UNE NUIT。Partie 1

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Les rues devenaient silencieuses, les bâtiments s'éclairaient grâce aux lumières artificielles, les voitures sortant des bureaux rejoignaient leur habitation et la ville commençait à vivre de nuit.

J'étais dans le bus, accompagnée d'une amie et nous allions voir un film d'horreur, car c'est bien connu tous les jeunes adorent les films de ce genre, voir ils les bénissent. Mais pas moi, ou du moins c'était la première fois que j'allais regarder un écran remplit de clowns et de morts au cinéma.

Devant le centre commercial, principalement connu pour toutes ses boutiques de vêtements, je l'ai laissée passer devant moi. Je me perdais facilement dans ce récent bâtiment géant, faisant beaucoup d'heureux parmi les jeunes, à défaut d'y être allée à maintes reprises. Suivant ses pas, je ne la lâchais pas du regard une seule fois. Difficile de détourner les yeux d'une silhouette si bien proportionnée que celle-ci : un port de tête droit et souple dénudé grâce à son large col, une sublime peau mate presque noire tout droit venue des Antilles, une carrure d'épaules tout à fait féminine s'alignant parfaitement à ses hanches de femme, un dos fin se creusant délicatement à la taille ... et une de ces paires de fessier ! Eh ! Qu'est-ce qui me prenait ? Je sentais la honte m'envahir et me monter à la tête, ce n'était pas à mes habitudes d'avoir ce type de réflexion. Ou du moins c'était très rare. Je me suis calmée quelques secondes et j'ai accéléré ma marche pour pouvoir me mettre à sa hauteur, c'était déjà plus sympathique que de se balader l'une derrière l'autre.

Nous avons marché jusqu'au guichet du cinéma, acheté les places séparément, puis nous avons pris un pot de pop-corn avant de rentrer dans la salle. Après deux ou trois minutes d'attente, convenablement installées dans nos fauteuils, la séance allait bientôt commencer. Et je peux vous assurer que la sérénité que j'avais eu lorsque je m'étais vantée d'aller voir un film d'horreur auprès de toute ma classe, était à son plus bas niveau en ce moment même.

Une main fraîche et fine s'est alors lassée entre mes doigts et pendant quelques secondes je me suis sentie détendue grâce à son regard. Comment une couleur si pure et si mystérieuse pouvait-elle se fixer dans des iris comme les miennes ? Les siennes étaient tellement intenses, ce marron noisette mélangé à ces touches de jaune-or. Mon unique envie du moment était de l'embrasser, déposer intensément mes lèvres sur les siennes qui paraissaient douces et moelleuses. Puis en quelques mouvements simples, ses lèvres pulpeuses s'ouvrirent pour laisser passer une voix mélodieuse et subitement mon envie s'envola :

_ Dis, tu es toute blanche, c'est toi qui a joué dans le film ou ça se passe comment ?

Le fait de savoir qu'elle se moquait gentiment de moi me fit passer au rouge pivoine en une fraction de seconde. Telle une idiote, j'ai lâché sa main pour bouder, on aurait dit une vrai gamine en plein déni :

_ Très drôle, tu en as d'autres avant que la projection ne commence ?

_ Non, mais j'en aurais sûrement après. Me dit-elle en souriant.

Son sourire m'apaisa l'espace d'un instant. Les lumières s'éteignirent et le film fut diffusé. Je vous épargne les détails du massacre, mais vous vous doutez bien que j'ai hurlé tout le long du film : la seule qui criait aux premières dix minutes s'avérait être moi, j'avoue.

Après être sorties du cinéma, assises côte à côte dans le bus, elle n'arrêtait pas de me charrier sur mes réactions disproportionnées que j'avais pu avoir lors de la séance. Les seuls éclats de rire retentissants dans le transport en commun étaient les nôtres, jusqu'au moment où elle prit ma main dans la sienne. Je peux vous promettre que d'un seul coup j'étais déstabilisée par la tension qui régnait à cette instant même. Le silence s'est aussitôt installé, plus aucun bruit, à part le bus lui-même, n'était audible. Je me sentais bien avec elle, j'étais apaisée et sereine. Avec timidité, j'ai posé ma tête contre son épaule. Elle fit de même et je sentis alors, sur mon crâne, sa chaleur corporelle.

UNE NUIT。Où les histoires vivent. Découvrez maintenant