Chapitre 30

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Lorsque je sortis de mon lit ce matin-là, j'eus le pressentiment que ma journée serait bonne. Le genre d'impression qu'on peut parfois avoir en se réveillant, même après une nuit agitée. Comme d'habitude, je commençai par retirer ma taie d'oreiller trempée par les larmes de la nuit, en sortis une autre de mon placard, la mis sur le coussin nu, et fis mon lit. J'enfilai ensuite mes vêtements confortables, ces habits moelleux qui n'annoncent qu'une seule chose : nous sommes dimanche.

Voilà désormais 2 jours que j'avais quitté Kyoto ainsi que le voyage scolaire qui marquait la moitié du premier trimestre. Il ne me restait plus que 10 mois pour assassiner Koro-sensei.

"Bon, que vais-je faire aujourd'hui ?" pensai-je en brossant mes cheveux.

Il fallait que je termine mes devoirs pour lundi (il ne me restait plus que 45 exercices), que je pense à arroser ma plante, qu'on aille faire les courses au magasin ouvert toute la semaine, que je recouse un ruban de mon uniforme, la lessive, réparer mon rideau cassé...

"Aaah, que de choses à faire."

En poussant la porte de ma chambre comme chaque matin, j'aperçus celle de Ryô toujours fermée. Il comptait faire la grasse-matinée, compris ! Même s'il faisait presque toujours la grasse-mat'. Comment faisait-il pour arriver à l'heure chaque jour ? C'était un mystère. Je préparai le petit-déjeuner, avalai ma part attablée seule dans la salle à manger, donnai à boire à la plante. Un dimanche matin qui commençait agréablement, paisiblement.

Une fois ma vaisselle effectuée et le plateau de mon frère mis sous une assiette pour conserver la chaleur, je remontai en silence dans ma chambre, pris ma chaise avant de sortir mes cahiers et de craquer chacune de mes phalanges. Mon rendez-vous quotidien était avancé.

S'il y avait bien quelque chose que j'appréciais beaucoup depuis que j'étais entrée dans la classe E, c'était les devoirs supplémentaires de Koro-sensei. Rusés, retors, vicieux, brassant toutes les matières, et appuyant là où ça faisait bien mal, je m'y attelais inlassablement tous les jours pour les rendre le surlendemain, avec la fierté de pouvoir dire à ma cible : vous avez beau essayer, j'arrive à déjouer tous vos pièges.

"Très bien, exercice n°144 : mettez sous forme algébrique les 5 énoncés ci-dessous."

"Exercice n°145 : Définissez le concept de justice selon le philosophe grec Aristote puis comparez-le avec la justice de l'époque Kodai de chez nous (bonus : approfondissez avec votre propre vision de la justice)."

"Exercice n°146 : Indiquez dans le schéma ci-contre, les 58 os numérotés du corps humain."

"Exercice n°147 : Sachant que la vitesse du son est de 340,29 m/s au niveau de la mer et que Koro-sensei se déplace à mach 20, combien lui faudra-t-il de temps pour atteindre la capitale de l'Argentine, distante de 18 358 Km de Tokyo ? (bonus : quelle est la capitale de l'Argentine et quels sont ses points forts ?)"

"Exercice n°148 : Dans le livre de Salinger "L'attrape-coeurs", comment traduisez-vous en Anglais le passage : "Sûr, je commençais à me sentir comme un veau primé au concours à rester là assis tout seul. Avec rien d'autre à faire que boire et fumer..." ?"

"Exercice n°149 : Composez un haïku sur la beauté de l'automne et de sa saison des pluies en respectant le style de Buson Yosa mais en finissant comme d'habitude par le mot "tentacule"."

Et ça se poursuivait ainsi sur des pages et des pages, sans arrêt. Des pièges, des questions simples et directes, des problèmes complexes à s'en arracher les cheveux, des dessins où seul le talent était noté, des coups vicieux...

J'adorais toujours autant me plonger dans ces énoncés infernaux qui stimulaient mon cerveau à fond. Enfin des exercices à la mesure de mon intelligence !

Trick or Cheat ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant