Le bruit de ses talons retentissent dans le bâtiment pratiquement vide. Elle descend les escaliers rapidement, les mains dans les poches, la tête enfouie derrière son écharpe. Elle arpente le couloir qui mène à la sortie, courant presque pour atteindre la porte en verre. La fatigue pèse sur son corps et son esprit , elle a discuté banalités avec ses collègues, a sourit, fait bonne figure, comme tous les jours. Quand elle arrive dans la rue, le froid lui mord le visage alors elle enfonce un peu plus sa tête dans ses épaules. Son masque s'envole, elle redevient elle-même, pensant à lui. Elle se hait d'être comme ça, ce serait si bien si elle était capable de créer des liens, elle a longtemps essayé, longtemps échoué. La nuit noire la réconforte, personne ne la remarque, elle se faufile dans les rues jusque son domicile.
L'appartement est plongé dans la pénombre, seul un trait de lumière transperce la pièce à vivre à travers le rideau entrouvert. La ville est encore animée dehors malgré les températures hivernales, on entend le klaxon des voitures et la foule s'agiter dans la rue. Elle apprécie ce bruit constant, il la rassure, il l'empêche de sombrer. Mais elle sait très bien qu'une fois la nuit tombée, quand l'écho de la rue ne sera plus qu'un murmure, ses peurs la rattraperont. Et puis, il n'est pas là.
Elle se force à s'occuper l'esprit, à ne jamais rester ici sans rien faire, alors elle se fait un sandwich et le mange en regardant une vidéo sur YouTube, met la musique puis prends sa douche, lit un roman dans les draps propres de son lit. Puis, une fois que la fatigue s'empare de tous ses membres et que ses paupières se ferment toutes seules, elle se couche.
Ses volets sont restés ouverts, la lueur bleutée de la lune inonde la chambre qui sent la lessive, le silence est maître ici à présent. Pourtant, une respiration saccadée le trahit. Elle ne dort pas, assise dans son lit, le visage enfouie dans ses mains, haletante, elle se balance d'avant en arrière.
Ne pas craquer, ne pas craquer, ne pas craquer...
Elle marmonne entre ses dents, pensant à lui. Elle sait qu'elle ne doit pas céder mais tout son corps le demande. Elle s'y habitue de plus en plus, mais durant la journée des images passent devant ses yeux comme des flash back. Elle revit les moments avec lui, il la sert dans ses bras, il lui parle, il sourit. Elle sait pertinemment qu'il n'est pas toujours gentil avec elle, ses paroles ne sont pas toujours tendres. Elle sait aussi qu'il a brisé toute confiance en elle, il la détruit à petit feu mais le besoin de le voir encore ce soir est présent, elle veut de nouveau ressentir cette euphorie.
Alors elle se lève de son lit et se dirige vers sa table de nuit, ouvre le tiroir et sort un plastique transparent puis l'emmène dans la cuisine. Là, elle se sert un verre d'eau puis ouvre le petit sac. Il contient des petits carrés qui ressemble à du papier épais, une illustration colorée dessinée dessus. Ne s'y attardant pas, elle ne regarde même pas la forme et le met dans sa bouche. Le morceau se décompose rapidement sous sa langue, elle boit son verre d'eau et avale, honteuse d'avoir craqué, une fois de plus. Le canapé la trouve, elle y prend une position inconfortable et attend.
Perdant la notion du temps, une bouffée de chaleur la surprend alors que ses organes tremblent. Jamais elle ne s'y fera. Elle ferme les yeux un instant, se cachant dans l'obscurité, il viendra. Son pouls s'accélère, elle est prise de nausées mais en fait abstraction. Elle n'essaie même pas de bouger, sachant que son corps ne suivrait pas. Ses paupières sont lourdes, mais elle résiste.
Boum, boum, boum.
Les battements de son coeur déchirent sa poitrine. Elle a l'air d'un chat dans la nuit avec ses pupilles noires dilatées. Frissons, tremblements, nausées. Elle ne pensera plus à tout ça quand il sera là, il met toujours une bonne heure pour se montrer, le sommet de sa folie atteint. La pièce se renverse, tout est coloré.
Jaune, violet, vert, orange.
Elle croit l'entendre prononcer son nom, il arrive. Elle essaie de se redresser sur son assise, elle se sent légère, elle pourrait voler. Si elle ouvre la fenêtre, elle retrouve les oiseaux. Mais il est là, elle le cherche, les mains en avant, les jambes qui tremblent. C'est le seul moyen de le retrouver, il hante ses jours et ses nuits. Il n'est plus le même, elle est terrifiée quand elle le voit. Mais la tentation est toujours trop forte, elle a besoin d'échapper à son quotidien de solitude. Elle ne regrette rien. Elle veut ressentir quelque chose. L'amour, la terreur, l'humiliation, la douleur. Peu importe.
Il est sa drogue. Son démon.
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Sarah
RandomMa participation #1 au Défi Plume sur le thème Let's Rock'n Write ! Pour plus d'informations : https://twitter.com/DefiPlume