Elle poussa un juron lorsque la tasse s' échappa de ses mains tremblantes . Le café se renversa sur la moquette usée et les dernières gouttes éclaboussèrent sa jambe droite .
La jeune fille broncha à peine et considéra avec une mine renfrognée la tâche sombre qui s'agrandissait sur le tapis en mohair gris telle une flaque de sang .
Elle resta ainsi durant de longues secondes, ses grands yeux vides rivés sur la tâche brune qui durcissait sur la moquette , elle aurait demeuré ainsi encore longtemps si elle n'avait pas perçu de notables changements dans l'atmosphère .
La température de la pièce chuta brusquement au point de faire dérégler le thermomètre . L'air se statufia tout à fait , imprimant dans les poumons de la jeune fille comme une empreinte glacée .
Les poils de ses bras se hérissèrent à s'en extirper de ses pores . Une chair de poule glacée parcourait ses jambes si bien qu'elle serait incapable de les mouvoir.
A l'instar du reste de son corps , ses yeux bougeaient dans ses orbites . Affolés , ils fouillaient la pièce , se préparant à s'arrêter à tout moment sur un détail insolite voire même macabre donnant raison à l'irrationnelle crainte qui lui broyait les entrailles .La pièce s'obscurcissait . Une fine brise agita les rideaux du salon , faisant frétiller le froid le long du sternum de l'adolescente . Elle cligna des yeux et son regard revint sur les tâches brunes qui finissaient de sécher sur la moquette et ... se modifiaient sournoisement.
La jeune fille se pencha en avant et se frotta vigoureusement les yeux .Mais lorsqu'elle réussit à les ajuster à la faible luminosité de la pièce , elle remarqua que les tâches sur la moquette s'étaient bel et bien métamorphosées .
Dans les entrelacs du tapis , les traces de café adoptaient des abords de sentence .Une phrase . Un rappel . Une menace .
« Souviens-toi du 23 Octobre ... »
L'adolescente voulut hurler mais paraît-il que tout l'oxygène avait été aspiré hors de ses poumons .Elle fit mine de se lever mais ses jambes ripèrent sur le tissus rêches du canapé et elle s'y réenfonça.
Son coeur déserta sa poitrine et se mit à battre dans des endroits insolites .
Contre ses tempes ...
Sous sa voûte plantaire ...
Dans la pulpe de ses lèvres ...Sa raison flancha et la réalité prit des allures sinistres , un voile sombre s'étendit sur la pièce .Les contours des meubles se brouillèrent . La noirceur semblait tout recouvrir même l'inscription sur la moquette n'était plus qu'un vague froncement de couleurs mais elle savait qu'elle était toujours là . Elle savait qu'elle ne partirait jamais .
«Souviens-toi du 23 Octobre ...»
Elle s'affaissa totalement contre le dossier du canapé dans un hoquet silencieux .
Dans une pièce quelconque de l'appartement . Le filament d'une ampoule grilla , le bruit que cela fit résonna comme celui du glas .
Elle ramena ses jambes vers sa poitrine et commença à sangloter .KOP-KOP-KOP-KOP.
Quelque part dans la pièce , elle entendait le claquement profond et monotone de chaussures féminines sur le carrelage .
C'était ça le hic avec elle .
On ne savait jamais d'où elle pouvait surgir .Devant ou derrière ...
A gauche ou à droite ...Un éclat de rire fusa ...
Dans sa tête ...
Dans la pièce ...
Elle ne savait pas .Le claquement sonore des talons sur le carrelage se tut , ensuite , vint le silence . Terrible et menaçant .
La jeune fille releva la tête , intriguée . Face à elle , une silhouette se dessinait dans l'insidieuse pénombre ; Taillée à même les ténèbres , la jeune fille parvenait néanmoins à distinguer le contour d'une jupe .
Le buste légèrement incliné , la tête affaissée sur sa poitrine pourtant la jeune fille pouvait sentir sur elle la lourdeur de son regard dur et inflexible .Elle essaya de hurler mais sa voix se cassa et elle s'étouffa avec sa propre salive . Elle aurait voulu se rebeller contre l'affreuse destinée qui était la sienne . Mais ses muscles se figèrent dans une tétanie tout aussi abjecte que le sort qui l'attendait . A croire que son corps , dégoûté par l'être méprisable dont il est le réceptacle , renonçait à la défendre.
Elle aussi , elle se dégoûtait mais elle ne voulait pas mourir . Cette simple idée la révulsait , alors pénitente nonobstant affligée par la perspective de sa fin prochaine , elle se mit à supplier avant même que son bourreau ne puisse esquisser le moindre geste .
Telle une litanie les flots de mots , bredouillants - bredouillés s'échappèrent de ses lèvres .- Je me repends ... Je me repends ... Je me repends ... Je me repends ... Je me ...»
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Remember ,Remember
Horror« L' histoire que je me propose à vous raconter n'est pas celle de la fille que vous avez connu ... » Lorsque meurt Anne-Sophie Brennan , une jeune adolescente (presque) sans histoire , ses camarades de classe n'y voient qu'une simple tragédie ou to...