Tout le monde se rappelle encore des sanglots, et de cette marre de sang pourpre se mêlant aux flocons de neiges qui se déposaient peu à peu sur l'ambiance funeste de la ville. De ce bruit suraigu qui résonna à travers la forêt, n'étant autre que le hurlement de Charlotte découvrant l'immense balafre qui sillonne le visage de sa sœur jumelle dormant au bord du lac dans son propre sang. Sur des pas un peu glissants au-dessus du givre, Jeremy Humphrey à ses côtés, se précipitant dans les bras de sa jeune sœur si fragile pour la retenir de s'effondrer devant la nouvelle tragédie à laquelle la famille allait devoir faire face. Le reste des habitants, immobilisés par le choque émotionnel, n'osent rien faire d'autre que de battre les cils en se demandant si tout cela n'était qu'un affreux cauchemar ou bien... l'épouvantable vérité qui révélait au grand jour l'existence jusque là ignorée d'un assassin en liberté.
Quand les premiers échos des sirènes de police s'entendit près de la rive et que les oiseaux se mirent à faire virevolter les feuilles d'arbre autour de la scène en fuyant, on pouvait déjà assister à l'image bouleversante qu'une mort aussi tragique et inattendue pouvait rejeter, mais alors cette affaire était encore loin... même très loin d'être résolue.
De raides silhouettes noires étaient tout ce qu'on pouvait apercevoir depuis l'entrée du cimetière, certaines étant celles des médias dévorant du regard le cercueil avec de grands yeux, ce qui mettait Charlotte hors de ses gonds. D'un autre côté se tenaient les proches de Meghan, aussi bien son entourage familial, des amis... et bien d'autres personnes qui ne la connaissaient véritablement pas plus que ça, assistant à son enterrement comme à un spectacle. Mais il s'agissait plutôt là de pièces de puzzle qui ne demandaient qu'à être assemblés les uns aux autres.
Graham s'avançait, sa dernière fille accrochée au bras, sa douce protégée. Charlotte se rangeait sur le côté, aussi figée qu'une figurine de cire, pour que son père puisse tenir un discours devant tout le monde. D'une main, elle replaçait une mèche de ses longs cheveux bruns derrière son oreille et baissait la tête. Graham s'avança quelque peu en levant les yeux aux ciel, certainement en reprochant quiconque pouvait s'y trouvait de sa perte. Il s'éclaircit la voix tandis qu'un voile gris assombrissait doucement le ciel au dessus d'eux. Alors qu'il s'était déterminé à prendre la parole, c'est son fils Jeremy qui prit finalement les rênes à partir de ce moment là et donna un discours. Le jeune homme fit preuve d'une immense bravoure devant cette foule qui ne les lâchait tout simplement plus du regard depuis qu'ils étaient arrivés.
« Si Meghan était avec nous, elle se pencherait sur mon oreille pour me dire Ô combien elle hait cette fête et à quelle point elle trouve affligeant de devoir s'habiller dans une tenue aussi sombre que le noir. C'était ma sœur, et ces adieux n'emporteront ni la douleur, ni la peine que nous procure sa perte, ... »
Pendant que la plupart des personnes présentes portaient une oreille attentive et compatissante, les amis de la jeune fille se dévisageaient à tour de rôle sous le regard interrogateur du professeur Briard. L'expert en biologie se força à revenir au présent quand apparu de nul part devant lui Graham, chassant ses pensées qui risquaient de le perturber. Jamais ne se serait-il attendu à un tel abord de la part du futur maire, qui le regardait d'un air furieusement accusateur.
— Vous croyez que je n'ai pas remarqué votre petit manège ? Attaqua subitement Graham à la fin des obsèques en se retenant d'empoigner le bras du professeur.
— Pardon ? répliqua Briard en reculant légèrement le pas en arrière.
— Quel culot de vous pointer ici, Briard. La relation que vous entreteniez avec ma fille... dit-il en secouant la tête, ça me dégoûte. C'est la dernière fois que je vous aperçois dans les parages. Vous avez compris ? Je ne veux plus jamais vous revoir.Le sergent Carlyle les sépare avec un signe de tête envers Graham en s'approchant de lui dés lorsqu'il entend le ton hausser légèrement contre son ami, le laissant en seul-à-seul avec Briard. Les pouces enfermés de chaque côtés de sa ceinture, il soutenait au niveau de ses hanches son arme pendante dans un holster en cuir. Son nouvel uniforme épousait si bien sa silhouette et la couleur de son teint qu'il avait l'air d'avoir été cousu sur mesure.
— Tony, soupire t-il, tu t'es mis dans de beaux draps on dirait. On est amis depuis l'adolescence pas vrai ? Si t'as quoi que ce soit à voir avec cette affaire, il vaut mieux que tu m'en parles maintenant avant que ça ne dégénère.
— Où est-ce que tu veux en venir ? Demande t-il en laissant tomber ses bras le long de son corps, époussetant probablement par la même occasion son costume.
— Est-ce que t'avais une liaison avec la fille Humphrey ?
— Non! Bien sûr que non, réponds Briard en annonçant d'un pas vers l'opposé son départ. Il n'a jamais été question de... ça.
— OK. Tu sais que si les choses tournent mal je pourrais pas t'aider Tony. Ils vont t'interroger, dit-il en haussant quelque peu le ton de sa voix avant de soupirer et d'accélérer le pas derrière lui. En attendant, reste sur tes gardes... on dirait que Humphrey t'as vraiment dans son collimateur.Les deux hommes se réfugièrent chez Barbara's comme à leur plus vieilles habitudes. Toujours la même banquette, au fond du même restaurant, à la même place. Robert ne pu s'empêcher de noter le silence impassible de son ami, dont les grands yeux bleus projetaient dans le biais l'image d'une réflexion acharnée et continue dans laquelle il ré-imaginait des scènes de son passé. Ça lui arrivait si souvent de se perdre dans ses pensées de cette manière là, qu'à peu près tout ceux qu'il connaissait s'y étaient habitués avec le temps.
— Barbara! s'exclame Rob tout sourire en le sortant de sa rêverie.
— Hum, juste un verre d'eau pour moi.
— Un verre d'eau ? Sers nous plutôt deux de tes délicieux burgers ma belle. Et une bière pour moi, ajoute t-il avec un bref clin d'œil.
Barbara donna une tape sur l'épaule de Robert avec le bloc de papier qu'elle tenait entre ses mains avec un léger rire avant de disparaître au comptoir tandis que Tony déniait enfin esquisser l'ombre d'un sourire aux bords de ses lèvres avant que Robert ne se penche pour récupérer quelque chose sous la banquette. Celui-ci se releva aussitôt avec une cigarette entre les dents.
— C'est pas vrai, tu utilises encore cette cachette ? rit Tony.
— Bien sûr, si Lori apprend que je fume encore elle risque de me passer un sacré savon. Enfin bon, à mon retour j'veux que tu me racontes ce qui se passe dans ta petite tête d'accord ? Je sais bien que tu me caches quelque chose... je connais ce... regard.
— Je ne cache rien, rétorque t-il en secouant la tête... Robbie, ajoute t-il avant qu'il ne s'approche de la sortie, tu devrais en parler à Lori avant qu'elle ne le découvre.
— Je vais prendre l'air.
Alors que la silhouette de Robert part se fondre dans le paysage extérieur, Barbara revient avec une pinte de bière sur son plateau en observant par la vitrine le parking presque vide en face du restaurant, on aurait dit que les gens avaient déserté la ville depuis ce qui était arrivé à la jeune fille. Quand on a retrouvé son corps, tout le monde parlait naïvement d'un malheureux accident mais le soir même au commissariat de Dunhill, les preuves se mettaient en place pour désigner un premier suspect pour le supposé meurtre de Meghan Humphrey.
Cet après-midi là Chez Barbara, se déroula un spectacle des plus inattendu. Il fit tomber des mâchoires, et Tony en perdit instantanément la voix. Tandis que tout les clients et le personnel du restaurant s'approchait de la vitre pour apercevoir de plus près ce qu'il se passait, Tony lui, fronça les sourcils en se rendant sur le pas de la porte pour découvrir son meilleur ami s'enfoncer dans la Ford, les mains liées dans le dos.
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Before Dawn
Mystery / ThrillerUn journaliste en herbe revient dans sa ville natale pour déterrer les morceaux d'une affaire qui l'a bouleversée durant son adolescence, et dès lors que de nouveaux éléments apparaissent, le jeune homme fait appel à ses vieux amis pour l'aider à me...