Chapitre 55

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Le froid glacial fut la première perception qu'ils eurent de leur environnement. L'odeur des sapins emplissait l'atmosphère, et les arbres les protégeaient un peu du vent.

Oréa les avait transportés en pleine montagne, dans un bosquet de résineux. Ils s'enfonçaient jusqu'aux genoux dans la poudreuse. Pieds nus, et seulement vêtue de sa courte tunique, Satia se sentait déjà frigorifiée.

–Où sommes-nous ? demanda Altaïr, perplexe.

Vous m'avez demandé un refuge ! protesta Oréa.

–Dans les montagnes étincelantes, répondit Aioros. Sur Massilia. A dix jours de marche de la cité la plus proche.

Si tu as une bonne nouvelle Saeros, c'est maintenant.

Un Refuge est tout proche.

La déception vouta les jeunes gens. Examinant le ciel où trainaient paresseusement quelques cumulus, le Messager ajouta :

–Mettons-nous en route sans tarder. Une tempête se prépare.

–Mais le ciel est bleu ! protesta Itzal.

–Le temps change vite. Vois les écharpes de brume autour du pic Agate. Il y a un refuge tout près. Saeros nous guidera.

Ils n'étaient pas équipés pour une escapade à haute altitude ; le Messager Aioros découpa l'une de leurs capes pour les pieds nus de la Durckma. Altaïr lui prêta la sienne afin qu'elle put s'y envelopper. Une chaleur bienvenue qui la réconforta.

Guidés par Aioros, ils se mirent en route. Altaïr suivait avec Sanae et Satia, tandis qu'Itzal et Laria fermaient la marche, trainant sur leurs épaules un Lucas toujours inconscient.

Après plusieurs minutes d'une marche épuisante, le vent forcit, leur ôtant toute chaleur. Si la Durckma avait admiré les grandes étendues immaculées de la vallée, elle regrettait qu'aucun arbre ne les protège plus du vent glacial.

À l'aide ! Au secours !

Itzal s'arrêta brusquement.

–Qu'y-a-t-il ? s'impatienta Laria.

–J'entends... (il secoua la tête). Je dois y aller.

Le Massilien lâcha Lucas, que Laria récupéra avec une bordée de jurons, et s'envola après quelques pas d'élan.

–Itzal ! Reviens ! hurla la Guerrière de Perles.

Qu'est-ce qu'il lui prenait ?

Le Messager Aioros demanda à Altaïr de venir en aide à la Guerrière de Perles. Des flocons tourbillonnèrent. Soucieux, il leur fit accélérer le pas.

–Et Itzal ? On ne peut l'abandonner ainsi ! s'offusqua Laria.

–C'est lui qui nous quitte, nuança Aioros. Ne t'inquiète pas. Ziandron est avec lui, ajouta-t-il en désignant le tylingre qui bondissait avec souplesse vers l'Envoyé. Itzal ne craint rien.

Les deux félins plus jeunes avaient fait mine de le suivre, mais le fauve les avait repoussés d'un grondement.

La tempête était sur eux, maintenant, alors qu'ils s'enfonçaient déjà jusqu'aux genoux dans une neige poudreuse qui détrempait leurs vêtements et les frigorifiaient. Les vents tourbillonnants de flocons leur donnaient l'impression de progresser dans un brouillard glacé qui leur piquait les joues.

Le Messager leur ordonna de se tenir la main, sans quoi ils risquaient de s'égarer. Altaïr avait juché Sanae sur Orea ; la jeune fille maintenait Lucas devant elle. La licorne avait bien précisé à Altaïr que ce service serait une exception. Elle leur prêtait main-forte parce qu'ils étaient en difficulté, mais n'était pas une monture dont on usait à sa guise.

Les Douze RoyaumesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant