Dans le ciel gris, les rayons du soleil devaient se battre pour une place parmi les nuages. C'était une froide matinée du mois d'octobre, le ciel paraissait triste et les rues semblaient vides. La montre du jeune avocat, vêtu d'un costume noir cette fois-ci non par choix, mais par obligation indiquait neuf heures. Tenant l'enfant dans ses bras, il monta les marches de la bâtisse avec lassitude. Arrivé dans la salle, il la vit.
Soudainement, son air blasé et lunatique laissa place à l'anxiété. Sa robe noire et son teint plus pâle que d'habitude lui donnaient l'air fragile et vulnérable. Il se sentit devenir nerveux sans vraiment savoir pourquoi. Il ne s'agissait pourtant pas de la première fois que son regard se posait sur la dame, mais la voir dans cet état...
Perdu dans ses pensées, le jeune avocat ne se rendit même pas compte qu'une femme se trouvait à ses côtés. Cette dernière lui adressa la parole.
- N'est-elle pas belle, Marjorie ?
- En effet, sublime, rétorqua-t-il.
- Il n'y en a pas deux comme elle, lui dit cette dernière d'un air songeur. Il n'y a qu'elle. Et s'il fallait la comparer à quelque chose, ce serait au doux parfum des fleurs fraichement cueillies ou bien...
- Aux premières cerises du printemps, compléta-t-il.
- Oui Mark, exactement, répondit la dame.
Et elle partit.
L'homme laissé à lui-même s'approcha craintivement de Marjorie tout en repensant aux nombreuses aventures qu'ils avaient vécues ensemble. Leur première rencontre au cabinet, le cinéma, les restaurants, le camping et leurs voyages lui vinrent à l'esprit. « Ah! C'était le bon temps » pensa-t-il, sachant parfaitement que toute bonne chose a une fin. Toutes ces images s'accumulaient en rafale dans la tête de Mark. Comme si on lui mitraillait en pleine tête de doux souvenirs, à la fois amères. Sous la pression et le constat inévitable des temps heureux perdus, il explosa et cria : « Pourquoi m'as-tu laissé hein, Marjorie? Tu me laisses là, seul. Je dois me débrouiller. Pourquoi as-tu signé un contrat que tu n'étais pas prête à respecter? Le mariage, ce n'est rien pour toi ? Tu ne peux pas quitter quelqu'un sans avertissement. Tu sais que je t'aime encore. TU LE SAIS!» Pendant que ce dernier, encore essoufflé de s'être vidé le cœur, attendait une réponse à ses reproches, son ami et bon collègue posa sa main sur son épaule d'une façon réconfortante. Mark se redressa de son mieux, voyant bien que ce qu'il disait ne servait à rien.
Ce dernier s'asseyait sur la chaise de la première rangée de la salle lorsqu'une dame s'approcha de lui et lui dit : «Toutes mes condoléances Mark. Marjorie était une femme incroyable». Bouleversé, avec le peu de force qu'il lui restait, il serra l'enfant qu'il tenait toujours dans ses bras. Il s'adressa au nourrisson d'une semaine, sachant bien qu'il était trop jeune pour comprendre : «Tu vois là, couchée, c'est ta maman. Elle va dormir pour très longtemps. Tu ne la reverras plus, mais sache qu'elle t'aime. Elle a tout donné pour toi, même sa vie.»
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Tout donné
Short StoryIl ne s'agissait pourtant pas de la première fois que son regard se posait sur la dame, mais la voir dans cet état...