Chapitre 1

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-Qu'ils arrêtent donc de me prendre pour ce que je ne suis pas!

Je me regarde dans la glace. 《Encore! me répéterait ma mère , tu passe ta vie à te regarder dans le miroir....》
Ce qu'elle n'a pas compris, ma mère. c'est la seule façon que j'ai trouvée pour savoir qui je suis vraiment. Je me dit qu'à force de me regarder, je vais peut-être finir par savoir qui je suis.

Depuis quelque temps, l'image de petite fille sage que me renvoie mon miroir ne colle plus à moi. Il y a quelque chose qui ne marche pas entre cette fille et moi.

Pour l'instant, on n'est pas jolies, jolies toutes les deux. J'ai dû pleurer une partie de la nuit. Je me demande encore comment ça se fait que mon lit ne flotte pas dans la chambre. Et que je ne vois pas, à la surface de cette mer de larmes, toutes les photos que j'ai enlevées du mur...

Je m'approche de plus en plus près pour constater l'étendue des dégâts.

C'est bien connu, plus le chagrin est gros et plus il laisse de traces. Je ressemble à la blonde de dracula, côté  yeux, à une brassée de lavage mal séchée, côté vêtements et à un épouvantail à moineaux, côté cheveux!

Bon! En attendant, il faut que je fasse quelque chose parce que je fais peur. Je prends une brosse et j'essaie de démêler mes cheveux. Ça va dans tous les sens, c'est plein de noeuds. Ils ont beau être blonds et longs jusqu'au milieu du dos, ils ont l'air de n'importe quoi. Si je m'écoutait... C'est vrai ça! Et si je m'écoutait!

Je sors précipitamment de ma chambre. Aucun bruit dans l'appartement. C'est samedi, ma mère est partie à son cours de russe.

Dans ses temps libres, ma mère adore se compliquer la vie. Il y a eu la période: Économie et marché international, Étude de faisabilité de... je ne sais plus quoi, taï chi avancé et cuisine orientale, euh... machin machin qui ne serviront absolument à rien et autres trucs du même genre. Plus elle en fait, ma mère , plus elle est heureuse. Tout le contraire de moi. Moi, si je m'écoutais...

Je vais dans la salle de bain et j'en profite pour enlever les traces de rimmel. Le résultat n'est guère mieux, mais ça fait un peu plus propre. Personne n'a encore inventé le démaquillant à chagrins. Alors, mes yeux sont encore rougis. Tant pis.

Je retourne dans ma chambre. En ouvrant la porte, je constate le désordre. Je ramasse quelques photos à la traîne.

Je ne peux pas croire que cette petite fille heureuse à plusieurs exemplaires, c'est moi. C'est comme si auparavant je ne savais faire que ça, rire devant un appareil photo. Ça veut au moins dire que chaque fois que j'ai été prise en photo, mon père était là, puisque c'est lui qui tenait l'appareil.

J'ai toujours pensé que j'avais un père normal. Mais c'est faux. Mon père est un monstre à un oeil, un cyclope qui fait des grimaces derrière son objectif pour me faire sourire. Mon père est un appareil photo qui me prend en image, mais pas dans ses bras

Cette pensée me reste dans la gorge. C'est fou, chaque fois que je pense à mon père ces temps - ci, je n'arrive plus à rien avaler. Ni la bouffe, ni l'air, rien.

Et si je l'appelais? Mais je lui dirais quoi? Je lui répéterais encore une fois qu'il n'est jamais là quand j'ai besoin de lui? De toute façon, il ne serait sûrement pas là.

Comme je sens que c'est la journée des grandes décisions, je saute sur le téléphone. Je m'apprête à laisser le sempiternel message sur son répondeur:  " c'est moi. OH! Oublie donc ça..."

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 22, 2018 ⏰

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Mon père et moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant