CHAPITRE I - Quand Tout Commence Mal

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Shona

Je me réveille lentement, ouvrant les yeux avec difficulté. Des points noirs et blancs s'entremêlent devant mes iris et je dois fermer les paupières, aveuglée par la lumière extérieure. Je sens alors mon corps fatigué et fourbu rouler sur le côté sans que j'ai esquissé le moindre geste. Ma tête rentre en contact avec une matière solide, ce qui me fait immédiatement ouvrir les yeux et gémir de douleur. Je porte une main à mon front tout en me relevant doucement, les yeux plissés et je découvre que je me trouve dans ce qui semble être la cale d'un bateau, ce qui expliquerait le roulis et la sensation de nausée logée dans mon estomac. Alors que je tente de me lever je découvre avec horreur que mes chevilles ainsi que mes poignets sont entravés par des chaînes. Ce n'est qu'à ce moment-là que je découvre également l'état de mon corps ; je suis habillée d'une robe qui semble avoir été déchirée qui ne couvre mes jambes qu'à mi-cuisses et qui dévoile mes membres couverts de coupures, de bleus, de cicatrices et de sang. Je me rends compte que mes bras sont dans le même état et j'esquisse une grimace en soulevant ma robe et en voyant une cicatrice fraîchement refermée, rougie par le sang et légèrement boursouflée qui longe ma hanche gauche de haut en bas. Bien que je me trouve dans un état de panique avancée, me retrouvant dans un navire probablement ennemi, enchaînée et couverte de blessure, je ne cède pas à la peur ni au désespoir et tente de trouver un moyen de me sortir de là.

Tout d'abord, il serait utile que je me souvienne comment je me suis retrouvée dans cette situation. Je remonte aussi loin que je peux dans ma mémoire et la dernière chose dont je me souvienne est d'avoir parié contre Keith sa hache de guerre que je pouvais toucher ma cible même les yeux fermés et que nous n'avions pas pu mener à terme ce pari car sa mégère de nourrice nous l'avait interdit et nous avait obligés à aller remplir les abreuvoirs des bêtes pour nous occuper. D'ordinaire, personne n'osait donner des ordres ni à Keith ni à moi de peur de perdre l'usage de ses mains mais ce n'était pas le cas de la nourrice Hedda qui nous supporte depuis que nous sommes nés, ma mère étant morte en couche et la mère de Keith étant trop occupée à se faire belle. Elle et moi étions les seules à avoir toujours traité le fils du laird du clan MacLaine de Lochbuie, raccourcit en MacLaine, en homme normal et cela l'amusait plus qu'autre chose. Je me souviens donc que mon ami Keith et moi étions en train de la faire tourner en bourrique en se renversant la moitié des seaux d'eau l'un sur l'autre et puis après plus rien. Plus rien ... le trou noir ... comment ça plus rien ? Ce n'est pas possible de ne pas se souvenir d'une chose aussi importante qu'un enlèvement, surtout le mien ! Je suis pourtant l'une des meilleures guerrières du clan, j'imagine mal comment j'ai pu tomber ainsi dans les bras de l'ennemi. Parce qu'il me semble à présent certain que ce navire est un vaisseau ennemi ; le bois avec lequel ils l'ont construit n'est pas le même que celui de nos forêts, de plus je ne reconnais pas du tout l'architecture de celui-ci. Encore perdue dans mes pensées, des bruits de pas se font entendre derrière la porte et j'entends une clé glisser dans la serrure.

Je me redresse autant que je le peux, tenant à garder un minimum de dignité et de fierté mais je ne peux empêcher mon visage de blanchir à la vue de qui se tient devant moi. Un viking ... je me suis faite enlever par des vikings. Je me gifle intérieurement, en colère contre moi-même d'avoir pu me faire attraper par ces hommes, s'apparentant plus à des bêtes. Celui qui se trouve devant moi doit avoir la quarantaine et est tellement immense qu'il peine à passer la porte qui est pourtant d'une hauteur tout à fait respectable. Son crâne chauve est recouvert de tatouages primitifs faits à l'encre noire et bleue et une longue barbe rêche, blonde et sale lui mange la moitié du visage. Enfin, ses yeux bleus perçants comme la glace me fixent et semblent vouloir lire dans mon âme. Contre toute attente il ne semble pas avoir d'intention hostile à mon égard et paraît même plutôt amusé de la situation. Je lui lance le regard le plus noir que je peux, lui transmettant toute ma fureur et ma hargne envers lui et ses semblables.

La prisonnière des VikingsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant