HURT

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« C'est par faiblesse que l'on hait un ennemi, et que l'on songe à s'en venger; et c'est par paresse que l'on s'apaise, et qu'on ne se venge point. »

Les Caractères
La Bruyère

-Je suis dans la chambre 15. acheva Jared.

Je lui assenais un coup d'épaule amicale tout en riant de bon cœur à sa blague salace. À mon sens c'était grâce à cela que les gens m'appréciaient. Nul besoin de prendre des pincettes, rien ne parvenait à m'outrer, j'avais un humour à toute épreuve !

Alors que nous atteignons la porte d'entrée toujours recouverte de son film de protection, je remarquais qu'aucune lumière ne semblait vivre. Je fus surprise de constater que ma mère et mon frère dormaient déjà. Mais il faut concéder que ses deux journées de voyage avaient été exténuantes. Dans un mouvement machinal, je posais mon index sur mes lèvres, imposant le silence aux 5 garçons m'entourant. J'abaissais la poignée avec moult précautions, mais celle-ci ne broncha pas.
Elle est neuve, c'est sûrement pour cela.
Dans un mouvement bien plus franc, j'essayais une seconde fois. Rien à faire. La maison était verrouillée.

-Merde ! C'est fermé. Jurais-je en chuchotant.

Et dire que j'avais promis des Haribos et du jus de pomme bien frais aux Quileutes. Toutefois, ce qui m'inquiétait le plus n'était pas tant la restauration nocturne de mes amis, mais plutôt le lieu où, par la suite, je pourrais sommeiller une nuit durant. Je me figurais très bien que les garçons me proposeraient le gîte, cependant les regards lourds de sens qui seraient échangés le lendemain auraient vite fait de m'irriter. Appeler ma mère eue était la pire chose à faire, si tant est possible qu'elle se tire des bras de Morphée.

-Ta fenêtre est ouverte ?

Incrédule, je fixais Paul, qui venait d'interrompre le fil de mes pensées. Moi qui m'attendais à une énième farce de sa part, son visage était bel et bien sérieux. M'avançant sous la dite fenêtre, je me figurait qu'effectivement elle était grande ouverte. Seuls les vaporeux rideaux, secoués par moment par la bise crépusculaire, obstruer la vue de l'intérieur. Cependant, je ne voyais pas comment Paul parviendrait à escalader la face de lisse de la nouvelle maison.
Grimpant sur le dos de celui-ci, j'enroulais mes jambes autour de sa taille. La chaleur de son corps était vraiment élevée. La température était pourtant caniculaire, pouvait-il vraiment avoir de la fièvre ? D'un bond, il parvint à atteindre une branche proche de l'ouverture. Nous sautâmes à l'intérieur et je lui jurais de l'occire s'il continuait de piétiner mes coussins et plaids avec ses chaussures terreuses. Descendant de ma fenêtre en saillie, Paul me précipita sur mon matelas avec rudesse. Je m'accrochais fermement et se furent nos deux êtres riant qui s'écrasèrent sur le lit en fer forgé.
Se reposant sur ses coudes, il laissa néanmoins choir sa tête dans mon cou d'où s'échappaient quelques éclats restreint pour éviter de réveiller toute la maisonnée. Son souffle brûlant incendia chaque fibre de mon épiderme, faisant naître quelques frissons de désir. Dire que Paul était laid eut été une erreur de jugement digne d'un fat. Le désir inextinguible qui animait mon cœur me rendait honteuse. Où Diable était passé le gamin qui mangeait mes tartes à la boue et avec qui je me battais sans cesse ? Même si je parvenais à entrevoir l'enfant que j'avais laissé sept années plus tôt, il était évident qu'il avait changé.

Dans l'espoir d'atténuer notre proximité et donc de restreindre l'incendie qui ravageait mes entrailles, je plaquais mes deux mains sur son torse qui était imprudemment nu et le repoussais délicatement. Ma tentative parvint certes, à le décoller de ma poitrine affolée qui se gonflait de manière saccadée, mais son visage resta penché au-dessus du mien. Bien trop près. Il me fixa un instant d'un regard enivrant avant détourner les yeux vers sa main gauche qui enroulait distraitement des boucles de ma chevelure.
Mon cerveau prit enfin la pleine mesure de ce qui avait lieu. Deux personnes éprouvant une attirance, que je supposais réciproque, qui découvre le bonheur de se retrouver après de longues années de séparation, allongé l'une sur l'autre sur un lit, dans une chambre dont la porte est close et qui se situe dans une demeure dont les paupières se sont abattues depuis un certain temps.
L'arrivée d'Embry suivi des autres jeunes hommes dans cette même chambre, m'octroya la puissance nécessaire pour faire rouler mon ami sur le côté et me relever en vitesse, masquant de mon mieux les apparences. Malgré le regard et le sourire en coin qu'Embry m'adressa, il n'émit le moindre commentaire sur ce qu'il avait sans nul doute deviné. Quant aux autres, ils ne nous prêtèrent aucune attention, bien trop fascinés par la quantité de livres que les déménageurs avaient placés à l'aveuglette dans les étagères de bois. Frottant mes mains moites sur mes cuisses tremblotantes, je m'avançais vers Jacob, qui caressait la tranche d'un livre dont le titre était en français.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 25, 2018 ⏰

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✝ Scar ✝Où les histoires vivent. Découvrez maintenant