Savoir dire : "Je t'aime"

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« Tu voudrais quoi ? Que je te dise que je t'aime Harry ? Que je te crache à la figure tous les mots dans ma tête ? Je peux pas Harry. Je peux pas parce que ce n'est pas moi. Pas moi du tout. »

Je pense que tout s'est joué à cet instant parce que j'aurais pu dire que : « c'est pas grave je comprends » qu'après tout : « c'est juste des mots ». Mais dans l'immobilité de la poussière et dans la beauté du soleil j'ai compris que je ne pouvais pas. Que je ne pouvais pas ne pas entendre. Bien sûr que je pouvais voir son amour lorsqu'il prend le temps de parler de mon travail. Bien sûr je pouvais sentir son amour lorsqu'il m'effleure le bras avant de prendre la parole. Bien sûr que je sens son amour lorsqu'il porte le parfum qu'il n'aime pas mais que je lui offre. Bien sûr que je sens son amour sur ma langue lorsqu'il m'embrasse parce qu'il a ce goût de café et de journaux économiques qui n'appartient qu'à lui . Mais j'ai 5 sens et l'entendre jouir mon prénom ne me suffit plus. Me priver d'un sens c'est me priver d'une partie de moi. Je ne choisirai pas de devenir sourd par amour. Mon sens du sacrifice a ses limites depuis quelques temps.

Je ne veux pas le regarder, encore un sens qu'il contrôle. Dont-il me prive parce que si je le regarde c'est fini. Et je ne veux pas finir. Parce qu'il y a trop de choses qu'on a manquées. Comme notre premier baiser mais ça c'est pas grave. C'est pas grave parce que j'arrive à en sourire. Mais ça, la rupture, je ne vais jamais en sourire. Je vais en souffrir. Mais pas subitement, non. Plutôt à petit feu. Celui où tu meurs à la fin. Parce que la brûlure est trop forte ou parce que les seaux d'eau sont ridicules face au brasier.

Alors je veux pas.

C'est pas moi le lâche. C'est pas vraiment lui non plus. Mais c'est plus simple de caricaturer tu vois. Moi je suis le gentil amoureux transi et lui le méchant amoureux glacial. Blanc et noir. Griffondors et Serpentard.

Alors, je veux figer l'instant. Pas pour qu'il dure toujours, pas du tout, mais juste pour qu'il s'arrête. Parce que je veux pas d'après.

Je veux pas d'après.

Je veux pas de larmes. Les siennes surtout. C'est pas trop son genre de pleurer. Alors s'il pleure je vais pas m'en remettre. Et puis je vais lui pardonner s'il pleure.

Et je veux pas pardonner.

Parce que Drago il me dit pas je t'aime mais il me dit plein d'autres mots. Et je ne crois pas que ce soit des mots que l'on dit à la personne qu'on aime. Alors si je fige le temps maintenant, je ne suis pas faible. Parce que maintenant je suis en accord avec mon corps et ma raison. Maintenant j'ai l'impression que tout fait sens. Mais seulement maintenant.

Je sais qu'il est en train de me regarder. Il a beau être dos à moi en train de fumer, je sens ses yeux. Ils sont toujours sur moi. Si je disais la vérité, parfois je me sens plus épié qu'observé. Je crois qu'il comprend ce qui se passe. Il a beaucoup de défauts, mais pas celui d'être bête. La fumée s'échappe en cascades régulières.

Peut être qu'il va me parler quand elle se sera complètement consumée. Il fait souvent ça. Dire une fois qu'il a. Dire bonjour après avoir bu son café. Dire qu'il embrasse d'autres garçons après m'avoir fait l'amour. Dire qu'il m'aime après m'avoir perdu.

Ses mains se figent et forment deux poings serrés. Il a fini. Et il attend. Peut être qu'il la ressent aussi cette fin qui flotte dans l'air. Un peu comme l'été qui arrive mais qui ne te réjouit pas car tu sais que tu n'as pas de vacances. C'est un peu de fatalité qui se déverse dans le ciel étoilé.

Je pensais qu'on était au crépuscule. Le genre d'instant où tu penses encore que la nuit ne gagnera pas.

Comme d'hab, la nuit gagne. Ça me fatigue.

Dire : "Je t'aime"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant