Amoa - Hétérochrome

Chapitre 1

Chapitre premier

Je contemple mon plafond, il est blanc et a quelques petites fissures par endroits. Je déteste cette vue, celle d'un plafond blanc au réveil. J'ai toujours rêvé d'ouvrir mes yeux et voir le ciel, bleu, avec quelques taches de blanc tout de même. Et de me coucher le soir sous les étoiles, fermer les yeux et me savoir en sécurité. Je ne me sens jamais en sécurité chez moi, en réalité je ne me sens en sécurité nulle part.

Cette peur constante que j'aie dans le ventre c'est à cause de mon père. Il nous a laissé à ma naissance, peut-être avait-il honte de moi, ou de ma mère ? Dans tous les cas je ne l'ai jamais connu et je ne le souhaite pas. Je me suis toujours dit que ma vie était avec ma maman et mon frère, pardon, mon demi-frère, Louis. Ma mère s'est mise en couple quelques années après ma naissance, ils ont eu Louis ensemble mais il nous a quitté, lui aussi, laissant maman seule pour gérer un enfant en bas âge et un nouveau-né.

Aujourd'hui j'ai seize ans et louis dix. Ma mère ne s'est jamais remise en couple, elle a eu des petites aventures mais jamais sérieuses, je pense qu'elle a peur de se remettre dans une relation si c'est pour souffrir de nouveau.

Mes yeux floutés à cause de l'émotion qui me submerge, car quand j'y pense beaucoup d'émotions surviennent, je décide de me lever de mon lit et de me dépêcher pour ne pas, encore une fois, être en retard.

Depuis le départ d'Alba ma meilleure amie, ma confidente, sœur de cœur, je me sens plus seule que jamais. J'ai du mal à aller au lycée maintenant. Elle revient dans deux mois – deux mois, deux mois, deux mois, deux mois... - cette date résonne dans ma tête, tel un tambour qui ne s'arrête plus.

Je file sous la douche, j'entends les sanglots de ma mère qui a sa chambre juste à côté de la salle de bain. Je sais que toute cette vie la fatigue.

Arrivée dans la cuisine, je fais chauffer le bol de lait pour Louis, puis je grille du pain pour maman et moi. Quand elle arrive, elle s'assoit sur la table de la cuisine, elle a les yeux rouges, un mouchoir en tissu bleu à carreaux à la main.

- Ça va ? lui dis-je.

- Louis est prêt ?

- Maman, tu sais que je suis là si tu...

Je n'ai pas le temps de finir ma phrase qu'elle me crie presque dessus.

- Tu sais que je n'aime pas en parler, Louis est-il prêt ?

- Oui.

Voilà les simples mots que ma mère prononce chaque matin, quelquefois je ne lui pose pas la question car je sais ce qu'elle va me répondre et je sais que ça ne mènera à rien, mais j'ai toujours l'espoir qu'elle vide son sac un jour.

En remontant dans ma chambre je prends un sweat, mon portable, mes écouteurs et mon sac. Je passe voir Louis dans sa chambre, pour lui dire d'aller rejoindre maman pour qu'elle l'emmène à l'école. Je descends les escaliers quatre à quatre, claque la porte et trace. Je cours à mon arrêt pour ne pas louper mon bus et aller au lycée à pieds, cela me prendrait un temps fou. J'arriverais en retard pour ma première heure de cours, ce qui n'est pas très bien, vu toutes les absences que j'ai depuis la rentrée, à cause des nombreux appels de ma mère pour m'occuper de mon frère.

J'arrive finalement à temps, sors-les écouteurs de ma poche, les enfonce dans mes oreilles et lance la meilleure musique de tous les temps : idontwannabeyouanymore

A l'heure du déjeuner, je m'installe sur la même petite table pouvant comporter maximum deux personnes. Alba devrait être là, face à moi, à rigoler, me raconter son cours de physiques (qu'elle déteste). Mais non, cette fois je laisse place à Enguerrand, c'est mon meilleur ami. Je le connais depuis le début de l'année, c'est une amitié différente de celle d'Alba. Il est drôle et se préoccupe beaucoup de moi, il est tout de suite venu me voir pour apprendre à me connaitre et il s'est intéressé à ma vie. Ça faisait du bien de parler de ce que je vis à la maison à une personne extérieure, je sais que Alba comprend ce que je vis sachant qu'elle vit seule avec sa mère depuis toute petite.