro 45 arrive et c'est notre bus. Erwan se lève, fait un geste au chauffeur tandis que je range précipitamment mes affaires. En fermant la fermeture éclair, je monte dans le bus avant Erwan et on s'assoit à côté comme si c'était naturel.

Il se tourne vers moi et me dis dans un sourire un peu triste.

- J'ai été content de te connaître.
- Moi aussi ! Mais je ne vois pas pourquoi tu es triste ! On va se revoir !
- Je peux avoir ton numéro ? Pour se parler...
- Bien sûr !

Je lui donne et quelques secondes après je reçois un SMS. Je ne prends pas la peine de le regarder, je sais que c'est Erwan. Le trajet continue dans les éclats de rire quand on se remémore les trucs débiles qu'on a fait et quand on se raconte notre vie. Le bus s'arrête soudain dans un crissement de pneus et de freins et je me rends compte que c'est mon arrêt. J'attrape mon sac, je dis au revoir à Erwan d'un geste et je cours dans la travée pour sortir à temps. Je manque de bousculer une vieille dame et je m'excuse avant de courir vers l'hôpital.

Comme prévu, je me fais engueuler par ma mère et en conduisant sur le chemin du retour, je n'arrête pas de penser à Erwan qui doit être en train de rentrer chez lui, un paquet de clopes pour son père à la main.

En arrivant chez moi, je verrouille la voiture et je sens dans ma poche mon portable qui vibre. Je le regarde et lis les deux SMS qui s'y trouvent.

De : Inconnu
C'est Erwan qui n'est pas mystérieux ni viril !

Je souris puis regarde le suivant.

De : Inconnu
Hey ! J'espère qu'on ne va pas se perdre de vue... J'ai beaucoup apprécié notre amitié d'un arrêt de bus... Tu veux aller au cinéma un de ces quatre ? On prendra le bus !
Erwan

Je souris de nouveau et m'empresse de taper une réponse positive avant de changer le nom du contact en "Erwan".

Je lève les yeux vers le ciel et souris à pleines dents. Des milliers de gouttes d'eau descendaient vers la terre en silence. J'entends ma mère m'appeler et me dire que je vais prendre froid.
Petit à petit je rentre et avant de fermer la porte, je ne peux m'empêcher de penser que la pluie m'a fait un ami aujourd'hui.

J'attendais sous la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant