Chapitre 1

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Le ciel est gris ce matin, un gris de plomb. Il ne pleut pas encore, mais cela ne va pas tarder, je le sais. Avec le temps j'ai appris à connaître les différents types des nuages, savoir quand une tempête allait arriver ou quand le soleil allait faire des ravages. Je sors de chez moi très rarement, maximum 5 fois par an, fois peut être moins. Si je regarde par la fenêtre, ce n'est pas pour admirer le décor déplorable de chez moi. Non, ça ne sert à rien de contempler le grand jardin dans lequel se trouve la petite voiture de ma sœur, Ophelia. Si je regarde par la fenêtre, c'est surtout pour m'assurer qu'elle part bien au lycée. Ce matin elle portait l'uniforme noire, composée d'une chemise blanche, cravate et jupe qu'elle avait rétrécit de 5 cm. Elle la détestait complètement car, soit disant "on ne peut pas exprimer son vrai soi". La seule solution qu'elle avait c'était de mettre quelques accessoires et des chaussures différents. Ce matin elle avait décidé de mettre une paire de baskets qui avaient coûté un bras, chose que je trouve extrêmement débile.

Avant de monter dans sa voiture elle s'est tourné une dernière fois vers moi. Elle m'a sortit le genre de sourire qui ferait fondre n'importe qui, un sourire innocent qui essaye de me rassurer en me disant "tout va bien, tu es comme n'importe quelle autre personne". J'ai essayé de lui sourire aussi, c'est peut être la seule personne pour laquelle je ressens quelque chose. Chaque jour j'essaye de me repousser l'idée d'un faux sentiment envers elle. J'essaye de me convaincre que je ressens quelque chose.

J'ai continué ma journée comme d'habitude. J'ai rangé la table de notre cuisine, j'ai remis la boite de céréales dans la placard, en m'assurant qu'elle était bien alignée avec les autres. J'ai pris ma douche et ensuite j'ai foncé dans la bibliothèque, une assez grande chambre qui contenait 400 livres, 418 plus exactement. Depuis 1 an et demi ma sœur essaye de me ramener au moins un livre par jour quand elle rentre afin d'occuper mon cerveau malade. Cette pièce était avant une serre de fleurs, ma mère s'en occupait avant qu'elle nous laisse, Ophelia et moi, derrière. Comme si on n'était qu'une partie de sa vie qu'elle avait décidé d'effacer du jour au lendemain sans aucune explication. Ça faisait maintenant 4 ans depuis quand elle est partie. Je m'en rappelle toujours ce jour, il faisait chaud, une chaleur suffocante qui exprimait bien, voir peut être trop bien le sentiment que ma sœur arrivait à sentir. J'avais presque ressenti quelque chose aussi. De l'inquiétude, oui. Peut être un peu de regret. Jamais de la tristesse. Le premier jour on s'était pas fait trop de soucis, on pensait que notre mère était partie quelque part, peut être prendre le thé avec ses amies. Après une semaine on avait compris et on a fait face à la réalité, notre chère mère était partie et elle allait pas revenir. Je voulais même sortir la chercher, qui allait s'occuper de ma sœur? On avait toutes les deux 14 ans mais Ophelia comportait plus de besoins que moi: payer les taxes pour son école privée, faire à manger, de l'aide pour ses devoirs, acheter ses habits. Apparemment maman avait réfléchi à tout ça. Elle nous a laissé une grosse partie de son argent, assez pour compenser son absence. J'ai appris à m'occuper d'Ophelia. J'ai appris à reconnaître ses sentiments, à lui faire à manger, à l'aider par rapport à ses histoires d'adolescente ordinaire. J'ai même appris à faire un effort, essayer de ressentir quelque chose, de me mettre un masque sur le visage tous les jours afin de lui donner l'impression de vivre une vie normale. On n'en parle pas souvent de ce que j'ai dans ma tête. Plusieurs fois j'ai voulu quitter cette maison et m'en aller loin. Pour quoi faire au final? Rien ne m'intéresse, sauf cet étrange événement qu'on appelle "la mort". Comment pouvons nous, des simples animaux avec un cerveau un peu plus complexe que les primates, prendre la vie de quelque chose, voir quelqu'un sans ressentir aucun remord? Rester 9 mois dans le corps de quelqu'un, ensuite ressentir l'air, le soleil sur notre visage, voir des couleurs, des formes et entendre des sons pour ensuite perdre sa vie et se retrouver 2 mètres sous la terre. On a le pouvoir suprême, donner ou prendre la vie.

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⏰ Last updated: Mar 25, 2018 ⏰

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