University of the Damned

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S'il y avait bien un lieu étrange à City Pace, c'était bien cette "University of the Damned" qui ressemblait plus à un monastère.
Une petite cour intérieure, encerclée de vieux bâtiments, et ... oui ... une chapelle avec son clocher. Quelques professeurs habillés en soutane. Il ne manquait plus que la tonsure à la place de leurs belles chevelures !
Il y avait trois mois, Ty avait présenté cette curieuse université à Mia.
- Tu n'as pas besoin d'écoles prestigieuses, ni de travailler. Juste pour occuper ta petite tête.
Mia s'était décomposée. Fini les rêves de liberté et d'avenir. Elle allait intégrer cette... Chose ! Mia avait cherché un sourire moqueur sur le visage de Ty, un sourire lui annonçant la bonne blague. Mais non. Ty était toujours sérieux, contrôlant sa vie dans les moindres détails.
Mia mâchouilla son crayon, son regard se portait sur les petits moineaux qui sautillaient sur le muret en pierre en contrebas.
La voix monotone du professeur de littérature la berçait depuis quelques minutes.
- Brexus Longas pilla le grand temple de Favemo, dérobant la jarre qui contenait les rouleaux sacrés. Le nom de tous les Hunters y était inscrit, ainsi que leur descendance. Vous comprendrez aisément l'importance de retrouver...
Mia n'écoutait plus. C'était d'un ennui à en mourir ! Elle referma le petit livre qu'elle tenait dans ses mains. Juste un titre "Les rouleaux de Favemo". Aucune illustration. Comment pouvait-on trouver intéressant ce genre de littérature ?
Mia observa ses camarades. Ils étaient une dizaine, pas plus. Tous étaient suspendus aux lèvres du professeur. Celui-ci remonta ses lunettes qui glissaient souvent sur son nez moite et poursuivit les explications.
Mortel... C'était d'un ennui mortel... Et les étudiants, tous plus bizarres les uns que les autres. Elle observa une jeune fille tout prêt de sa table. Lexy. Tous les atouts pour aguicher les hommes : grande, mince, sûre d'elle. Mia était son contraire : petite, quelques formes et peu de confiance en elle.
Lexy aurait pu passer pour une belle femme tout à fait normale si elle ne faisait pas des bruits étranges avec sa bouche. Des gargouillis pour le moins surprenants. Dès qu'elle parlait, une série de sons sortait de sa bouche. Mais le pir était que les autres étudiants comprenaient ce charabia et répondaient de la même façon. Mia se prenait alors la tête dans ces mains et se maîtrisait pour ne pas leur crier de s'arrêter. C'était insupportable.
Son regard fut attiré par un étudiant placé dans la rangée côté mur. Il se mit à faire des gestes circulaires dans les airs avec son stylo. Il tenta de maîtriser sa main, du coup, sa tête eut un tic nerveux. Vraiment étrange...
Mia avait observé les étudiants des autres classes. Pas de doute, elle avait hérité des compagnons les plus atteints. Elle se posait la question alors de savoir sa présence parmi eux. De deux choses l'une : ou elle était gravement atteinte psychologiquement au point de ne pas s'en rendre compte, ou alors le superviseur de cette sinistre université avait commis une erreur.
Mia sortit son agenda et déplia un petit papier. Un tableau rapportait l'emploi du temps de sa semaine. Littérature, bibliothèque, langage oral... Mia ricana. Pas besoin avec cette classe. On détient la palme du langage corporel au langage guttural ! Elle poursuivit avec un sourire. Expression corporelle... Cette fois, elle lâcha un petit rire au souvenir du cours dernier. Trop drôles avec leurs tics. Mia redevint sérieuse quand elle sentit le grand brun devant elle se retourner pour la fusiller du regard. Elle releva la tête et vit un de ses yeux cligner de façon incontrôlable. Il fallait qu'elle sorte où elle n'allait jamais pouvoir se retenir de rire.
Elle baissa sa tête et tenta de se concentrer sur le bout de feuille. Bibliothèque, arts plastiques... mouais restauration du monastère aurait été plus juste. Cuisine une semaine sur trois. Mia passa rapidement avant de ne plus se contenir. Bibliothèque... Il faudrait qu'elle éclaircisse ce point. Bibliothèque... Jusqu'à présent, elle était seule à s'y rendre. Les autres étudiants disparaissaient par une porte et n'en ressortaient que deux ou trois heures plus tard. Chant.
- Mademoiselle Janlin !
Mia sursauta. Le professeur se tenait près de sa table et la toisait.
- Si mes cours ne vous intéresse pas, il fallait rester chez vous !
Mia replia rapidement son emploi du temps. Elle n'aimait pas se faire remarquer.
- Je suis désolée mons.
Le professeur la coupa en colère.
- Vous êtes désolée ! Permettez moi d'en douter !
Tous les regards étaient braqués sur elle. Mia aurait voulu disparaître sous le plancher. Elle se risqua à regarder son camarade de devant. Ses yeux clignaient chacun leur tour. Ils devaient être sacrément en colère.
- Quand nous ferez-vous l'honneur de votre entière attention ?
Mia allait répondre mais le professeur ne lui laissa pas le temps.
- Je suis certain que des choses plus intéressantes vous attendent à votre maison.
- Non pas vraiment. Mon frère trav.
- Je plains votre frère. Vous devez être un fardeau, bien lourd à porter !
Mia blanchit. Un fardeau... Tout lui revint en mémoire : l'accident, la mort de ses parents, la longue convalescence, et... Ty. Ty toujours distant, froid, indifférent. Ty ne supportant aucun contact, aucun geste tendre. Les silences...et enfin ses rêves brisés. Les larmes se mirent à couler sur ses joues. C'en était trop. Mia se leva brusquement de sa chaise qui grinça, ce qui emplifia les tics de son camarade. Elle ramassa ses affaires. Un crayon tomba et roula près des pieds du professeur. Elle l'ignora et sortit.
Elle traversa un long couloir, descendit une volée d'escaliers et se retrouva dans la cour. Elle respira l'air frais, de cette saison d'automne. Respirer, se calmer. Respirer, se calmer. Son rythme cardiaque commença à ralentir. Elle poursuivit son chemin et se retrouva face à la lourde porte de bois. Elle tenta de l'ouvrir, mais pas moyen. La porte était verrouillée. Mia sentit ses forces la quitter. Elle commençait une nouvelle crise de panique. Son poul accéléra, ses oreilles se mirent à bourdonner, sa tête à tourner. Elle se sentit partir. Impossible de se maîtriser. Elle s'effondra sur les dalles de pierre, inconsciente.

Black HunterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant