Cœur de rugby

7. Matchs contre Bayonne et Dax

On termine notre deuxième tour de terrain pour attaquer le troisième. Les entraîneurs ont bien compris qu'on n'était pas concentré et ils nous le font payer. Entre Gabriel et moi qui ne sommes jamais d'accords sur les combines à adopter, les centres qui font pleins d'en-avants et les avants qui ne font que rire, on a bien mis nos coachs en rogne.

- Et après vous viendrez tous en cercle autour de moi et on va voir qui fait encore le malin ! Et on accélère allez ! À cinq vous devez être à moi ! Un... Deux... Trois... Quatre...Cinq...

On arrive tous à son niveau à bout de souffle tellement on a dû courir vite. On était trop loin de lui.

- Et vous direz merci aux retardataires qui rallongeront le physique. Très bien. Tous au sol, dix pompes simples rapides... Dix pompes mains serrées... Dix burpees, allez plus vite ! Vingt abdos ! Dix pompes sur les poings... Vingt squats ! Gainage une minute....

Les respirations se font entendre et personne ne rit. Tout le monde est concentré parce qu'on paye notre déconcentration. On est jeudi et on va être encore plus mort pour la fin de semaine et il est fort probable que la saison commence bientôt. Je réfléchis tout le temps pendant le gainage et puis on repart sur des pompes et des burpees sur trois circuits encore.

- Vous comptez vous concentrer maintenant ? Nous dit l'entraîneur menaçant

Personne ne répond rien mais le message est passé. On repart sur la mise en place et Gabriel vient vers moi pour me parler.

- Justine, on doit réussir à communiquer alors quand j'appelle le ballon tu me fais la passe au lieu de la refaire à tes avants !

- Tu n'as qu'à les dégager, rétorqué-je

- Tu n'as qu'à faire une passe derrière eux !

- Je pourrais le faire si tu étais plus en profondeur ! bouillonné-je

- Tu fais exprès de leur faire la passe quand j'appelle ou alors tu te casses toute seule au ras ! Réplique-t-il, que tu sois une fille ou pas tu dois écouter le dix.

- Et toi tu dois écouter ton neuf !

- On vous attend ! Nous hurle Mathéo

Je lui jette un regard mauvais et pars me placer en réception. Le dix des premières années tape loin et haut et la réception tombe sur Paul qui avance en crochet et qui se fait plaquer. Je récupère le ballon au ruck et entend Gabriel appeler le ballon. Malgré moi, je lui fais une passe et il dégage notre camp. Les premières années relancent le jeu et j'en plaque trois d'affilés. Et Thomas récupère un ballon à la poussée. Je joue avec mes avants jusqu'à ce que Gabriel me rappelle le ballon. Tout le monde est placé pour lancer une attaque, les avants ne sont ni entre moi et Gabriel, les arrières sont bien en profondeur, tout est parfait pour que je fasse une passe et pour qu'il y ait essai. Mais il y a aussi une brèche que je peux prendre au ras car elle n'est pas gardée. Si je m'y engouffre, je vais à l'essai mais les garçons vont me tuer. J'inspire, j'expire, je regarde Gabriel et je lui le lance le ballon. Il donne à Mathéo qui croise avec Steven qui donne à Miguel quand il vient à lui main-main et il passe pour marquer. Simple mais efficace.

- Tu vois Justine quand tu n'en fais pas qu'à ta tête il y a des essais qui se marquent ! Jubile Gabriel en passant à côté de moi tandis que les garçons se félicitent entre eux.

Je rage intérieurement et ne réponds rien. Il fait une attaque simple et il est fier de lui ! Je suis à deux doigts de l'attraper par le col et de lui mettre un coup de boule. Qu'est-ce qu'il est arrogant ce type à se croire supérieur avec moi !

- Tu as fait une croisée et une main-main, il n'y a pas non plus de quoi être fier, intervient Charles en passant ses bras autour de mes épaules pour me calmer. Je suis crispée, je suis énervée, je me sens humiliée et je vais craquer. Je ne peux pas me le voir. L'entraîneur siffle la fin de l'entraînement et on doit tous se rapprocher de lui mais je n'en ai pas envie. Je suis à deux doigts d'exploser. Gabriel nous laisse un peu surpris que Charles l'ait taclé et il me tourne vers lui.