Une fille, un pot de nutella

Premier et dernier chapitre

Monologue enflammé sur le fait de refuser d'admettre une fatalité ou la relation étrange d'une jeune fille et d'un pot de nutella

C'est le grand jour.
Je tremble d'un mélange explosif d'impatience et de stress. D'enthousiasme et de crainte.
Et si il me rejette ?
Si nous n'étions pas fait l'un pour l'autre ?

Je l'ai toujours admiré, il est si beau sous le feu des projecteurs dans les publicités à la télévision. J'ai peur de ne pas être à la hauteur. Je ne suis qu'une fille ordinaire et lui, une star.
Et si... j'étais allergique aux arachides ?
Non ! Ne pense pas à ce qui pourrait mal tourner ! Pousse ton cadis et va lui avouer tes sentiments !

Je dansais d'un pied sur l'autre. J'inspirai. J'expirais.
Le regard plein de détermination, je m'élançais enfin vers LE rayon. Son rayon.

Je lui avais parlé la première fois sur son compte Facebook. Il me plaisait. Je lui plaisais.
Nous avions organisé cette rencontre.

Je n'aurai pas supporté de le décevoir. Heureusement nous nous étions tout de suite bien entendus. Il était évident que le courant passé bien entre nous.
Son prix ne me rebutait pas et il acceptait ma maladresse.
Même quand par mégarde, j'avais brisé un de ses si jolis pots.
Je les collectionnais d'ailleurs. Nous approchions du centième pot. Il n'y pas à dire nous formions un beau couple.
C'était devenu un douce routine pour moi d'aller chercher mon pot de nutella format familial, mon cher et tendre nutella...

Nous avions passé des moments extraordinaires ensemble. Nous avons ris, pleuré, discuté ensemble. Nous nous étions disputés même parfois, quand la balance s'en mêlait.
Mais toujours nous nous étions réconciliés. Il est tout pour moi, il a toujours su m'écouter, me réconforter...

Je l'aime.
Et lui aussi il m'aime.

C'est ce que je croyais.
Pourtant un jour que j'allais le chercher dans mon placard il ne me sembla pas dans son assiette.
Je tentais de lui demander ce qui n'allait pas. J'allais l'ouvrir pour trouver la solution à son mutisme obstiné.
Mais voilà.
Il ne s'ouvrait pas.

Désespérée, je me lancée dans un discours enflammé :

- Pourquoi tu me fais ça ?! Je croyais qu'on s'entendait bien tout les deux, que ça marchait entre nous !
J'avais... j'avais confiance en toi... Je pensais que toi aussi tu avais confiance en moi ...
Je me suis souvent confiée à toi alors pourquoi refuses-tu de t'ouvrir à moi ??
Je croyais qu'il y avait vraiment quelque chose entre nous ! Quelque chose de sérieux ! Pour moi notre relation était claire comme de l'huile de palme ! Je me suis visiblement trompée...
Je suis prête à attraper un diabète pour toi ! Et toi, tu me rejettes sans un mot ?! Comme une personne intolérante au lactose te rejetterai...
Maintenant j'ai l'impression qu'il y a comme un opercule entre nous... Tu comprends ?
J'ai le sentiment qu'il y a un obstacle entre toi et moi, c'est difficile à exprimer. Ce serai semblable à un bouchon qui refuserai de s'ouvrir... des sentiments qui restent bloqués dans l'inaccessibilité de ton bocal.

Je me taisais soudain.
Guettant sa réaction.
Qu'est-ce qui m'a pris ? Suis-je allée trop loin ?

Il restait toujours de marbre. Aussi immobile qu'un pot en verre banal. Il ne semblait pas près de sortir de son silence.

Je soupirais, brisée.
Je m'apprêtai à partir en pleurant, le laissant en plan. Mon cœur meurtri ne supportait plus ce silence lourd.
« Réponds moi ! » je voulais hurler.
Le sang battait à mes tempes, mon cœur s'affolait en martelant ma cage thoracique de « boum boum » lancinants.

J'allais prendre mes jambes à mon cou mais je vis une larme graisseuse couler de son bocal.

Alors il souffre de ce silence lui aussi ?

Saisi d'un élan d'espoir fou je le pris dans mes bras tendu, le plaçant à la hauteur de mon visage et d'un air plus sérieux que jamais je prononçais ces mots :

- Je ne peux pas te laisser dans un tel état. Tu ne m'empêcheras pas de t'ouvrir ! Je t'aiderais ! Que tu le veuilles ou non. Même si tu dois me détester, je te ferai passer avant notre amour ! Que tu te sentes bien est ma priorité numbeurre one ! Tu passes avant mon envie que nos sentiments soit réciproques... Maintenant laisse moi aller chercher un couteau, un ouvre-boîte, n'importe quoi !

Il m'avait retenu. M'adressant une étiquette baignée de larmes grasses mais souriante, il m'expliqua qu'il ne supportait plus ce qu'il était.
Il était tellement célèbre pourtant il se détestait.

A cause de lui, on rasait des forêts. Tout ça pour produire cette infâme huile de palme dont il était rempli ! Et que dire de la quantité de sucre extravagante qu'il faisait ingérer à ses consommateurs.
Et les risques pour la santé, diabète, crise de foie, obésité...
Il était nocif pour la planète.
Nocif pour ses consommateurs.
Pourtant il était aimé.

Comment supportait l'horreur de cet amour ? Il ne s'en sentait pas digne.
Et il m'empoisonnait, moi, à petit feu.
Il disait être toxique pour moi.
Que notre relation appuyée ne pouvait plus durée car elle me mènerai à une mort précoce.
Qu'il tenait trop à moi pour me faire souffrir.
Qu'il tenait trop à l'humanité.
Trop à la Terre.
C'est vrai qu'il avait toujours était fan d'Earth-chan.

Je voulais lui dire « je suis prête à accepter les conséquences sur mon organisme » mais il le savait déjà.
Il se dégoûtait de faire du mal aux autres, aux hommes, aux arbres, aux animaux...
à moi. Toujours.

Alors ensemble nous nous sommes battus. Nous avons racheté les droits de la marque nutella après notre mariage.
Ensemble, nous avons créé le nutella bio, avec exactement le même goût que l'ancien mais bon pour la santé.
Les bénéfices générés par ses ventes reviennent maintenant à des associations de sauvegarde de la planète ou à des organisations humanitaires.
Bien entendu, nous avons créé des gammes de nutella sans lactose ou sans noisettes pour tout les allergiques spoliés de cette délicieuse pâte à tartiner.
Nous avons même trouvé là recette d'un nutella pour diabétique ou plus extraordinaire : une recette d'un nutella goût banana split.
Il y en a pour tout les goûts !

Quant à notre relation... elle s'épanouit.
Nous nous sommes donc mariés. Finalement nous nous étions réconciliés, il s'était enfin ouvert. Le dernier bocal du nutella original que j'avais mangé. Pour me venger de cet ascenseur émotionnel qu'il m'avait fait subir, je l'avais ouvert en lui donnant une fessée... ET OH MON DIEU ON ARRÊTE TOUT ! CETTE HISTOIRE COMMENCE À PARTIR DANGEREUSEMENT EN LEMON !!

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Et bah... c'est fou le temps que ça m'as pris pour écrire une connerie pareille.
Le pire c'est qu'à un moment je me sentais vachement triste pour la fille et le nutella xD
C'est pour ça que j'ai fait un happy end !