Partie Unique

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Under The Skin

Le son des gouttes d'eau incessant résonnait dans les rues de Londres en 1884, les nuages gris couvraient le ciel et menaçaient les habitants, déjà trempés. La boue, ancrée entre les pavés, se mélangeaient à la couleur grisâtre du sol, l'odeur de ce mélange habituel se répandait dans l'air. Dissimulé sous une casquette en cuir en plein Fleet Street, rue du célèbre barbier sanguinaire, Sweeney Todd, Darwin Wellington courait à travers le dédale de rues sombres pestilentielles qui formait un véritable labyrinthe aux inconnus de la ville. Les enfants étaient vêtus de guenilles et couraient bruyamment, pour certains des pommes écarlates à la main, un homme à leur trousse hurlant aux voleurs. L'odeur de fruits se dégageant des habits du marchand. Leur pas résonnaient fortement dans la rue, tel un concert animé. On pouvait entendre les voix des femmes seules chez elles, parlant par la fenêtre aux passants ou aux voisins. Les bâtiments étaient proches, les fenêtres étaient vêtues de linges encore trempés et oubliés et les vieilles portes en bois usées étaient ternes, grinçantes dès qu'un habitant pressé se jetait dans le hall d'entrée pour échapper à la tempête. Les arches en pierre étaient abîmées et témoignaient du manque d'entretien de ce coin de la ville, en totale contradiction avec la cathédrale St Paul's près de Blackfriars Bridge inaugurée en 1869, constamment entretenue par la ville. Ses yeux perses balayaient l'espace, espérant trouver un recoin caché entre les cageots en bois qui lui permettraient d'échapper à ses ravisseurs. L'homme entendait distinctement l'écho des pas du groupe masculin derrière lui. Ses poumons, semblable à l'émanation de fumée de charbons chauds, lui arrachaient quelques plaintes. Cette course poursuite infernale avait déjà commencé depuis de longues minutes, paraissant des heures pour Darwin.
Une forte poigne s'empara alors de son bras, faisant basculer son corps en arrière. Une deuxième main se posa sur son épaule, précipitant sa chute au sol. Son dos percuta violemment le pavé qui se vit coloré de quelques teintes de rouges. Il vit un de ses agresseurs sortir d'une de ses poches une fiole transparente ainsi qu'un mouchoir blanc. Son vis-à-vis colla le récipient au bout de tissu pour l'imprégner du liquide mystérieux ; incapable de se débattre, Darwin sentit le mouchoir sur son visage. Rapidement sa vue se brouilla, tous ses sens arrêtèrent peu à peu de répondre. Son corps entier se relâcha sans douleur et sombra dans l'inconscience.

La pièce était lugubre, le sol aussi dur que froid. Aucun rayon lumineux ne fusait dans la petite salle. Le jeune homme, toujours allongé se relevait avec peine, quelques uns de ses membres craquaient aux moindres mouvements. Grimaçant à cause de son manque de vision et de son corps lourd, Darwin se déplaçait dans ce qui ressemblait maintenant à une cellule. Sans cette sensation désagréable d'être observé, l'homme presque aveugle aurait pu jurer être seul, emprisonné dans un néant sans fin.
Un ricanement presque sarcastique heurta les murs gelés, faisant sursauter le prisonnier. Le rythme de son cœur s'accéléra, ses mains devinrent moites, tous ses sens mis en alerte, prêt à attaquer une quelconque forme de vie. D'une voix à peine audible, tel un murmure : « À l'aide? -Qui êtes-vous?» . Aucune réponse ne parvint à ses oreilles, bientôt, des bruits de talons résonnèrent sur la pierre, semblables au bruit désagréable d'une pendule, comme la mort elle-même qui viendrait chercher son dû. « Ne vous approchez pas ! -Qui que vous soyez ! » Le silence s'insinua en lui, ce vieil ami lui tint encore compagnie lorsque la grande faucheuse approcha, un rictus satisfait et fière pendu au coin de ses lèvres.
Le tintement des clefs, le frottement des vêtements entre eux, le bruit métallique d'une porte ouverte. Puis une respiration, calme et posée. Peut-être même plusieurs. Darwin ne pu qu'écouter, se repérer aux sons après avoir perdu tout repère. Les bruits de pas s'arrêtèrent ; là, juste en face de lui ; là, où il sentait l'infâme odeur de sang et cette haleine mentholée. Saisit de frissons de pure excitation, l'entité maléfique en face de lui resta silencieuse. Des mouvements à peine perceptibles se faisaient sentir avant que des mains inconnues s'abattent brutalement sur lui, qu'un cri lui échappe et qu'on le traîne sans doute vers son lieu d'exécution. Le chemin beaucoup trop court, mais à la fois beaucoup trop pour Darwin qui entend son cœur battre douloureusement ; sa respiration trop rapide tandis que ses yeux cherchent un endroit pour l'aider, lui donner une information. Ou l'espoir.
Dieu ou une autre forme divine se manifesta alors, cette porte, entourée d'un halo de lumière dans cet espace obscur et froid. Un sourire presque fou se dessina sur ses lèvres quand, ce qui ressembla à une sortie, s'ouvrit.

Under The SkinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant