1. the typewriter

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(🎶/ Any other world - Mika)

Lainey Jews
Lundi 3 septembre 2018

Mon nom est Lainey Jews et je pense au plus profond de moi-même que la vie m'en veut. Ne voulant pas continuer à habiter dans la maison où j'ai grandi, hantée par les fantômes de mes parents récemment décédés, j'ai décidé d'emménager dans le cœur de Londres, et plus précisément dans un petit appartement avec une colocataire. Mais celui-ci se trouve dans une ruelle étroite qui empêche l'accès du camion de déménagement. Les deux hommes entre lesquelles je me trouve entassée se lancent un regard interloqué avant de hausser les épaules d'un mouvement presque synchronisé.

Ils me reposent la question, « Êtes-vous certaine que vous ne voulez pas de notre aide ? », mais je suis contrainte de refuser. La pluie qui bat fort contre le pare-brise est le seul bruit qui comble le silence un peu gênant qui s'est installé. Je suis orpheline, je dois faire attention au moindre sou, donc je ne peux pas me permettre la main d'œuvre. L'homme au volant abaisse sa vitre pour allumer une cigarette. Je meurs d'envie de lui demander de tirer un coup. Je me dis que ce serait un peu déplacé, mais je finis tout de même par le faire. C'est ainsi que je me retrouve en pleine rafale de pluie coincée entre deux gros déménageurs dans leur camion en train de leur faire la discussion, une cigarette entre les doigts.

Mais parce que la vie ne serait pas marrante si elle ne m'apportait pas quelques coups de pouce de temps en temps, les deux hommes finissent par avoir pitié de moi et décident de m'aider sans compter de frais supplémentaires.

Mes quelques meubles ne sont pas très lourds, mais les transporter sous la pluie battante jusque dans le vestibule de l'immeuble est un vrai combat. Pantelante, j'écarte mes cheveux trempés de devant mes yeux pour repérer le nom Hemelton entre les sonnettes.

Dès le premier tintement, la voix un peu éraillée d'une fille s'élève dans l'interphone. Elle s'empresse de nous ouvrir dès que je lui révèle mon identité. Au fond du couloir, j'aperçois une porte métallique réconfortante. Du coup, avec ma lampe sous le bras et mon gros sac sur le dos, je me précipite vers l'ascenseur. En panne. Je jure intérieurement. Évidemment ça tombe toujours sur moi. J'aurais bien besoin d'une cigarette. Non, j'ai trois étages à monter. Avec une clope au bec, je ne vais même pas réussir à gravir la cinquième marche.

Arrivée en haut, les deux gros déménageurs sur les talons, j'ai presque envie de jeter mes affaires par la fenêtre. Ce qui ne serait pas très intelligent vu que mes efforts seraient réduits à néant. Et ce n'est pas terminé. Il y a encore certaines choses dans le camion. Mais par chance, ma nouvelle colocataire Spencer se montre considérablement amicale et enfile son imper pour nous aider à monter ce qui reste. Ensemble, nous parvenons à porter les morceaux de mon lit ainsi que ma table de chevet. Je n'ai pas emporté grand-chose de mon ancienne maison. J'ai stocké le reste du mobilier dans un hangar, le temps de décider ce que je vais en faire. À mon avis je les vendrai si un jour j'ai besoin d'argent. Ce qui n'est heureusement pas encore le cas. Grâce aux revenus sociaux, je n'ai pas à m'en faire pour l'instant, bien que j'hésite à prendre un job à côté pour arrondir mes fins de mois.

Tout est désormais entassé au milieu du salon, mais au moins je n'ai plus aucun étage à monter. Spencer remercie les deux hommes en leur offrant une boîte de biscuits avant qu'ils s'en aillent.

« Tu permets ? » je demande en m'affalant dans le canapé.

« Fais comme chez toi. » Répond-elle en rigolant. Elle ouvre une armoire et me tend une couverture. « Tu veux une tasse de thé ? »

J'accepte et la remercie. Depuis la cuisine, Spencer m'avoue qu'elle est soulagée que j'aie si vite répondu à l'annonce. Car elle vient d'arriver aussi et le fait qu'on soit deux à se partager le loyer apaise ses frais.

The silent crash Où les histoires vivent. Découvrez maintenant