Chapitre 1 : Lumière

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Toute ma scolarité je me suis souvenu de Brainbox. Je m'étais dit qu'en sortant du bac, je fuirai maman et essaierai cette attraction que tout le monde semblait adorer en plus. J'entendais partout des gens dire que leurs parents avaient essayé et à quel point c'était formidable. Tout cet engouement autour de la boite nourrissait en moi une envie encore plus intense qu'auparavant de m'enfuir très loin et donner libre court à mon imagination. Je n'ai jamais eu aucun courage, je n'ai jamais pu ne serait-ce que toucher la poignée de la porte d'entrée quand maman était à la maison.

J'ai donc décidé que toute cette envie je l'utiliserai pour étudier plus encore. Maman verrait alors que je ne suis pas un abruti et elle m'aurait laissé m'en aller. C'est un choix idyllique par sa simplicité mais je sais que beaucoup de gens ne le font pas de part sa difficulté. Dans toutes les classes où j'ai été, tout le monde préférait la facilité. Je me suis d'ailleurs fait beaucoup d'ennemis étant à chaque fois premier de ma classe.
Je voyais tout autour de moi les gens normaux qui sortaient, jouaient, avaient des amis et m'en voulaient parce que j'étais plus fort qu'eux dans toutes les matières. J'aurais aimé leur offrir cette place, échanger les rôles. Ma seule compagnie n'a jamais été que l'odeur des vieux livres de cours. Je n'ai jamais eu aucun courage, je ne leur ai jamais proposé. Je subissais leurs paroles et leurs jeux. Je restais de marbre mais mon esprit me suppliait de dire quelque chose, de faire quelque chose.

Les années ont passées, le bac aussi. Je suis toujours chez maman à me demander quand je pourrais m'en aller. Elle semble plus gentille maintenant qu'elle sait que je ne suis pas un abruti mais je n'arrive toujours pas à lui poser la question. Le simple fait d'ouvrir la bouche et de m'adresser à elle me terrifie, sa réaction me terrifie. Voilà ce que je fais tous les jours. Je pense à comment lui dire, je pense à sa réaction et je ne fais rien. Chaque matin, une partie de moi me crie de m'en aller et chaque matin toujours plus fort. Ce matin là, c'en était trop. Je partirai aujourd'hui. Maman s'apprête à sortir faire les courses, je vais tout lui dire.
"Maman, je peux te parler ?"
"En rentrant, d'accord ? Je vais faire les courses. Tu aimes le poulet ?"
"Oui, mais..."
Elle est partie.
Toute la motivation que j'ai réussi à rassembler ce matin était partie. Je ne savais pas quoi faire. Je repensais à ce que les autres disaient au lycée. Les gros durs disaient qu'il ne fallait pas écouter ses parents et qu'il fallait fuguer, tous les autres leur disaient qu'ils étaient courageux.
Est-ce ça le courage ? Le courage de fuir ? J'avais beau réfléchir à cette question je n'étais pas plus avancé. Il fallait que je parte d'ici, je n'ai jamais eu aucun courage, j'ai décidé d'en prendre un à deux mains, quel qu'il soit.
Je vérifiai que maman ne rentrait pas, j'ai pris un sac avec des affaires et j'ai quitté la maison.

Je suis euphorique. J'ai réussi. Est-ce bien ou mal ? On s'en fiche, j'ai réussi. Ces mots raisonnaient dans ma tête tandis que je m'aventurais vers nulle part. C'est vrai, ça. Je ne savais absolument pas où aller, je voulais surtout fuir ce que je voyais comme une prison maintenant.
À peine ai-je commencé à me demander où aller que la question ne se posait plus. Je voulais voir la boite. Le Boulevard des Capucines n'était pas très loin, je pouvais marcher. Tendis que je m'en rapproche, l'enfant que je suis essaie d'imaginer à quoi peut bien ressembler un tel objet. "Brainbox". J'imaginais une grosse caisse métallique avec des câbles partout, comme des liaisons neuronales, comme un gros cerveau, tout simplement.
En fait, non. Ce n'est rien qu'une petite cabine noire, pas plus grande qu'une cabine de douche. Aucun câble, aucun super-ordinateur comme ceux que combattait Captain Cool. Juste une cabine. Il était tard, il n'y avait pas beaucoup de gens. Il y avait encore une femme qui faisait la queue et un vieux monsieur à côté de l'entrée. Elle s'approche du vieil homme:
"Vous venez tous les jours, vous, lui demande l'homme au comptoir.
- Oui, répond la femme, c'est dur de vivre avec notre réalité en ce moment.
- Je vous comprend, mais n'oubliez pas que c'est ici que vous vivez. Ne vous échappez pas.
- Ne vous inquiétez pas, je ne suis pas accroc.
- Comme vous voudrez."
La femme entre, l'homme ferme la porte. Je pensais, agacé, attendre des heures que cette femme sorte, si on pouvait s'amuser dans la boite autant de temps qu'on le souhaite.
À mon grand étonnement, la femme sort déjà.
Je demande à l'homme :
"C'est si rapide que ça ?
- Tu sais, tout se passe dans la tête. C'est comme un rêve. Les secondes peuvent être des heures."
C'est mon tour. 
J'entre dans la cabine, le vieil homme, avant de fermer la porte, me demande si je suis un esprit fort. Je répond oui, machinalement, j'étais bien trop excité pour réfléchir.
"Dans ce cas, amuse toi bien." Dans ce cas ? Qu'est ce qu'il se passerait si...

Il ferme la porte, je suis dans le noir complet. Je ne vois rien mais je sens qu'il y a quelque chose.

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⏰ Dernière mise à jour : Apr 21, 2019 ⏰

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