Alex Au Carré

- Chapitre 3 -

" - Mademoiselle Leroy ? Dois-je vous rappeler que vous êtes en cours et que les téléphones sont interdits dans les bâtiments ? "

Je relevai la tête, prise la main dans le sac, un léger sourire coupable sur le visage. Léger. Je soupirai et tendis mon portable à ma prof.

" - Si mes cours ne vous intéressent pas, trouvez-vous un objet d'attention qui ne soit pas proscrit par le règlement intérieur."

Je roulai des yeux et enfonçai ma tête entre mes bras. Ça faisait à peine une semaine qu'on était en cours et j'en pouvais déjà plus.

Surtout qu'en plus, cette chère Madame Simone m'avait confisqué mon précieux téléphone, que je déteste l'histoire par dessus tout et que ma place habituelle était occupée par un petit con qui passe son temps à me fixer. Je me suis assise ici à chaque cours depuis le début et ce beau brun arrive et s'assied à ma place. Il y a un trentaine de chaises dans chaque salle et lui, il veut cette chaise là. Et le v'là qui me lâche pas du regard depuis le début du cours. C'est ça, profite bien ducon parce que ma place tu la reverras plus.

" - Bon, Leroy, prenez votre sac et sortez de mon cours. Vous ne faîtes rien et, visiblement, vous avez quand même réussi à capter l'attention de vos camarades. Allez, la vie scolaire vous attend bras ouverts."

Je ramassai mes affaires et sortis de la classe non sans un regard assassin au détenteur de ma précieuse table.

" - Tiens, Alexandra, ça faisait quoi, deux jours que je t'avais pas vu ici ? me lança le surveillant de garde.

- Toujours fidèle au poste. Madame Perron veut me voir ou je prends juste un billet ?

- Elle t'attend."

Je fis signe au surveillant et entrai dans le bureau de ma CPE.

" - Eh bien, ça fait déjà quatre fois que tu es virée de cours depuis le début de l'année. Reconnais que ça fait beaucoup, me sermonna-t-elle. Sois consciente que cette année est la dernière. Ton dossier scolaire possède déjà quelques tâches, poursuivit-elle en mimant des guillemets, et pas des moindres. Tu ne peux pas te permettre un nouveau dérapage et là, tu t'engage sur la mauvaise voie. Alors s'il te plaît, fais un effort. C'est pour-

- Mon avenir, je sais. Je vais suivre les cours. Au moins essayer de ne pas dormir.

- Arrête ton insolence, Alexandra, c'est pas comme ça que tes professeurs vont te garder en cours."

La CPE continua à me sermonner gentiment pendant une petite dizaine de minutes durant lesquelles je me contentais d'hocher la tête, me sachant en tort.

Un heureux hasard fit que lorsque je sortis du bureau de vie scolaire je croisai le fameux brun ténébreux voleur de place.

" - Alexandra, c'est ça ?

- C'est ça, répondis-je en essayant de l'éviter.

- Je fais une soirée ce week-end pour essayer de souder la classe. T'es invitée, bien sûr," dit-il en me tendant un bout de papier.

Et il partit. Comme ça, me laissant plantée au milieu du couloir comme une idiote. Je jetai un coup d'œil sur le bout de papier qu'il m'a donné. J'y crois pas, ce mec se balade avec un paquet de carte de visite ou quoi ? Il me sort un papier avec son numéro de téléphone de sa poche, comme si c'était déjà préparé. Blaireau.

Blaireau, mais pas mal. Le genre brun ténébreux au regard azur. Sûrement un sportif, en plus. J'irai à sa soirée, ça me changera les idées. Et puis, avec un peu de chance, le beau rouquin y sera aussi, j'ai cru comprendre que ces deux là étaient amis. Je n'avais pas reparlé à mon prince charmant depuis le jour de la rentrée, on s'était contenté d'un petit signe de main quand on se voyait.

La sonnerie retentit annonçant la pause de dix heures. Les élèves affluèrent dans la cour et je m'écartai de la foule et du bruit. Quelques minutes plus tard, Marie me rejoignit et s'assit à côté de moi. On s'était rencontrées deux jours après la rentrée et on s'était tout de suite entendues. Marie, c'était une immense beauté ébène, mystérieuse et froide aux premiers abords. Elle avait les cheveux ras et un visage carré, des lèvres pulpeuses et un regard perçant.

" - Un jour il va vraiment falloir que tu te bouges le cul," déclara-t-elle.

Quand on la connaît un peu mieux, elle devient vachement directe.

" - Si tu veux avoir ton BAC, tu vas devoir travailler un peu, continua-t-elle.

- Hum, pas faux.

- Sérieux, tu fais rien de tes cours. En plus faut que tu ailles récupérer ton portable."

J'acquiesçai d'un signe de tête. Je sentis son regard peser sur moi alors je me retournai.

" - Quoi ? Pourquoi tu me fixes comme ça ?

- C'est pas toi que je fixes, tout ne tourne pas autour de toi Alex. Je me demande juste pourquoi Mathieu vient vers nous."

Je suivis son regard et tombai sur le garçon de tout à l'heure. Alors il s'appelle Mathieu ? C'est bon à savoir.

" - Re-bonjour, me dit-il. Je compte sur toi pour samedi soir.

- J'y serai.

- Super, alors à samedi."

Et il repartit. Ce mec est vraiment étrange. Et beaucoup trop sûr de lui.

" - C'est quoi ces conneries ? Tu vas à sa fête samedi ?

- Bah ouais, il a l'air cool. Pourquoi ?

- Ce mec, c'est le type qui fait des méga fêtes avec alcool et drogue à volonté dans les séries de ricains tu vois ?

- Le genre grosse débauche ?

- Ouais. Mais avec moins de drogue, moins d'alcool, et moins de sexe. Fais pas cette tête, il y en aura quand même. Un petit peu.

- Ça me changera les idées. Et puis tu vas m'accompagner, pas vrai ?

- Hors de question. J'aime pas les gens qu'il y aura.

- Tu sais même pas qui est invité, protestai-je.

- Justement, tout le monde est invité ! Ce gars se balade dans le lycée avec ses potes et file son numéro à tout le monde. Résultat, tu te retrouves à fêter on ne sait quoi avec des gens que tu connais même pas. Donc non, je t'accompagnerai pas.

- Lâcheuse," conclus-je.

Nous ramassâmes nos sacs, après un haussement d'épaules de sa part, nous retournâmes en cours. Mon estomac est bien parti pour gargouiller pendant une heure.