prologue

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Comme tous les jours, je longe la rambarde du pont pour rentrer chez moi. A chaque fois que je suis là, mes pensées sont irrémédiablement attirées par l'eau sombre de la rivière. On dirait qu'elle m'appelle à elle, comme une vieille amie. Ce signal est de plus en plus fort, mais je tente de le réprimer, comme toujours. Je continue de marcher en essayant, tant bien que mal, de penser à autre chose. En vain. Je me mets soudain à pleurer pour une raison que j'ignore. Je lâche mon sac de cours et tombe à genoux. Je suis seule, personne ne passe jamais par là. Le pont n'est jamais éclairé, et il n'y a pas d'habitations dans les environs. C'est un raccourci pour rentrer chez moi, qui me permets de ne croiser pas âme qui vive.
Je m'approche de la rambarde et regarde en bas l'eau assombrie par l'heure tardive.
Il me suffirait de sauter pour enfin mettre un terme à tout ce que je vis. Je n'aurai alors plus à faire face à tous ces gens et ils me laisseront enfin.

Je l'enjambe donc et passe de l'autre côté instinctivement. J'ai cette impression que quelqu'un me parle dans mon dos mais je n'y prête pas attention. Je vais en finir maintenant, une bonne fois pour toutes. Pourquoi continuer quand on ne ressent plus ni espoir ni amour? A quoi bon vivre quand personne ne veut de vous?

Je me laisse tomber, le sourire aux lèvres. J'aurai dû le faire depuis longtemps maintenant. J'entre vite en contact avec l'eau. Elle n'est pas comme je l'avais imaginé : froide, inhospitalière. Au contraire, elle est tiède et accueillante. Je vois une forme floue nager vers moi et m'emmener avec elle au fond. Juste avant de fermer les yeux, je sens une main se fermer sur mon poignet et me tirer vers la surface.


Double métamorphoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant