Cuisses de poulet et murs jaunes pisses

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Arth est allongé sur son lit, une main au chaud dans son caleçon et l'autre sur la télécommande. Il mate un programme merdique sur la télé accrochée au mur jaunâtre d'en face. Mais il semble pas vraiment inspiré par la préparation d'ce poulet aux olives, il a l'air de r'garder dans l'vide. Il semble mort allongé comme ça, dans c'lit d'hôpital à la con.

Même pas un regard, même pas un son, c'est à se demander s'il a remarqué que j'suis bien là, à l'encadrement d'la porte d'sa putain d'chambre piteuse.

-Arthur...

Il cligne des yeux, il m'a entendu et son regard s'animent enfin mais il m'accorde pas pour autant d'oeillade. C'trou d'balle va m'entendre j'vous l'jure!

-Putain Arth qu'est-ce tu fous?

Et même vous m'ssieur, vous lisez c'fichu "journal intime", vous êtes mon psy et vous croyez à un roman d'amour à la con ou j'sais pas quoi... mais j'peux vous dire qu'à c'moment là y'avait plus d'amour, y'avais plus rien. Je n'avais rien. Alors oui, Arth m'ignorait, j'avais passé deux jours à chialer en l'maudissant et j'avais passé pas mal d'heures à l'chercher... mais j'avais qu'une envie, c'est d'retrouver cet amour qu'on avait au début d'mon putain d'journal.

Et j'crois qu'c'est pour ça que j'me suis allongé dans son lit d'merde. Il avait à son poignet l'bracelet d'enfant que j'lui avais offert, et en dessous y'avait l'truc qu'vous offre des femmes en blouses blanches, ce p'tit objet vous certifiant que tout ça n'était pas un rêve, vous avez bien passé un séjour à l'hôpital...

Cette merde pendait à son poignet pas loin d'mon cadeau et j'trouvais ça salop alors j'ai pris sa main et j'ai tenté de l'enlever. J'ai raté, c'truc est trop résistant...et j'ai jamais eu de gros biscotos...

Petit, maman disait que j'avais des bras d'poulet et ça m'faisais rire même si papa m'chuchotait "j'lui ai dit qu'elle a des cuisses de poulet, elle les a refermée pendant deux mois...". Mais j'comprenais pas ses remarques louches alors j'riais comme un con mais putain, deux mois sans plaisir c'est long! Maman a toujours eu une détermination hors du commun, elle était prête à tout pour avoir ce qu'elle voulait. Et j'crois bien que finalement papa lui a dit qu'il kiffait ses cuisses et j'ai eu l'droit à "maman m'laisse revoir ses cuisse mais t'en fais pas, t'auras pas d'petite soeur".

Papa était un con mais il avait compris que la vie était trop dure pour fonder une plus grande famille... J'men tapais pas mal, à dire vrai j'voulais un p'tit frère pas une p'tite soeur. Alors j'riais encore à ses blagues sans savoir qu'il disait ça parce qu'maman le laissait seulement mettre sa tête ou sa main... elle lui faisait encore la tête. Maman avait l'droit à du plaisir et papa aussi... mais sans maman. Maman pensait que c'était une belle solution, qu'il ramperait à ses pieds pour la supplier de s'faire pardonner... mais papa est seulement aller voir une autre dame.

Bref, papa était un con en manque de cuisses d'poulet.

Maman était une femme qui s'laissait pas faire.

Et leur couple était loin d'être parfait...

Laura, ma meilleure ami du début du collège venait chez moi. On faisait des devoirs maison, des redac et parfois elle m'laissais voir ses seins mais j'bandais pas. Jamais. Elle pensait que j'avais un "problème pénisulaire", moi j'pensais seulement que j'avais un "problème hétérosexuel"...

Cedric venait à la maison pour faire des devoirs maison, des redac et pour me montrer l'fond d'son caleçon. Ça laissait mon Imprudence à l'étroit.

Maman nous avait chopé entre deux exos d'français, en train de s'rouler une pelle (on s'y prenait mal...) et elle avait juste souris en m'faisant un clin d'oeil et en bougeant les lèvres histoire qu'Cedric n'comprenne pas..."j'le savais", qu'elle avait dit.

Mais putain maman, si tu savais qu'aujourd'hui j'suis dans un lit d'hôpital à côté d'Arth qui mate un mur jaune pisse, tu l'aurai pas dit c'te phrase. J'ten prie revient et aide-moi, j'suis seul sans toi...

CorvusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant