I - Esprits Liés

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Un visage fatigué, voir épuisé se trouve devant moi. Ses yeux éteints, injectés de sang, me fixe d'un regard froid qui me laisse indifférent. J'ai l'habitude de le fixer. C'est la même routine chaque matin lorsqu'il n'est pas là. Peu importe, je cesse de me dévisager à travers cette glace de salle de bain et enfile un t-shirt de couleur sombre ainsi que des jeans bleu marin comme à mon habitude. Je me rends dans la cuisine pour me faire un café. Mes parents ne sont toujours pas là, ce qui ne me dérange pas plus que ça. À chaque fois qu'ils sont présents, c'est soit pour se bourrer la gueule ou pour dormir donc tant mieux s'ils sont absents.

Je jette un dernier coup d'oeil à cet appartement. C'est tellement vide et froid, tout est trop bien rangé à mon goût. Il n'y a aucune vie. Tout est fade. Je déteste cet endroit. J'attrape mon sac à dos et me dirige vers mon collège. Aussitôt entré dans le bâtiment, je me fais bousculer par un groupe de personnes insolentes. Je manque de trébucher violemment sur le sol, mais des bras protecteurs viennent me retenir.

C'est lui. Je connais son odeur, son style vestimentaire, ses yeux et sa chevelure par coeur. Antoine. La personne qui me donne le sourire tous les jours, le seul qui me retient sur ce monde qui me déteste inconsciemment. Il me regarde droit dans les yeux et dessine un sourire contagieux sur ses lèvres. Je n'ai pas besoin d'entendre le son de sa voix pour le comprendre. Je ne fais que hocher de la tête pour lui dire que je vais bien. Ce n'est pas faux, dès que je suis à ses côtés, je me sens en sécurité, éloigné de tous mes problèmes. C'est peut-être mon meilleur ami, mais mes sentiments envers lui sont plus fort que ça et je sais que c'est réciproque. Je fus retiré de mes pensées par une voix agaçante.

-Hé! Les tourtereaux, allez-vous embrasser ailleurs!

Je me retourne pour lui crier qu'on ne forme pas un couple mais le bras d'Antoine me retient de faire quelconque geste. Je pose donc mon attention sur son magnifique visage qui me dit clairement d'ignorer. J'acquiesce d'un signe de tête et il me tire par la main pour partir vers nos casiers. J'ai à peine remarqué qu'Antoine leur ai fait un joli doigt d'honneur en partant. Il saurait toujours comment me faire sourire..


. . .

On sort des classes en rigolant et en s'insultant amicalement. Normalement, je suis attristé par les fins de journée, car en rentrant, je suis à nouveau seul, mais aujourd'hui, c'est différent. Les parents d'Antoine partent pour un voyage d'affaires et reviennent le vendredi prochain, donc dans cinq jours! Ils ont proposé que je reste avec Antoine pendant leur absence pour lui porter compagnie et j'ai accepté sans hésiter. Antoine semble si joyeux, rien ne pourrait jamais lui retirer son sourire confiant. Ensemble, on est indestructibles, invincibles.

-On passe chez toi? Me demande-t-il avec un énième sourire aux lèvres.
-Oui! Réponds-je automatiquement.

Une fois arrivé, je balance mon sac sur le divan et me précipite vers ma chambre pour aller chercher mes affaires. Antoine est simplement resté dans le salon pour contempler la décoration banale de la pièce. Dans un gros sac de randonné, je range des vêtements de rechange pour quatre jours, mon téléphone ainsi que son chargeur, une manette de jeux et mon équipement de toilette. J'ai faillis oublié! Le porte-bonheur que Toitoine m'a offert lorsqu'on était encore jeune et innocent... Je laisse échapper un petit rire incontrôlé et enfile le porte-bonheur avant d'aller rejoindre mon ami aux cheveux fous.





. . .





Je contrôlais l'Armée Noire, je possédais l'âme de nombreux guerriers prêts à sacrifier leurs vies pour mon désir. Et lui, il régnait l'Armée Blanche, l'opposé du mien. Il ne voulait pas sacrifier personne et tout le monde avait de la valeur à ses yeux. Il était l'ange et moi, le démon. C'était le pouvoir contre l'entre-aide. C'était notre petit jeu, le développement de notre imagination. Chaque armée avait une perle de la couleur qui leur représentait. Notre but était de trouver la perle de l'autre équipe et de protéger la nôtre. Ce jeu a duré toute l'école élémentaire jusqu'au moment où Antoine a volé ma perle noire. Il avait gagné le jeu et il pouvait recevoir tout ce qu'il voulait de moi mais il n'a rien demandé. Le prochain jour, il est venu à l'école avec un collier au cou. Une ficelle blanche. Une perle noire. Je n'ai rien compris jusqu'au moment où il est venu me porter le même collier. Une ficelle noire. Une perle blanche. Il m'a sourit et a prononcé:

-Tu es important à mes yeux, je ne veux pas faire la guerre avec toi.

Je n'ai jamais été autant heureux de toute ma vie. Ses mots m'ont marqué et jamais, je ne les oublierais. C'était le seul à réellement porter attention à moi malgré mes nombreux défauts et problèmes. J'ai pleuré à chaudes larmes et je l'ai pris dans mes bras. C'est à ce moment que nos esprits se sont liés. C'est à ce moment que nos coeurs se sont liés.

. . .

-Mathieu! Tu m'écoutes? Me demande Antoine en me dévisageant.

-Hein?.. P-Pardon?

-On est arrivé! Tu ne vas pas rester planté là comme un nain de jardin quand même! Se moque-t-il gentiment.

-Pffft- Va chier!

Il rigole et m'entraîne chez lui. L'atmosphère est joyeuse, ce n'est pas très rangé mais c'est ce qui donne le charme de cette maison. Elle est habitée. Antoine me propose quelque chose à boire et j'accepte par réflexe. On se rend directement dans sa chambre et j'y installe mes affaires. Je pourrais dormir dans la chambre de ses parents mais je n'aime pas son côté froid et je me sentirais seul donc Antoine a accepté que je passe les nuits avec lui. Fatigué, je me laisse tomber sur le lit du chevelu alors qu'il me fixe.

-Je sais que je suis beau mais arrête de me matter!

Il rigola un moment pour cacher son embarra et détourne le regard.

-Tu as toujours ce truc? Dit-il en pouffant, aillant remarqué mon porte-bonheur.

-Oui, je me demande toujours comment tu as fait pour percer les perces...

-Chacun ses secrets!

En observant autour de moi, mon attention se pose sur une petite étagère mural près du lit double. On y retrouve nombreux cadeaux signés à mon nom. Tout me revient: les cartes d'anniversaires faites de cartons et de crayons feutres, les bracelets d'amitié rainbow loom, mes horribles dessins, une peluche de chat déformée, les messages qu'on se passait en classe et j'en passe. Je me retourne et Antoine affiche un sourire gêné sur son visage. Je n'arrive à croire qu'il ai gardé tout ça..

-Je t'en ai donné des choses inutiles...Avoue-je, étonné.

-Ces "choses" ne sont pas inutiles! C'est des empreintes de notre amitié, ducon!

-....Putain, j'ai envie de chialer...

Toujours souriant, Antoine vient loger sa tête contre mon épaule puis enroule ses bras autour de ma taille. Je fais de même en plaçant mes mains dans son dos. Nos battements de coeur se synchronisent et me provoque une impression de calme, de douceur. Mes paupières se ferment tranquillement. Son odeur me calme... Sa présence me donne un sentiment de sécurité... Ses cheveux me grattent.

-Vas y, chiale, poulette.. déconne-t-il avec une voix étrangement sensuelle.

-Antoine!! Tu as gâché l'ambiance! Pouffe-je en me séparant de Chewbacca.

-Ahah! Pardon, c'était beaucoup trop tentant!..

PERLES [MATOINE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant