La maladie

17 2 4
                                    

J'ouvris les yeux doucement, et pris le temps d'observer le plafond de ma chambre avec attention avant de me décider à me lever et à affronter l'air un peu tiédasse de ma chambre. Je posai mes pieds sur une carpette d'un doux bleu layette et pris dans mon armoire mon uniforme pour travailler.

Il était composé d'un tailleur noir et d'une simple chemise blanche. J'étais une employée de banque et mon travail exigeait que je sois habillée simplement mais avec distinction. Je relevai mes cheveux en un chignon sur le sommet de mon crâne avant de me maquiller avec rapidité.

Cela fait, j'allai dans la cuisine et me servis un grand bol de céréales avec du lait de soja. Je le dégustai avec bonheur avant de me presser un bon verre de jus d'orange. Rempli de vitamines, il m'était indispensable par les temps plus froids qui s'installaient.

Je rangeai mon appartement avant de partir sans hâte vers la gare. Les rues étaient comme d'habitude bien propres mais bondées. Cependant, malgré la foule, aucun contact physique n'était établi entre deux individus ; la bienséance étant qu'il était inconvenable de se toucher dans les lieux publics. Je me glissai dans la foule qui allait comme moi, au sud, prendre le train pour aller au district financier. Sur le trottoir d'en face, ceux qui allaient au nord, vers le métro, se rendaient sûrement dans la zone commerciale de la ville. Aucun bruit de conversation, que le son des centaines de pieds touchant le sol avec lassitude retentissait dans la city.

J'entrai comme bien d'autres dans la gare étincelante de blancheur avant de me rendre sur mon quai. Là, je me postai bien droite pour attendre mon train qui ne devait plus tarder. Je lançai un regard à ma montre avant de relever brusquement la tête à l'entente d'un son proscrit. Un toussotement.

Léger, mais tout de même audible. Je me figeai, il venait de derrière moi, dangereux, fatal. Je fis un mouvement pour m'en éloigner et du coin de l'œil, je vis un jeune homme me faire un sourire d'excuse avant de commettre à nouveau le son interdit, une main sur sa bouche et les yeux brillants. Je me mis à rechercher les autorités du regard, ce garçon était en train de commettre un crime ignoble et personne n'était aux alentours pour l'arrêter. Je glissai la main dans ma poche pour atteindre le boitier qu'elle contenait. J'appuyai avec désespoir dessus, tout en priant que les secours et la police arrivent rapidement. Mes mains tremblaient de peur et je sentis une goutte de sueur couler le long de ma colonne vertébrale.

Heureusement pour moi, les secours ne tardèrent pas. Un drone des forces de l'ordre arriva en émettant des lumières rouge et bleu. Une alarme retentit dans toute la station, et je vis les gens en face de moi, commencer à paniquer avant de se mettre en mouvement pour évacuer les lieux comme le voulait la procédure. Bientôt la gare serait désertée.

Je ne bougeai pas, mais aperçus avec joie les autorités arriver, vêtues d'une combinaison blanche. Ils remarquèrent rapidement, le malfrat à mes côtés et l'emmenèrent sans douceur vers une destination inconnue. Je les regardai s'éloigner, un sentiment de devoir citoyen bien accompli, me comblant. Je vis mon train arriver, et montai dedans une fois qu'il fut arrêté.

Ma routine reprit, et j'oubliai rapidement cet incident. Je rentrai chez moi, une fois mes huit heures de travail effectuées, dinai et allai me coucher. Le lendemain je fis de même, et les jours s'écoulèrent ainsi dans une monotonie bien huilée. Étais-je heureuse ? La question ne se posait pas quand on est autant sur notre belle planète. Je n'étais qu'un engrenage de la grande machine qui est l'humanité. Utile mais pas irremplaçable. En sécurité, jusqu'à ce que le sort ne s'acharne sur moi.

Le destin peut être cruel, et je ne pus que le constater quand lors d'un glacial jour d'hiver, je sentis ma gorge me brûler. Les larmes me montèrent aux yeux. Pas déjà. Je savais que mon jour viendrait, mais j'espérais avoir l'occasion de voir un peu plus le monde avant cette tragique fin. Je me résignai. Je n'exécutai pas ma petite routine pour la première fois de ma vie mais allai plutôt m'assoir dans mon salon, le regard vide pour appuyer sur le petit boitier d'alarme. Je comptai dans ma tête mes dernières secondes de liberté avant que l'on m'emmène là où vont les coupables des mêmes crimes que moi.

J'étais faible, j'étais tombée dans un vice qui n'était plus autorisé de nos jours : la maladie.

Les hommes en blanc arrivèrent et je les suivis sans rouspéter vers une destination qui était drapée de mystère et de rumeurs plus sombres les unes que les autres. Tout ce que je savais, c'était que personne n'en revenait jamais. Je détaillai une dernière fois mon petit appartement et sentis les larmes couler le long de mes joues.

Pourquoi moi ?

La maladieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant