Étape 5 : S'en aller

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— T'es sûr que...

— Rosie, tu es parfaite.

J'ai l'impression d'avoir répété ces mots tout le chemin. C'était moins infernal que d'être séquestré chez Rosie, condamné à assister à un défilé de mode pour l'aider à se décider sur sa tenue, mais mes tympans commencent à souffrir.

En même temps, je ne peux que la comprendre. Aller à une soirée après des mois de repliement sur soi-même ne doit pas être évident, mais le véritable enjeu, c'est les retrouvailles avec ses amis. Après deux semaines passées ensemble, elle a appris à redevenir à peu près à l'aise avec Zora, cependant elle n'a revu personne d'autre. Et comme elle s'incrimine toujours de tous les malheurs du monde, elle ne se croit sûrement pas légitime d'un pardon général. La culpabilité peut parfois donner lieu à des raisonnements absurdes pour quelqu'un de « stable ».

Nous sommes accueillis par Zora, l'organisatrice de la soirée. Un faible sourire se dessine sur le visage de Rosie tandis qu'elle lui tend le bouquet de marguerites que nous sommes allés acheter cet après-midi.

— Tiens, je sais que tu les adores... Joyeux anniversaire.

Sentant l'anxiété de Rosie, Zora sourit largement et l'attire doucement contre elle. Rosie se laisse aller dans ses bras, semblant retrouver un peu de sérénité.

— Salut, Roméo. C'est cool que tu sois venu, déclare Zora en s'écartant de Rosie.

— Merci de m'avoir invité. Et bon anniversaire.

Elle et moi avons eu l'occasion de pas mal discuter ces derniers jours. C'est quelqu'un de bien. Quelqu'un à qui je n'aurai pas peur de laisser Rosie, mon départ se rapprochant irrémédiablement.

De la musique pulse dans les enceintes et une foule endiablée s'est réunie pour danser dans le salon. J'attrape la main de Rosie pour m'assurer qu'elle ne panique pas. Elle semble prendre sur elle et me sourit, passant devant moi pour traverser les groupes d'invités.

Nous ne tardons pas à trouver sa bande d'amis installés sur la terrasse. La pression de la main de Rosie sur la mienne se relâche quand tous la prennent dans leurs bras à tour de rôle, ne masquant par leur bonheur de la retrouver. Ils font tout de même attention à leurs gestes, veillant à ne pas la brusquer, comme si elle était de la porcelaine fragile qu'ils pourraient briser en une embrassade.

Rosie ne lâche pas ma main, alors je ne m'écarte pas, comprenant que c'est de là qu'elle tire le courage nécessaire pour lutter contre l'envie de s'enfuir à toutes jambes.

Tous les amis de Rosie essaient de la mettre à l'aise. Zora ne tarde pas à venir compléter le cercle, et nous passons la demi-heure suivante à discuter. Rosie prend la parole de temps en temps ; sans trop s'étaler, elle parvient tout de même à tenir une conversation sans trembler. À force, elle semble même y prendre du plaisir.

Petit à petit, je m'efface, restant silencieux dans mon coin. Bientôt, je disparaîtrai du tableau. J'ai décidé de rester pour la semaine de rentrée, conscient que ça va être un bouleversement pour Rosie qui a pris la décision d'essayer de retourner en cours. Comme c'est moi qui l'y ai poussé, je voulais être présent pour cette étape. Même si elle y était réfractaire au début, sachant que ma présence ici supposerait que je rate ma propre rentrée, mais elle n'a pas trop lutté non plus, ce qui prouve qu'elle a besoin de moi.

Mon envol sera plus doux. Et même si ma gorge se serre à l'idée de quitter cette rousse attachante, je suis fier du chemin parcouru et j'ai hâte de venir en aide à une nouvelle adolescente.

Rosie se tend à nouveau à l'évocation d'une personne dont je n'ai jamais entendu parler :

— Nicolas vient finalement ?

MISSION SÉDUCTION - PREQUEL + PREMIERS CHAPITRESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant