Bonjour à tous,
En tant qu'amateur de mangas animés, j'ai découvert récemment à la suite d'une conversation, une nouvelle série intitulée Gambling School (Kakegurui en japonais, sortie en 2017) qui est devenue littéralement un véritable coup de cœur et dont j'ai hâte de vous faire part.
Gambling School ou l'école de jeux d'argent. L'intrigue se déroule dans l'enceinte d'une académie privée prestigieuse où évoluent tous les futurs héritiers des plus grosses fortunes du pays. Mais pour se distinguer dans cette école, au lieu d'exceller dans les études ou les prouesses physiques, c'est l'adresse aux jeux d'argent qui en est la condition absolue, ancrée dans le quotidien des étudiants, voilà la philosophie de cette académie Hyakkaou si particulière. Dès le début, une nouvelle élève mystérieuse nommée Yumeko Jabami intègre cette école et va rapidement s'imposer dans ce monde perverti.
Prestige, fortunes infinies, jeux démesurés, système de classes (voire de castes), pouvoir, manipulation, psychologie, philosophie, perversion, exubérance contrastante, la plupart des éléments qui m'attirent aux premiers abords dans une fiction y sont réunis.
Pourquoi avoir intégré les jeux d'argent comme unique activité extra scolaire et déterminante de la condition sociale des élèves ? Dans le but de préparer ces futurs dirigeants de sociétés et d'empires à user de stratégie et de risques dans un monde où tout est régi par l'argent et la loi du plus fort. C'est brillant et peu banal.
Toutefois, la limite serait d'obtenir de futurs diplômés implacables, enfermés dans leurs stratégies, imperméables aux considérations humaines qui pourrait leur jouer des tours sur le long terme.
Quoiqu'il en soit, cette série est très instructive quant aux jeux possibles et la façon dont les règles classiques sont détournées avec chaque étudiant rivalisant d'ingéniosité dans la tricherie pour tirer leur épingle du jeu. Mais ce qui est captivant c'est justement cette association avec le facteur chance qui, bien que faible à première vue, a sa part d'importance...
Et dans cette frénésie de paris insensés, Yumeko est là pour intensifier l'enjeu jusqu'à la démence, malgré une apparence sage qui abrite un être irrationnel au raisonnement d'une rare perspicacité, pour finalement se reposer sur le hasard.
Outre le fait que Yumeko soit une jeune fille mystérieuse totalement inconsciente, elle semble incarner le démon tentateur, telle une déesse enchanteresse, avec un sens de la justice déguisé. En effet, après avoir feint sa faiblesse, elle s'amuse à surprendre ses rivaux en flagrant délit de tricherie pour en fait posséder les armes nécessaires de les contraindre à parier aveuglément jusqu'à "la mort".
Cette parieuse compulsive n'est pas la seule à jouir au premier frisson du risque lorsqu'elle pousse ses adversaires à aller jusqu'à jouer des sommes colossales, la société de leurs aînés, et même leur propre vie toute entière... N'est-ce pas merveilleux lorsque les jeux prennent des proportions aussi inconcevables ? Parier du tangible à l'intangible ?...
Comme tout manga qui se respecte, celui-ci nous propose une hyperbole de notre société, doublée d'une réflexion poussée sur la nature humaine et sa condition. Dans cette fosse aux serpents, la manipulation, la malice et les mensonges constituent l'essence de cette existence, fondée sur un système de castes obéissant à la loi du plus fort, dans un dualisme entre force et faiblesse, maîtres et esclaves, paradis et enfer.
En effet, il faut préciser que ceux qui perdent et se retrouvent endettés dans l'incapacité de rembourser le conseil des élèves, sont réduits au statut d'animal domestique (pokipour les garçons et mikepour les filles) autrement dit des esclaves qui subissent toutes sortes d'humiliation par les humains, jusqu'à régularisation de la situation. Dans le cas contraire, si ce sont d'importants héritiers ou que leur famille est de notoriété publique, le conseil pourra faire pression ou y trouver son intérêt de diverses façons, sinon il soumettra le débiteur à l'exécution d'un planning de vie prédéfini, pour contrôler entièrement sa vie contre effacement de la dette.
Cependant, aucun élève n'est exempté du risque de se retrouver criblé de dettes et de devenir un esclave à son tour à tout moment. Ainsi, le plus fort peut devenir faible et vice versa. C'est en cela que ce système est intéressant et fascinant, bâti sur la loi de la nature et le hasard, miroir des principes mêmes de cette école; le poker réversible (contrairement au poker traditionnel où la main la plus forte est nécessairement la gagnante, les joueurs peuvent choisir laquelle de la main la plus forte ou la plus faible l'emporte...) imposé lors d'un tournoi public dans un épisode, en est la parfaite métaphore.
Au sommet de ce système dont elle en est la créatrice et la gardienne de part son génie et sa perception du monde, règne en souveraine la Présidente de l'institution suprême de cette académie : le Conseil des élèves, où chacun de ses membres jouit de ses privilèges.
De surcroît, dans tout jeu d'argent, le risque occupe évidemment une place prépondérante. L'intrigue le met particulièrement en valeur. Ancré dans l'existence, le risque est en soi partie intégrante de l'humain. Il faut risquer à plus ou moins grande échelle pour obtenir ce que l'on recherche. Au-delà de cette évidence, même s'il peut en être effrayé, le mortel en retire toujours une certaine complaisance grâce à cette adrénaline qu'il procure, et veut encore risquer repoussant les conséquences, soit pour le plaisir et ou tentation, soit par revanche et donc orgueil; on dit bien « jouer avec le feu » ou encore « tenter le diable » à maintes reprises. Ainsi, il n'est pas toujours nécessaire d'obtenir quelque chose lors d'un pari, on peut parier seulement pour la simple sensation du risque selon l'enjeu qui en dépend, Yumeko et la Présidente l'ont bien compris.
Quant aux personnages, on retiendra les principaux tels que Yumeko Jabami, Ryota Suzui, Mary Saotomé, Itsuki, et la Présidente. Les autres sont plutôt secondaires à part peut-être la petite fille qui siège au conseil. Tous ont une personnalité différente et aussi intéressants à analyser. Mary Saotomé, pour ne citer qu'elle, représente bien la reine déchue qui met tout en oeuvre et est prête à tout pour retrouver son statut d'antan et son libre arbitre; c'est amusant de voir son évolution au fil des épisodes.
Enfin, le style de ce manga est très réussi, des dessins réalistes avec une face visible innocente et une face cachée emplie de malice et d'hypocrisie, pour la plupart des visages des personnages, c'est très bien intégré. De plus, en même temps que la tentation, l'excès est exacerbé dans cette série, souvent sous la forme d'orgasmes implicites. Mais c'est si bien réalisé et en harmonie avec le cadre de la série, que ce n'est aucunement dérangeant ou choquant, bien au contraire, c'est jute une des manifestations de la perversion humaine.
Pour conclure, Gambling School est de loin l'un des meilleurs mangas à ma connaissance, si bien que je l'ai revu trois fois consécutives grâce à son petit format d'une seule saison, en attendant avec impatience la seconde saison prévue pour cette année...
J'ai même beaucoup de mal à l'intégrer dans mon classement; tout dépend sur quels critères on se base, mais je pense que je la placerais en troisième position, derrière Code Geass et Death Note et ex-aequo avec Black Butler et avant Tokyo Ghoul, ou bien en seconde position avec DN.
Terminons sur l'Opening, détail non négligeable pour un manga. D'une grande richesse, celui-ci témoigne une fois de plus de l'excellence de cette série qui nous happe dès la première note, et nous entraîne délicieusement dans les abysses du jeu infernal, au rythme de cette musique particulière que l'on n'oubliera pas de sitôt.
Cédric V.
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Gambling School ou la tentation ultime
RandomMon avis sur ce manga qui m'a beaucoup inspiré.