Colère

15 1 3
                                    

Lorsqu'il se lève le matin, il se sent comme vide. Cela fait depuis plusieurs années qu'il ressent ce profond manque de joie avant la rentrée scolaire.

En réalité, pas vraiment s'il réfléchi bien. Il n'a pas toujours vécu ça. S'il prend le temps de se souvenir, cet enfant ne vis ça que depuis la primaire... la quatrième primaire pour être exact, à peu de choses près. Quand il vivait dans l'ignorance... quand il pensait avoir des amis... quand il ne reconnaissait pas la méchanceté de l'Homme sur ses semblables... là, la vie était plus belle.

En faite, non. Elle ne l'était pas non plus. Chaque fois qu'il allait chez elle, il ne le savais pas mais en réalité il était triste. Eh oui... encore une fois, l'ignorance joue bien son rôle : il vivait naïvement dans une réalité magnifié qui portait un faux masque. Quand il y repense, rien ne semble réel. Quand il repense à ce qu'elle a fait... une vraie calamité, une enfant du diable, un démon qui s'immisce dans vos idées les plus noires et les plus sombres avant de les ressortir en arrachant vos entrailles, en jubilant devant ce spectacle ignoble qu'est la tristesse, ce même sentiment qu'elle vous afflige tel un coup d'épée dans votre cœur, cette même scène qu'elle s'amuse à montrer et démontrer devant vos proches, ces mêmes personnes qui ne semblent pas agir directement, apeurés par ce terrible drame qui se passe sous leurs yeux mais qui, la seconde suivante, viennent en faux-amis en vous demandant si tout va bien et si vous voulez boire quelque chose parce que dehors, il fait froid...

La vie n'est qu'une suite d'épreuves sans fin, une suite d'étapes de plus en plus dures... toujours plus dures... infligées par une personne sensée être proche, une personne qui, déguisé en démon, joue aussi le faux-ami... tout ça pour quoi ? En général, ce genre de créatures se suffisent devant le cadavre de votre joie de vivre... mais dans ce cas ci, l'argent joue aussi un triste premier rôle. Elle aime ça, l'argent. '' Regardez moi ! J'ai plein d'argent ! Regardez donc, chiens que vous êtes ! Je peux tout faire, contrairement à vous ! Admirez comment je vous méprise, comment je vous tiens, larves que vous êtes ! La vie m'a choisi, elle est belle et j'en profite sur votre dos, sur votre tristesse, sur vos propres démons ! Ces mêmes démons que vous vous entêtez à créer ! Je vous méprise, je vous crache dessus ! Reculez donc, vous me dégoutez ! ''

Certains utilisent toutes sorte de moyens pour se donner de l'importance, pense l'enfant. En faite, l'enfant ne sait pas. Il ne connais pas ses véritables motivations, mais à chaque fois qu'elle l'a menacée étant petit, chaque fois qu'elle était contrariée, il eu le temps d'y réfléchir en ravalant ses propres larmes. Il eu le temps d'apprendre à souffrir en silence, à sangloter dans ses draps, à repenser à tout ce qu'elle lui disait quand elle était en colère. Il n'eu que trop de temps pour y réfléchir. Ce démon qui a longtemps rodé autour de lui, lui largement appris que la vie est injuste. Sa propre mémoire l'a épargné d'une bonne partie des diverses menaces qu'elle a proféré, en brandissant son poing comme si elle était prête à lui arracher chaque dents, une à une...

Étant petit, il oubliait beaucoup de choses... où il avait mis tel objet, ce qu'il a dit à l'une ou l'autre personne... il oubliais et ne s'en souciait guère... mais ce monstre a cru que l'enfant se jouait de lui... alors, elle lui disait toute sorte de choses atroces, qui ne se disent pas à un enfant. '' si tu continues de me mentir, je te ferai avaler une cigarette '' ou encore '' je peux lire ton âme comme dans un livre ouvert, et je vois dans tes yeux que tu me ments ! '' Mais c'était faux, il ne mentait pas. Il ne lui mentais jamais quand elle avait ce regard de fou, ces yeux emplis de haine tel un bourreau qui attend de découper la chair fraîche de sa prochaine victime.

Heureusement que malgré la nuit noire, malgré cette tristesse, ce vide intérieur qu'il ressentait souvent seul, une lueur subsistait. Sans cette lueur d'espoir, sa vie serait différente, elle serait sans une once de joie, ces bons moments vécus à tenter d'oublier le triste passer n'auraient jamais pu avoir lieu. Cette petite étincelle a pris de l'ampleur avec le temps et beaucoup d'énergie pour finalement devenir une véritable flamme grâce à celui que l'on appellera le Sauveur. Sans lui, l'enfant ne serait rien. Il n'aurait pu apprendre à connaître le véritable amour. Il n'aurait jamais pu être fière de quelqu'un, fière de son propre sang, de sa propre existence... C'est avec lui qu'il a appris, et qu'il continu d'apprendre cette formidable expression où la plume est dite plus puissante que l'épée. Son Sauveur... il mérite tellement plus que de simples remerciements... si seulement il pouvait lui offrir tout ce dont il a besoin sans rien recevoir en retour, puisqu'il estime avoir largement assez reçu de la part de l'adulte : cet homme lui a offert le vie. L'enfant à déjà pensé dur comme fer que sans sa propre existence, son sauveur aurait plus de choses dans la vie : il aurait certainement pu avoir une femme idéale, des enfants, une maison, des loisirs... quand il était petit, il a d'abord cru qu'il pourrait rassembler démon et sauveur. Durant des années l'enfant y cru... comme si l'on pouvait mélanger les loups et les brebis dans un même enclos, pensant que tout ce passera bien... c'est ridicule vous dites ? Bien sûr que ça l'est, mais pensez-vous réellement qu'un enfant aurait le même point de vue que vous ? Pensez-vous qu'un naïf pourrait seulement apercevoir la pourriture de l'âme d'une personne portant un simple masque ? Peut être que certains auraient senti cette odeur de chair putréfiée, mais l'enfant n'a rien aperçu de tout cela. Il a seulement vu une personne colérique et qui s'emporte facilement dans les extrêmes... malgré toutes les fois où cette 'chose' lui a ordonné de faire ses valises, alors qu'il était en larmes et qu'il suppliait au démon d'épargner un tel supplice, de ne pas l'abandonner dans la rue, en pleine nuit d'hivers, d'automne, ou même d'été... parce qu'elle tenait pour lui... parce qu'elle aussi l'aimait... Non. C'est faux, l'enfant a pensé qu'elle l'aimait. Il pensait qu'elle était attachée à lui comme il l'était pour elle. Penser... penser... penser, c'est bon pour les croyants. Il cru prier et aimer un Dieu qui n'existe pas car cette même divinité était déguisée en Diable. Un démon qui chasse un enfant de sa propre maison, pour une simple histoire à deux sous... un prétexte, finalement. Il ne doute plus de sa théorie, il en est sûr à présent.

Même des années après cela, l'enfant se souvient et il éprouve de la colère.

L'enfant se souvientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant