Michaella griffonnait frénétiquement sur son épais carnet de dessin. L'épais morceau abrupte de charbon s'écrasait contre le papier, crée des formes et de subtile nuance. Fronçant les sourcils, la jeune fille se trouva contrarier contre le deuxième œil de son personnage, n'arrivant jamais à le faire parfaitement ressembler à son jumeau. Saisissant sa gommes, et s'acharna contre le papier pour chasser les fines particules noires tachant sa feuille. Puis elle reprit, tirant sa langue comme si cela lui permettrait d'être plus talentueuse. Elle augmenta le volume de la musique déjà hurlante dans ses oreilles, mobilisant chaque cellule de son être. Elle arriverait à faire ce fichu deuxième œil ! Elle pourrait s'en briser les doigts qu'elle continuerait à s'acharnais furieusement contre cet œil. Elle n'abdiquerait pas ! A trop abandonner, la moitié de ses personnages était soit borgne, soit une mèche de cheveux leur cachait le visage, soit il faisait des clins d'œil, soit il avait un bandeau sur la tête.... Tous n'avaient qu'un œil.
Et ce détail était fâcheux pour la rousse.
- Tu dessines quoi ?
Une voix familière s'éleva à ses coté, alors qu'elle était si proche du papier que son nez en frôlait le grain de sa feuille. Sans même relever la tête, elle marmonna :
- Le cœur bleu. Tu m'as demandé de le dessiner.
Surprise, le jeune homme à ses coté ne put cependant pas réprimer son sourire. Sa poitrine se réchauffa immédiatement, prit d'un sentiment entier de tendresse et de bienêtre. Michaella était si naïf et insouciante que chacune de ses paroles l'emmenait un peu plus haut encore dans le ciel. Peu être qu'à force de l'écouter, il toucherait la lune ?
- Je peu voir à quoi il ressemble ? Demanda le jeune homme en se penchant sur la feuille
- Mais c'est pas finis euh ! La rousse aux yeux de la couleur du ciel colla le carnet contre sa poitrine, chassant ainsi efficacement le regard curieux.
- Oh allez, tes dessins te prennent toujours un temps fou ! Supplia son ami alors que le vent s'élevant de la colline faisait voler son fin foulard bleuté.
- Tu n'as qu'à t'amuser avec ta guitare alors ! Répliqua Michaella en lui tirant la langue.
Sur ces mots, elle se retourna, continuant de dessin, dos à son ami dans l'espoir de lui cacher son dessin. Mais dans cette position, Emmanuel aurait pu regarder aisément à quoi ressemblait le chef d'œuvre d'un simple coup d'œil.
Pourtant, il se contenta de sourire, et de saisir sa guitare. Il commença alors à chanter, et faire vibrer les cordes en cherchant quelques accords un peu au hasard. Il essayait de crée un rythme qui lui rappellerait à jamais la petite fille folle qui voyait des cœurs dans la poitrine des gens, et par-delà l'horizon. Celle qui s'échappait d'on ne sait où, toujours accompagnée de son loup blanc au yeux rouge, qui passait son temps à dessiner pour ne pas oublier. Cette fille à la crinière de feu dont les souvenirs flambait petit à petit et qui, sans cesse, devait être raviver. Combien de fois l'avait-elle oublié ? Peut-être trop sans doute.
Le soleil se coucha, crachant de noble rayon orangé sur la colline. C'est là que Michaella s'écria :
- J'ai terminé ! Tu peux arrêter de poser !
Emmanuel poussa un long soupir, posant sa guitare. Son amie avait toujours pour l'habitude de parler à des fantômes, au spectre de son imaginaire profond.
Elle lui tendu alors sa feuille, ou un fier lion se dressait, assis, regardant l'horizon.
Kara
