De retour à la vraie vie

4. « Papa!!!!! »

Flo'

Oli! J'ai vu ton mot, t'étais pas obligé de partir hein! |10:30

Atten Flo jte repon plu tar en train dfair mais course | 10:31

Je repose mon téléphone dans ma poche, vous à t-on déjà parler de la difficulté d'écrire un message avec un sac cabas dans une main, et un paquet de PQ 30 rouleaux + 16 gratis dans l'autre?
Heureusement pour moi, le mardi matin à cette heure y'a très peu de monde.
Je me dirige vers le rayon où il y'a du riz. Le chic-chic c'est le meilleur.
Un petit garçon se trouve devant moi, seul, il me scrute attentivement, attendant peut être une réaction de ma part, mais, pour quelle raison? Soudain, il se jette sur moi en criant:

-" Papa!!!!"

Quoi?
J'ai raté un épisode là.

Une jeune fille arrive en courant et se penche vers le petit garçon, toujours accroché à moi (et à mes rouleaux de PQ bah oui, ça prend de la place)

-" Evan...."

Elle récupére le garçon et me regarde, gênée.

-" Excusez moi pour le dérangement, Evan prend tous les hommes de plus de 18 ans pour son père...Je vous avoue que ça cause quelques problèmes au quotidien."

Elle a essayée de prendre un ton plutôt assuré, mais ça ne va pas avec sa silouhette fluette, ses yeux bleus assez grands et ses cheveux bruns emmêlés. Elle est extrêmement maigre et paraît très vulnérable. Je pourrais lui donner 16 ans, mais vu le fait que son petit garçon semble avoir 3-4 ans c'est peu plausible.
Je ne juge pas, à chaque femme son choix, et si ce n'en ai pas un, gérer un enfant si jeune ne doit être facile.
Ça se trouve ce n'est même pas son fils, encore une fois, je pars trop loin dans mes réflexions.

-" Pas de soucis, si ce n'est pas indiscret, vous êtes la mère de cet enfant?"

Elle me regarde avec méfiance. D'accord c'est indiscret. Pourquoi j'ai poser cette question d'ailleurs?

-" Excusez moi, je n'aurais pas dû demander ça.

- Oui c'est mon fils."

Sur ces mots, elle me tourne le dos, accompagnée de son fils, et repart vers le rayon fruits et légumes.

Étrange.

Quant à moi, toujours accompagné de mon PQ, je me dirige vers la caisse.

Flo'

Bon t'as fini tes courses là? | 10:40

OLI, OLI, OLI!! | 10:50

SI DANS 5 MINUTES TU REPONDS PAS J'VAIS L'DIRE À MA MERE | 10:55

Mon frère, et sa délicatesse.

Chuis là | 10:59

Bon, pourquoi t'es parti ce matin sale con |11:00

Mon frère et sa délicatesse, #2

J'avais des courses à faire | 11:01
Je voulais pas vous déranger en plein débat | 11:01
Qui a gagné la bataille de chatouilles ? |11:02

Les courses ça peut attendre, t'as même pas manger | 11:03
LES CEREALES AVANT LE LAIT | 11:03
Moi évidemment ^^ | 11:04

Le PQ n'attend jamais (les lots de 30 + 16 gratis partent vite Flo) | 11:05
Après... | 11:05
C'est ce qu'on dis ^^ |11:06

Irrécupérable |11:07
OCTOGONE DIRECT | 11:07
T'as qu'à demander à Mande si tu m'crois pas ;) | 11:08

PARDON?? C'EST À MOI QUE TU DIS ÇA? | 11:09
J't'attends ;) | 11:10
Son 06? | 11:10

À toi et à toi seul :) | 11:10
Moi aussi |11:10
T'AS CRU SALE GOSSE | 11:11

Je met mon téléphone en veille et le pose sur ma table basse. Les conversations avec Flo peuvent être interminables, surtout quand on est lancé, t'façon il avouera jamais qu'il craint les chatouilles, vraiment vraiment beaucoup. Quand on était petit je gagnais tout le temps, alala il a dû mal le vivre le pauvre petit...

Ma trompette posée près de ma télé attire mon attention. Les images défilent dans ma tête, de mon premier cours, au Bercy, devant 15 000 personnes. Les bons souvenirs du conservatoire, les cours de solfège de 2 heures, à intégrer chaque truc que pouvait dire le prof, les cours où je me suis endormi, aussi, à cause de la fatigue parce que j'avais passé la nuit à écrire.
Cet instrument que j'aime tant.
Sans vraiment réfléchir, je l'attrape, et la sort de son étui. Je la fixe pendant des minutes qui me paraissent des heures, à appuyer sur les piston, en me demandant si je suis toujours capable d'en jouer. Car la dernière fois que je l'ai touchée, c'était à Bercy, ça fait très longtemps que je n'est pas fait de trompette en dehors de la scène.

Je monte mon pupitre et attrape quelques partitions que je dispose sur celui-ci. Parmi le tas de partition que j'ai pris, une attire mon regard. Un concerto en mi bémol majeur pour trompette, de Haydn. Le premier vrai concerto que j'ai joué. Et qui puis est, mon préféré. Je ne réfléchi pas plus, je porte ma trompette à ma bouche, et joue. Je me laisse submerger par toutes les émotions que me procurent ce morceau, mais surtout la trompette, je me concentre sur mes doigts, qui reprenne leurs bonnes habitudes sur les pistons. Je ne pense pas aux voisins, qui risquent de ne pas apprécier, j'oublie la pression de la vie d'artiste, tout ce à quoi je suis confronté, pour une fois, aucun questions ne traîne dans mon esprit, je laisse seulement le son de la trompette m'inprégner entièrement. Je ne me suis jamais senti aussi bien depuis quelques temps.