La porte claque derrière moi, les cris cessent soudain. Tout est calme ici, dehors tout semble si tranquille. La loi du paraître prends place dans ces rues pavées exprimant leur richesse. Je m'avance dans l'allée sinueuse qui se trace jusqu'au parking où prône cette basique et banale berline. Cette berline comme on en voit 5 entre ces 10 maisons, cette berline qui n'inspire ni luxure, ni misère. Un simple concentré de banalité.Je regarde une dernière fois cette maison, cette maison que j'adore autant que je déteste. Quelle prétentieuse je pouvais faire. J'avais tout, tout, et pourtant j'en restais insatisfaite. Je maudissais tout ce qui m'entourais, pourtant j'aimais aussi cette sécurité qui m'embaumait. Mes yeux dérivaient sur la porte. Bois, vitre, porte simple. Pourtant, une part de moi espérait que la banalité me rappelle, que ma mère ressorte de l'encadrement de celle-ci me priant de revenir. Quelle désireuse pitoyable je faisais.
Mes pieds martelaient le sol, mes baskets pourtant si peu originales arrivaient à émettre un bruit dans les rues si vides de la ville. Mon sac à dos faisait lui aussi du bruit, tout chez moi, ne serait-ce qu'une minime respiration rebondissait sur les murs et sonnait presque comme l'approche d'un concert détonnant. Comme ce moment où lorsqu'on s'approche de la salle et que la file se forme, on entends les dernières répétitions. Celles qui annoncent tout de l'incroyable bordel qui vas s'en suivre. Joyeux bordel je précise. Du moins, c'est comme ça que je le vois, ou du moins ce sont ces films incroyablement bateau qui m'ont enseigné cette vision du concert. Car pas de concerts, pas de festivals, à aucun de ceux ci j'ai déjà assisté dans ma vie. Triste jeunesse passée et finie.
Mes pieds se stop, presque instinctivement, sous cet abri bus. Derrière moi, les derniers échos de mes pas et déplacements résonnent toujours, c'était comme si je sentais déjà la rumeur de mon départ prendre puissance dans mon dos. Je quitte une petite ville, du moins disons plutôt moyenne, non grande ville. 100 000 habitants est-ce négligeable ? Bizarrement je ne pense pas. Disons plutôt, que ce que je quitte est mon petit quartier. Ce petit quartier excentré de la ville, là où vous finissez par connaître tout le monde, là où vous connaissez les autres de la crèche à la remise du bac. Je n'étais pas le cliché de la fille provinciale cherchant l'aventure en s'approchant de la capitale. Non, l'aventure je la désirais plus lointaine. Plus extravagante et capricieuse. Les Etats-Unis représentaient mon aventureux rêve, certes un brin prévisible, quelques peu sans originalité tant ce pays animait chaque esprit adolescent au moins une fois dans une vie, mais c'était seul le symbole qui m'appelait. Ce symbole qui m'emmenait hors des sentier battus, celui qui me faisait quitter le lycée avant la fin officiel de celui ci.
J'étais folle, folle de quitter ce pays sans aucun diplôme en poche, avec si peu d'argent, un argent qui encore une fois n'est même pas mien, juste un billet d'avion et de quoi payer 2 mois de loyer et de quoi manger. Quitter mon sentier battu, je voulais juste.J'attendais le bus, non pas seule, puisque d'autres se tenaient à mes côtés. Comme moi d'autres étaient dans l'attente de celui qui allait les amener à l'aéroport. Pas le petit aéroport, non celui qui vous ouvrait les voies du monde. Cette ouverture, aussi enivrante soit-elle, avait un prix : 6 heures de bus piégés entre des voyageurs bloqués sur leur siège depuis parfois plus longtemps. Mais je ne pouvais me plaindre, le train était trop cher, les uniques solution étaient le co-voiturage ou le bus et j'étais timide, si froide, si peu avenante, et si vite claustrophobe de la présence des gens. C'est un peu étrange, et pourtant c'était l'expression de ma timidité. Ces longues heures de route, bloqués avec des gens que je ne connaissais pas s'annonçait d'être long.
Une personne m'interpella, non pas volontairement de sa part qu'elle aurait émis par un geste, une phrase ou rien qu'un petit son. Non, c'était juste sa familiarité qui m'appelait. Je le connaissais, du moins, je savais qui il était. Il devait avoir un ou deux ans de plus que moi, enfin non, je savais qu'il avait deux ans de plus que moi. Je savais avec qui, il était sorti en CP et même en CM1 quelque années plus tard, qu'il était le grand perturbateur du collège lorsqu'il y était. La seule chose que je ne savais pas, ou plus de sa vie était ce qu'il était devenu, il avait quitter le collège sans suivre le lycée qui lui semblait pourtant prédestiné. Ce n'était pas une question d'orientation, non, car notre lycée offrait presque chaque bac possible, du moins chaque bac qui valait quelque chose dans ce monde d'apparence où la réussite prime sur la volonté. Mon frère disait qu'il n'était pas très fréquentable, un peu trop agressif, trop caractériel, pas assez dans la norme. D'ailleurs, la rumeur disait qu'il avait été placé dans une sorte de prison pour jeunes, quelque chose loin d'ici, quelque chose qui ne se vérifiait pas pour notre petite ville périurbaine. Bizarrement, ils avaient tous tord. C'était la première fois que je le vérifiais.
Le bus arriva, ses freins crissèrent, ses pneus chauffèrent sur le sol, il me semblait un peu vieux, ou disons plutôt vieillissant. Je fus la deuxième personne à rentrée, la première fut Aaron, oui celui dont je connaissais presque toute l'existence, d'ailleurs il y avait sûrement plus de chose sur lui que de ma propre existence dans ma tête. Lorsqu'il monta, remarquant qu'il ne restait plus qu'une paire de places libres, remarquant qu'il tuait mon dernier espoir d'un voyage seule, sans voisins pour dérangements, il me chuchota :
- Ce n'était que la première, tu aura d'autres chances d'avoir cette place. Ah une prochaine fois donc.
Et il s'en alla, s'étalant alors sur ces deux places libres du fond. Peut-être pensait-il que ce voyage, je le ferais régulièrement, peut-être que lui aussi le faisait régulière ce voyage après tout ? Quoi que, qui chaque semaine voyageait entre aéroport internationale et simple ville de province, est un voyage qui, qui plus est, durait 6 heures ? Non, il était sûrement un peu trop chambreur. Comme son personnage construit par des messes basse voulait le dire.
Je me résigna à m'assoir à côté d'une personne déjà passagère bien intégrée de ce trajet.
- Je peux m'assoir ? Demandais-je à ce monsieur.
- Hum... Oui bien sûr.
Je me surpris à l'observer une fois mon corps stabilisé sur ce siège. Il devait avoir 25 ans, ou peut être 30 ans. Il portait un de ses t-shirt de groupes musicaux, ce genre de groupe que l'on retrouve souvent dans les festivals. Ces festivals qui expriment tout une jeunesse qui ne meure jamais. Pourtant, il semblait si stressé, sa jambe ne cessait de trembloter, ne cessait de souffrir de sortes de spasmes. Quelle honte, depuis quand regarder aussi fixement était il de bonne manière, me dirait ma mère. Non, fais le plutôt sournoisement, parle et invente me dirait implicitement et sournoisement ceux qui m'entourait.
Ma montre indiquait 11h50, bientôt 12h, une deuxième partie de journée, pourtant rien ne changera ma décision cette fois. Trop tard il est.
Un téléphone près du volant. Des paupières lourdes, une route familièrement sinueuse. Un incroyable sentiment de déjà vu. Puis le trou noir.
****
Bip... Bip... Mes paupières s'ouvrent. La nuit fut courte. Mon estomac n'est plus que sac de noeuds. L'affrontement avec mes parents est proche. Mon rêve ne fut pas un bon présage en plus de cela. Maintenant tout est réel.
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4 heures.
RandomOn dit que chaque jour est une rencontre ? Et si un jour était en réalité plusieurs rencontres ? On a tous à apprendre des autres, mais on a, aussi, tous des choses à leur apprendre. Il y a ce genre de moment bizarre dans la vie, ce moment que même...