Segment Premier

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J'étais né avec deux alter, cela me rendait spécial pour beaucoup d'individus. Les héros me voulaient pour la plupart dans leurs escouades tandis que pour d'autres, je n'existais pas, je n'étais qu'une rumeur, un mythe, une légende qui effrayait la société. Un cas à part.

Depuis tout petit, je subissais l'intérêt d'un homme dont je n'avais jamais vu le visage ni même entendu la voix. Je savais juste que naître sans parents assurait l'envoi dans un orphelinat, et malheureusement pour moi, cette vieille femme ne me voyais que comme un jeu qu'elle pouvait vendre contre une importante somme d'argent.

Quelque année plus tard, je l'avais croisé roulant dans une voiture hors de prix... Grâce à moi je présume.

J'avais grandi avec Shigaraki. Tomura Shigaraki. Celui qui désintégrait tout ce qui lui plaisait d'un simple toucher.

D'après, le "père" l'avait recueilli de lui-même, sans envoyer je ne sais quel subordonné ou homme de main parcourir un orphelinat à la recherche de sa "proie" et d'y offrir un chèque à plusieurs zéros. Il l'avait trouvé dans la rue, seul apeuré et désorienté. Quelque part, je lui enviais d'avoir autant de liberté : il avait toujours eu le droit de mettre ses plans à exécution tandis que moi, je vivais à l'ombre des regards n'ayant que pour seul objectif de cultiver ma richesse technique.

Pour que mes alter fonctionnent à leurs maximum, j'avais le besoin vital d'ingurgiter le sang d'autres individus. Il me le fallait pour survivre. C'était naturellement, ce que le "père" avait exigé de Shigaraki "au cours des missions que tu exécuteras, n'oublie pas de ramener trois flacons de sang différents".

Seulement un bon nombre de fois, le "père" avait dû trouver un moyen de m'en procurer d'une autre manière puisque « mon aîné » semblait ne pas vouloir m'aider d'une quelconque manière.

Capricieux.

Il agissait comme si il était un héros. Comme si sa vision du monde pourrait changer celle d'autrui, que grâce à lui il n'y aurait plus que de vrai héros sur cette Terre. Il s'époumonait à dire qu'il ne pensait pas comme Stain mais j'étais persuadé que son intervention pendant les stages des lycéens l'avait marqué. Ses attaques avec ses Brainless - soit des créatures à son image - étaient passées inaperçus quand le "Ô Grand Maître Stain" fut défait et mourut après avoir sauvé un élève de sa réplique musclé en un claquement de doigt. C'est à peine si quelqu'un se souvenait encore d'avoir subit l'attaque des minis Shigaraki : les Brainless.

L'odeur du tabac froid et de l'alcool étaient des odeurs qu'on ne pouvait effacer malgré l'odeur encore plus nauséabonde du sang séché. Le bar baignait dans une ambiance crasseuse. Par habitude, j'étais visé sur une banquette au fond de la pièce avec un livre et je fus soudain frappé par une immense réalité.

Shigaraki avait pointé une arme sur deux nouvelles recrues qui en un claquement de doigts avaient réussis à immobiliser ce grand débile.

L'un deux étaient une jeune fille blonde à l'air un peu loufoque.

Bien qu'elle visait Shigaraki, ses yeux étaient pointés dans ma direction comme si je n'étais d'un coup plus aussi invisible que ça. L'autre, "la moitié d'face" comme s'autorisait mon esprit à y penser, ne bougeait pas mais me regardait d'une manière que je décrirait d'intense. Il avait choisit de tourner la tête au même moment où la jeune fille avait décidé de le faire. Ses agrafes avaient l'air de vouloir dire quelque chose tant la manière dont elles brillaient dans le noir me paraissait irréel.

Dans ce petit espace, je me sentais de plus en plus à l'étroit. Cet à ce moment que je me relevais en direction de la porte de sortie. J'évitais le regard de tous et les salua brièvement avant de disparaitre. 

Tandis que je marchais vers la pièce qui me servait de chambre, je m'amusais à jouer avec des plantes dont les feuilles se refermaient d'elles mêmes quand on les touchaient. Je ne savais pas pourquoi mais cela me rendait nostalgique, je regrettais quelque chose que je n'avais jamais vu ni même connu. Pourtant ce sentiment me rappelait que je n'étais pas totalement cette personne dénouée de sentiments et d'émotions « humaines ». J'étais au final juste moi. Une personne sans nom, mais une personne malgré tout. 

J'étais resté un bon moment à observer ses plantes attendant que ces dernières redéploient leurs feuilles avec élégance.

Arrivé devant la porte de ma chambre, je poussais celle-ci trouvant une silhouette assise sur mon lit. Ce n'était pas le première fois qu'un vilain s'infiltrait dans mes quartiers en espérant la plupart du temps quelque chose de moi. Je comprenais maintenant avec l'âge que les humains ne me voyait que comme un jouet qu'on peu utiliser. J'étais un jouet parmi la caisse de jouets que nos parents nous défendait de toucher.

- En quoi puis-je vous aider ?

Tandis que je posais mon livre sur ma commode, je sentais une main se poser sur ma nuque. Faute d'avoir un peu trop chercher les noises avec lui, j'avais rapidement compris qu'il s'agissait de mon « demi-frère ». Je soupirais tandis que je continuais de ranger mes affaires.

- Je n'aime pas la façon dont tu t'es fait remarqué... chuchotait-il au creux de mon oreille.

Malgré moi je ne pus cacher ma lassitude à l'entente de ses paroles. Je me redressais légèrement tout en me positionnant pour être face à lui.

- Je n'ai absolument rien fait. Ça arrive aux gens de tourner la tête de temps en temps.

Ses yeux s'ouvrirent comme si il venait de réaliser que son petit numéro était bien lamentable. Il relâcha sa poigne et j'en profitai pour m'asseoir sur mon lit en réouvrant le livre que je n'avais toujours pas terminé.

Le voyant toujours à la même place, je tentais de le faire partir :

- La sortie c'est par là...

Il me regarda avant de plonger ses yeux sur le parquet. Il semblait être ailleurs.

A peine m'étais-je aventuré sur les premières lignes de la page qu'il avait commencé à parler de nouveau.

- Qu'est-ce que tu penses de moi ?

Je levais les yeux et marqua ma page.

- Pardon ?

- C'est une question... spéciale, n'est-ce pas ?

Il m'adressait un sourire que je ne l'avais jamais vu arborer aussi naturellement. Un sourire presque humain. Pris au dépourvu, mes joues prirent une teinte de rouge qui picotaient de façon oppressante. Sa bipolarité était une chose que j'aimais particulièrement chez lui. Son aptitude à être agressif restait dominante mais les rares fois où il était doux me rendait heureux moi aussi. Je ressentais des émotions lorsqu'il était ainsi. J'étais transporté lorsque le cours d'un instant une connexion fraternelle se créait entre nous. 

Puis il vint s'asseoir sur mon lit. Posa sa tête de façon attachante sur mon épaule et laissa échapper une petite larme. Il s'endormit ainsi.

J'étais perdu tant ces facettes sombres pouvaient rapidement se fondre sous ce côté fragile et attachant qu'il avait. C'était propre au leader de ce club de vilain.

Shigaraki, are you mad ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant